Santé numérique : quelles sont les prochaines étapes ?

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Par Solal Duchêne

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La santé numérique s’est considérablement développée au cours de la pandémie de Covid-19. De nombreux experts européens souhaitent aujourd’hui poursuivre cette transformation. Tout en rappelant la nécessité de rendre la santé numérique plus sûre. Décryptage.

Qu’est-ce que la santé numérique ? L’e-santé, comme on peut aussi l’appeler, associe les technologies de l’information et de la communication (TIC) à l’ensemble des domaines de la santé. Les plateformes de téléconsultation ou le récent certificat Covid européen en sont directement issus. En Europe, ce domaine est en plein essor. On y dénombre plus de 600 entreprises de santé numérique, dont 63 % ont été fondées au cours des cinq dernières années.

À l’occasion de la présidence française de l’Union européenne, le colloque « Une approche multi-acteurs pour accélérer la transformation numérique en santé en Europe, au-delà de la Covid-19 » a eu lieu en ligne en février 2022. Il était organisé par le G20 Health & Development Partnership, une organisation à but non lucratif qui aide les pays du G20 à coordonner leur politique de santé.

Une vingtaine d’experts, scientifiques, entrepreneurs et dirigeants ont tenté de répondre à la question suivante : « Comment transformer la santé grâce au numérique ? ». Selon eux, l’e-santé a fait un bond en avant durant la pandémie, contribuant à sauver de nombreuses vies. Pour accompagner son développement, il convient aujourd’hui de la réglementer afin de la rendre plus sûre.

Collecter des données de santé en ligne pour aider la recherche

Pour les médecins participant au colloque, il est probable que de nouvelles maladies infectieuses – voire de nouvelles pandémies – apparaissent. Pour y faire face, la création d’un Espace européen des données de santé est essentielle, selon ces experts. Le partage de chiffres sur les contaminations, la circulation d’un virus ou les symptômes des malades s’avèrent en effet déterminants lors d’une crise sanitaire. De même que les retours d’expériences sur les traitements et les mesures de protection mises en place. « Ces données doivent être accessibles simplement et interopérables, c’est-à-dire que chacun doit pouvoir contribuer », déclare Philippe Duneton, directeur exécutif d’Unitaid, une agence de santé internationale spécialisée dans l’innovation.

Pour l’ancien président de l’Agence européenne du médicament, la constitution d’une banque de données sanitaires alimentée en temps réel est nécessaire. Chacun disposant des mêmes informations, la coordination internationale des politiques de santé sera facilitée. Qu’il s’agisse d’une pandémie ou d’une circulation de virus plus endémique (stabilisée), comme l’hépatite A.

À l’avenir, des algorithmes pourraient aussi se servir des informations collectées. « L’intelligence artificielle nous permet d’envisager un jour des dépistages et des traitements, pour un moindre coût. Certains algorithmes sont actuellement capables de reconnaître des cellules précancéreuses avec une précision de 85 % », explique Philippe Duneton.

Faciliter la circulation grâce à un réseau de santé numérique

Le certificat Covid numérique de l’UE est actuellement reconnu dans 62 pays*. Il s’agit du QR code appelé en France passe sanitaire ou passe vaccinal. « Ce certificat a permis de continuer à circuler entre les pays, ce qui a eu un impact très positif sur la confiance des populations », estime Ioana-Maria Gligor, chef d’unité Santé digitale à la Commission européenne. Autre objectif de ce certificat : le traçage des cas positifs, afin de pouvoir les isoler. Grâce à cet outil, les nations ont pu lutter conjointement contre la pandémie. « De nombreuses vies ont sans doute été épargnées », indique la dirigeante européenne.

Outre les populations, la circulation des marchandises a aussi été facilitée par ce certificat digital. Ce soutien au commerce aura permis à l’Union Européenne d’éviter de très importantes pertes financières, d'après Ioana-Maria Gligor. « Près de six milliards d’euros ont été économisés grâce au dispositif ». La dirigeante roumaine imagine déjà la suite d’une telle collaboration internationale : un réseau de santé numérique partagé et accessible à tous. « À nous de construire une structure sécurisée, afin que les gens puissent voyager avec leurs données de santé accessibles et traduites ». Et pourquoi pas, un jour, accéder à son ordonnance ou à ses antécédents de santé à l’autre bout du monde.

Réguler et sécuriser le futur réseau est indispensable

« La sécurité doit être la priorité des futurs outils », affirme Ray Pinto, directeur de la politique de transformation numérique pour Digitaleurope. Cette association professionnelle accompagne les industries en transition vers le numérique. D’après le dirigeant, l’adhésion des citoyens à l’e-santé ne se fera qu’avec la confiance.

Pour l’encourager, Ioana-Maria Gligor, de la Commission européenne, souhaite une réflexion sur les questions éthiques et de RGPD**. « Nous devons construire un règlement pour encadrer cet espace commun et permettre un usage sécurisé des données pour la recherche. » Plus de 400 réunions ont déjà eu lieu sur le sujet durant la pandémie. Des propositions de législation devraient être formulées par la Commission européenne durant la présidence française de l’UE.

Enfin, Ray Pinto, de Digitaleurope, rappelle que l’e-santé devra profiter à tous de manière égale. « Il faut absolument garantir le concept d’équité sanitaire. Personne ne devra se retrouver exclu à cause de la technologie. »

En France, un plan pour l’innovation en santé

Le plan « Innovation santé 2030 » a été présenté par le président de la République Emmanuel Macron, à l’occasion de la réunion du Conseil stratégique des industries de santé (CSIS) le 29 juin 2021. Les trois grands axes de la stratégie d’innovation en santé y ont été dévoilés : le développement de la santé numérique, la lutte contre les pandémies et la recherche de nouvelles biothérapies. Ce plan bénéficiera d’un budget avoisinant les 7 milliards d’euros.

*Le certificat Covid numérique de l’UE est reconnu dans les 27 États membres de l’Union Européenne et dans 35 pays hors UE. Il atteste qu’une personne a été vaccinée contre la Covid-19, qu’elle a reçu un test négatif ou qu’elle s’est rétablie de la Covid-19.

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