Urgences, mode d’emploi

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Par Cécile Fratellini

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Urgences ou pas urgences ? Le soir, le week-end ou les jours fériés, la question peut particulièrement se poser. Le Dr Gérald Kierzek, médecin urgentiste à l’Hôtel-Dieu à Paris nous éclaire sur le sujet.

Faut-il appeler le 15 avant d’aller aux urgences ?

Gérald Kierzek : Oui, c’est important, car en France, le Samu centre 15 n’est pas uniquement là pour vous envoyer une ambulance. Il est aussi là pour vous donner un conseil médical 24h/24, 365 jours par an. Le Samu, ce n’est pas juste pour l’accident de voiture ou l’infarctus. Le médecin peut faxer une ordonnance à la pharmacie ou vous envoyer chez le médecin de garde, jugeant que la venue aux urgences n’est pas nécessaire. Le 15, c’est quasiment une plate-forme de télémédecine publique. Décrire les symptômes pour avoir un diagnostic par téléphone, c’est un télédiagnostic.

Quand vous appelez le 15, un auxiliaire permanencier de régulation médicale vous répond puis un médecin régulateur. Ils vous posent des questions administratives : votre adresse, quel étage… Bien souvent, ça vous énerve, mais c’est important car cela permet de gagner du temps ensuite pour envoyer les secours.

Quand faut-il aller aux urgences ?

G.K. : Il vaut mieux aller aux urgences pour rien ou appeler le 15 pour rien plutôt que de sous-estimer un problème qui peut dégénérer. Le patient n’est pas médecin ! Quand un symptôme inquiète, c’est soit une urgence ressentie soit une urgence réelle, mais c’est une urgence. Le discours culpabilisant « vous venez trop aux urgences » est un discours dangereux car il peut faire perdre des vies.

80 % des gens ne sont pas hospitalisés après leur passage aux urgences. Mais ne croyons pas que ces 80 % soient venus pour rien. Imaginons, vous toussez, vous avez de la fièvre, votre médecin n’est pas disponible. Vous allez aux urgences où l’on vous fait une radio : vous avez une pneumonie. Vous sortez avec des antibiotiques. Si vous n’étiez pas allé aux urgences, vous seriez resté chez vous et votre infection aurait pu se transformer en septicémie le temps du week-end.

Gérald Kierzek livre son expérience d’urgentiste dans son 101 conseils pour ne pas atterrir aux urgences (Éditions Robert Laffont, 18 euros).

Dans quels cas « l’urgence » est-elle évidente ?

G.K. : Il y a des cas effectivement où il ne faut pas se poser de questions. L’urgence vitale : c’est l’infarctus du myocarde. Si vous avez une douleur dans la poitrine aiguë et brutale, dans le doute appelez le 15. Le médecin régulateur va, en fonction des facteurs de risque, de votre âge et du type de douleurs vous envoyer une ambulance de réanimation. Le diagnostic sera posé, le traitement peut démarrer à la maison. Ensuite, vous êtes directement envoyé dans un service de cardiologie pour déboucher l’artère et non pas aux urgences. Il faut gagner du temps car plus on attend, plus on perd des cellules du myocarde.

Deuxième course contre la montre : l’AVC (accident vasculaire cérébral). Quand vous ressentez une perte de motricité, de sensibilité, une paralysie faciale, un trouble des mots… Il faut suspecter un AVC. Là encore, appelez le 15. L’objectif est de vous amener dans une unité neurovasculaire, pour limiter l’attente. C’est le gain de temps qui permet de sauver des vies. Plus on attend, plus on perd des neurones. Et même si vous retrouvez votre sensibilité, il faut contacter le 15 car c’est une alerte. C’est quelque chose de transitoire qui peut devenir définitif. Il faut donc profiter de ce répit et de ces symptômes qui régressent pour consulter.

Enfin, troisième cas où il n’y a pas d’hésitation : c’est l’arrêt cardio respiratoire. Quelqu’un est inconscient avec la respiration et le cœur qui se sont arrêtés. Une fonction vitale est détériorée. Il faut appeler le 15 et là encore la personne ne passera pas par la « case urgences » mais ira directement en réanimation.

Que faire en cas de fièvre modérée, de gastro-entérite… ?

G.K. : Une fièvre modérée, une douleur abdominale pas trop aiguë, un mal de tête… Toutes ces petites choses non programmées doivent être évaluées. Si c’est possible, le patient doit se tourner dans un premier temps vers son médecin traitant.

Pour une gastro par exemple, si vous n’avez pas de facteur de risques (moins de 2 ans, plus de 75 ans, insuffisant cardiaque ou respiratoire…) vous le gérez à la maison. Vous pouvez vous rendre chez votre pharmacien qui est un relais intéressant. Il n’est pas là que pour vendre des médicaments, il peut aussi vous donner des conseils.

En revanche, si vous avez des facteurs de risques, que vous êtes incapable de vous alimenter et que vous avez quelques troubles de conscience, le curseur se déplace : ce n’est pas une gastro normale. Il faut consulter le médecin traitant dans un premier temps et s’il n’est pas disponible, il faut appeler le 15.

Quels documents apporter aux urgences ?

G.K. : En plus d’une pièce d’identité, de la carte Vitale et de la carte de votre mutuelle ou de votre assurance complémentaire, il est utile d’avoir l’original ou une copie de l’ordonnance en cours, de votre dernier électrocardiogramme, de votre compte-rendu d’hospitalisation… Vous pouvez également les photographier avec votre smartphone. Cela permet aux médecins d’avoir une référence et d’éviter les interactions de médicaments. En attendant le dossier médical partagé (DMP), c’est un DMP artisanal !

En savoir plus

Catastrophes naturelles, attentats… Gérald Kierzek donne, dans son livre Ayez les bons réflexes (Éditions Fayard, 14 euros), quelques conseils pour se préparer, anticiper, analyser, secourir…

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