Télémédecine : se soigner à distance

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Par Cécile Fratellini

Temps de lecture estimé 7 minute(s)

Consulter un professionnel de santé par écrans interposés, voilà un exemple de télémédecine. Cette pratique médicale à distance se développe.

Réduire les inégalités d’accès aux soins. C’est l’un des enjeux de la télémédecine qui regroupe « les actes médicaux, réalisés à distance, au moyen d’un dispositif utilisant les technologies de l’information et de la communication (TIC) »*. Si ces nouvelles technologies sont déjà bien présentes dans le domaine de la santé avec des sites internet, des plateformes téléphoniques où le public peut trouver des conseils ou des recommandations (lire encadré page 12), la télémédecine va plus loin et permet de soigner à distance. Cinq priorités nationales ont été définies**. Et c’est en tenant compte de ces priorités et des besoins de sa population, que chaque agence régionale de santé (ARS) a défini les projets de télémédecine qu’elle souhaite développer.

* Décret n° 2010-1229 du 19 octobre 2010 relatif à la télémédecine.
** La permanence des soins en imagerie médicale, la prise en charge des AVC (accident vasculaire cérébral), la santé des personnes détenues, la prise en charge d’une maladie chronique (insuffisance rénale ou cardiaque, diabète …) et les soins en structure médicosociale ou en hospitalisation à domicile.

 

Consulter et poser un diagnostic à distance

La télémédecine comprend cinq actes. Quand un médecin consulte à distance et pose le diagnostic, c’est une téléconsultation. Un exemple : « Télé-AVC » mis en place dans la région Nord-Pas de Calais. Un patient victime d’un AVC la nuit ou le week-end à Lens, Maubeuge ou Valenciennes peut bénéficier d’une téléconsultation par un neurologue et un radiologue.

Quand il arrive aux urgences pour des troubles neurologiques (troubles visuels, sensoriels, début d’aphasie…), il est pris en charge pour une consultation à distance avec le neurologue.

 

Celui-ci discute avec lui et l’examine au moyen d’une caméra dirigée à distance (un zoom peut se faire sur la pupille) pour évaluer la nature du trouble neurologique. Une IRM est également réalisée et est interprétée à distance par le radiologue. Le neurologue peut alors déterminer s’il faut pratiquer une thrombolyse (injection d’un produit médicamenteux qui vise à dissoudre le caillot qui obstrue l’artère). Si oui, elle est réalisée sur place sous la surveillance du neurologue, c’est de la téléassistance médicale. « L’intérêt pour le patient est d’avoir rapidement accès à l’expertise d’un neurologue », explique Yves Beauchamp, chargé de mission des systèmes d’information de l’offre de soins à l’ARS du Nord-Pas-de-Calais.

 

Suivre des malades chroniques

Grâce à la téléexpertise, un médecin peut faire appel à un confrère dans un établissement voisin pour avoir son avis sur le cas par exemple de l’un de ses patients souffrant d’une leucémie. En effet, toutes les compétences sur le cancer ne sont pas regroupées dans un même hôpital.

La télésurveillance médicale, où un médecin surveille et interprète à distance les paramètres médicaux d’un patient, est utilisée notamment pour des malades chroniques. Des patients insuffisants cardiaques sont ainsi suivis à distance. Et si une anomalie est constatée (essoufflement anormal…), le professionnel de santé qui réalise le suivi peut réagir immédiatement. Enfin la régulation médicale est mise en place la nuit, les jours fériés et le week-end. Lors de l’appel d’un patient, le médecin des centres 15 établit un premier diagnostic par téléphone.

 

Limiter les déplacements des patients et des médecins

Dans la région Centre, l’EHPAD (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) mutualiste de Chevilly (Loiret) vient d’être équipé d’un « chariot wifi ». « Dans un premier temps, cela permettra par exemple au médecin généraliste qui voit une tache apparaître sur la peau de l’un de ses patients, de constituer un dossier et de l’envoyer par liaison sécurisée à un dermatologue. À terme, les consultations de spécialistes tels que le dermatologue, le gériatre et le cardiologue se feront en direct et à distance. C’est un avantage considérable car les résidents âgés, ou parfois agités, se déplaceront moins », explique Karine Gondat, directrice de l’EHPAD mutualiste de Chevilly.

