AVC : comment le soigner ?

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Par Propos recueillis par Cécile Fratellini

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Il n’existe pas un accident vasculaire cérébral (AVC) mais DES AVC. Selon le type, la prise en charge du patient sera différente. Explications.

Le Pr Emmanuel Touzé est neurologue et président de la Société française neuro-vasculaire (SFNV).

Comment soigner un patient victime d’un AVC ?

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Pr Emmanuel Touzé

Emmanuel Touzé : Plusieurs situations existent. Si le patient fait un infarctus cérébral et arrive dans les 4 h 30 après les premiers signes, on peut alors lui administrer un médicament par intraveineuse, c’est la thrombolyse.

Un nouveau traitement est arrivé en 2015 : la thrombectomie mécanique, c’est-à-dire que l’on peut aller chercher le caillot qui bouche l’artère. Pour ce faire, le patient doit être envoyé dans un centre expert où il y a un service de neuroradiologie interventionnelle, en général il s’agit des CHU. Dans ce cas, le patient doit être transféré dans un délai de 6 heures. Mais les choses évoluent beaucoup. Grâce au progrès de l’imagerie, on arrive parfois à traiter des patients au-delà de 6 heures. C’est rare mais ce sont des personnes chez qui l’infarctus prend plus de temps à se constituer avec une fenêtre de traitement plus large. On arrive ainsi à les traiter par thrombectomie jusqu’à 12 heures après les premiers signes. Dans ce cas-là aussi, la télémédecine est importante. Car une fois que le diagnostic en imagerie est établi, on décide tout de suite si le patient est éligible à un traitement par thrombectomie et on organise le transfert au plus vite.

En cas d’hémorragie, le traitement est différent ?

E.T. : Effectivement, si c’est une hémorragie, il n’y a pas de médicament spécifique. Mais en baissant la pression artérielle par exemple, on peut améliorer les choses. Les patients doivent également être pris en charge rapidement dans une unité neuro-vasculaire. L’intérêt de ces unités spécialisés, c’est la pluridisciplinarité, la connaissance, l’entraînement avec des protocoles de prises en charge, de prévention des complications, et de diagnostic. En fonction de la cause, on adapte rapidement le traitement pour éviter que les patients récidivent ou que leur situation s’aggrave. La rééducation peut également commencer en unité neuro-vasculaire et se poursuivre par la suite. Elle améliore la récupération et permet de retrouver certaines fonctions comme la marche par exemple.

La prise en charge de l’AVC s’est améliorée grâce à l’imagerie d’abord puis grâce à la création des unités neuro-vasculaires (UNV). Où en est-on aujourd’hui ?

E. T. : Il y a eu des progrès dans les techniques d’imagerie et notamment de l’IRM dans les années 2000, ce qui a permis de révolutionner le diagnostic de l’AVC. Pourquoi ? Parce qu’on peut faire un diagnostic plus précoce, plus précis notamment sur des petites lésions. Nous pouvons mieux évaluer la sévérité de l’AVC et donc l’état du cerveau. L’existence aujourd’hui de 139 unités neuro-vasculaires en France favorise également la prise en charge des patients victimes d’AVC. Et puis d’énormes progrès ont été faits en matière de prévention depuis 40 ou 50 ans. On traite mieux l’hypertension, le cholestérol, le diabète, facteurs de risque de cette maladie. Le risque d’AVC est moindre que nos ancêtres mais comme on vit plus longtemps, le risque d’AVC reste important. Par le simple fait de l’âge et du vieillissement, le nombre d’AVC continue d’augmenter. C’est paradoxal, on progresse dans le traitement mais on fait apparaître des maladies liées au vieillissement. L’AVC devient une maladie chronique. En effet, si l'AVC est une maladie aiguë, ses conséquences sont chroniques (handicap, démence, troubles cognitifs sans démence, dépression, récidive d’AVC…) à moyen et long terme. Mais les séquelles sont moins importantes qu’avant et les patients en meurent moins.

Quel est le rôle de la télémédecine dans la prise en charge de l’AVC ?

E.T. : Aujourd’hui, on compte environ 150 sites de téléAVC. La télémédecine a amélioré la prise en charge de l’AVC et s’est démocratisée sur tout le territoire. Les premières expériences datent d’il y a plus de 10 ans. On a ainsi réduit les inégalités d’accès au traitement de l’AVC aigu. En effet, en cas d’artère bouchée, on peut pratiquer la thrombolyse, c’est-à-dire administrer un médicament par voie intraveineuse. Un neurologue donne son expertise à un collègue des urgences de l’établissement concerné via la télémédecine. Il peut interroger le patient, consulter l’imagerie et décider du traitement à mettre en place. La partie la plus aiguë peut ainsi être prise en charge dans l’hôpital classique avant que le patient soit transféré dans une unité neuro-vasculaire (UNV). Un exemple sur un site dans la Manche où il n’y a pas ce type d’unité : avant la télémédecine, seulement 3 ou 4 thrombolyses étaient pratiquées chaque année, aujourd’hui, on en fait 25.

Par Propos recueillis par Cécile Fratellini

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