Autisme : le parcours du combattant des familles

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Par Pauline Leduc

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© Macsnap/iStock

Difficultés de diagnostic, structures d’accueil surchargées… Malgré des progrès ces 15 dernières années, le parcours des parents d’enfants autistes reste souvent semé d’embûches.

Le 15 juillet dernier, l’État français a été condamné par le tribunal administratif de Paris à verser plus de 240 000 euros à sept familles d’enfants autistes, mettant ainsi en lumière le retard de l’Hexagone dans la prise en charge de ce trouble du développement. « Ce jugement va faire jurisprudence et apporter un peu de reconnaissance aux familles : faute de structures et de moyens adaptés, de nombreux parents sont forcés d’envoyer leurs enfants en Belgique ou d’arrêter de travailler pour s’en occuper à temps plein », explique M'Hammed Sajidi, président de l’association VAINCRE L’AUTISME, à l’initiative de cette procédure. Il estime cependant que « ces indemnités restent ridicules par rapport à l’ampleur du problème ».

En France, l’autisme toucherait 650 000 personnes dont près de 120 000 enfants mais ces chiffres pourraient être en deçà de la réalité tant les formes de cette maladie sont nombreuses et les professionnels de santé encore insuffisamment formés à les reconnaître.

 

Errance autour du diagnostic

« Selon une étude que nous avions menée en 2011 auprès des professionnels de santé, 30 % des pédiatres ne savent pas exactement ce qu’est l’autisme », se désole Aurélie Camm-Chapel, directrice de la communication du réseau Autistes sans frontières avant d’ajouter que les médecins passent « d’autant plus à côté que les symptômes ne sautent pas toujours aux yeux ». Car l’autisme est une pathologie complexe pouvant recouvrir différents symptômes, plus ou moins sévères, variant d’un mutisme total à des comportements exacerbés. C’est pourquoi les professionnels préfèrent parler de Troubles du Spectre Autistique (TSA). Ces derniers se manifestent habituellement dans les trois premières années de la vie de l’enfant.

« Il est très difficile de faire des généralités mais il s’agit d’enfants qui ne communiquent pas avec autrui, sont absents dans le regard, ne réagissent pas aux situations de la vie courante. Ils peuvent aussi souffrir de problèmes de développement du langage, de troubles du comportement ou encore d’actes répétitifs » décrit Pierre Ferrari, professeur de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent à l’université Paris-Sud 11 et auteur d’un Que-Sais-Je ? (Puf) consacré à l’Autisme Infantile. Si ce dernier estime que le dépistage est bien plus aisé aujourd’hui qu’il y a 10-15 ans, de nombreuses familles et associations témoignent de l’errance autour du diagnostic.

 

Difficultés de prise en charge

Dans son ouvrage Le voleur de Brosse à dents, la journaliste et animatrice de télévision Églantine Eméyé décrit les difficultés rencontrées lorsqu’elle commence à s’inquiéter de l’état de son fils Samy, depuis diagnostiqué autiste, épileptique et polyhandicapé. Elle raconte la réaction des médecins qu’elle allait voir chaque semaine pour tenter de comprendre : « vous êtes trop inquiète et impatiente ». « Je repars humiliée, avec mon bébé dans les bras dont je soutiens encore la tête, à plus de 6 mois et demi. Ce bébé si mou, si calme, si fatigué qui ne sourit plus jamais, ne crie pas d’avantage, mais qui va, paraît-il, si bien » écrit-elle.

Malgré les efforts mis en place par l’État avec la création, depuis 2005, de trois « Plans Autisme » qui couvrent aussi bien la détection précoce que la prise en charge des enfants ou adultes, les démarches des parents ressemblent parfois à un parcours du combattant. Car une fois l’autisme diagnostiqué, il faut envisager l’avenir : le quotidien, la scolarisation, l’apprentissage de l’indépendance, etc. pour aider ces enfants à devenir des adultes intégrés socialement.

S’il existe différentes méthodes, parfois importées de l’étranger, pour stimuler l’enfant et l’aider à se développer, nombre d’entre elles ne sont pas remboursées, tandis que les structures d’accueil à même de les prendre en charge croulent sous les demandes. Parallèlement, selon les chiffres du gouvernement, un peu plus de 40 000 enfants autistes sont scolarisés, en « milieu ordinaire » ou au sein d’un Institut Médico Éducatif (IME). Soit seulement un tiers des jeunes autistes. L’espoir d’une amélioration de la situation est pourtant plus que permis : tandis que l’État s’emploie à rattraper son retard, les familles, associations, professionnels de santé s’engagent au quotidien pour faire bouger les choses.

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