 

Améliorer l’accès aux soins

Certaines régions souffrent d’un manque de médecins, notamment de certains spécialistes. Obtenir un rendez-vous peut prendre plusieurs mois. La télémédecine réduit les délais.
Dans cette optique, un projet (Télémédinov) a été porté par le Centre hospitalier Loire- Vendée-Océan. Ainsi, à l’hôpital de jour de Challans, les patients atteints de diabète peuvent obtenir l’interprétation à distance et dans la journée de leur rétinographie (photographie du fond de l’œil). « Dans la région, le temps de trajet peut parfois être long aussi bien pour les patients que pour les médecins. C’est pourquoi des téléconsultations gériatriques sont aujourd’hui réalisées de l’hôpital de Machecoul vers certains EHPAD du territoire : le patient n’a pas besoin de se déplacer et n’attend pas. L’objectif étant de le généraliser à l’ensemble des EHPAD », explique Olivier Plassais, directeur du système d’information du Centre hospitalier Loire-Vendée Océan. Des téléconsultations en dermatologie, psychiatrie et diététique se développent également autour de ce centre hospitalier.

 

En chiffre

331 c’est le nombre d’activités de télémédecine sur l’ensemble du territoire recensées par l’ANTEL (Association nationale de télémédecine) au 1er janvier 2013. Les actes de téléexpertise sont le plus souvent développés, suivis par ceux de téléconsultations.

 

Priorité Santé Mutualiste : du téléphone au « chat »

Le développement de la télémédecine doit s’accompagner de celui de la téléinformation. C’est pourquoi la Mutualité Française a développé Priorité Santé Mutualiste. Un site internet, une plateforme téléphonique, des « chats »… « Sur le site prioritesantemutualiste.fr, on trouve des conseils de prévention, des informations pratiques sur les maladies et surtout la possibilité d’échanger avec des professionnels de santé », explique Thérèse Blain, chargée de projets à PSM. Ainsi, des « chats experts » sont organisés régulièrement et une plateforme téléphonique accessible au 3935 propose un service d’accompagnement personnalisé (arrêt du tabac, équilibre alimentaire…).

 

Les SMS au service de la santé

« Bonjour Bernard! Avez-vous pensé à prendre votre médicament ? » C’est ce type de message personnalisé que les patients qui ont subi une angioplastie coronaire (pose d’un « stent », sorte de ressort utilisé pour dilater les artères) au service de cardiologie de l’hôpital de la Timone à Marseille reçoivent chaque jour. Car la prise d’antiplaquettaires, tels que l’aspirine, est capitale pour prévenir les complications. « On s’est aperçu que de nombreux patients arrêtaient leur traitement. Nous avons donc cherché un moyen d’améliorer cela et nous avons pensé au SMS. Il est envoyé pendant un mois, tous les jours vers 12 heures. Le message est personnalisé et n’est pas directif », explique le Dr Jacques Quilici, cardiologue et coauteur avec le Dr Thomas Cuisset d’une étude qui a montré que les patients qui recevaient le SMS quotidiennement prenaient mieux leur traitement.

 

« La télémédecine permet de retarder des hospitalisations »

Le point de vue du Dr Pierre Simon, président de l’ANTEL (association nationale de télémédecine) 

« La télémédecine a un rôle primordial dans le suivi des maladies chroniques. L’intérêt de la télésurveillance a été démontré chez les patients souffrant d’une insuffisance cardiaque sévère. Environ 300 000 patients sont hospitalisés chaque année pour une insuffisance cardiaque et, chez la plupart, l’hospitalisation pourrait être évitée ou retardée grâce à la télésurveillance. Même constat chez les patients en insuffisance rénale sévère : 30 % d’entre eux arrivent en dialyse en urgence, sans avoir jamais eu de prise en charge préalable de leur insuffisance rénale. La télésurveillance est aussi un moyen de prévenir des accidents d’hypoglycémie chez des patients atteints de diabète de type 1. »

 

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