Covid-19 : allez-vous vous faire vacciner ?

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Par Angélique Pineau-Hamaguchi

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Les Français seraient les plus « antivaccins » au monde. Et pourtant, ils sont nombreux à se précipiter dans les centres de vaccination en temps de Covid. Entre peur du virus et craintes envers les nouveaux vaccins, nous avons demandé à nos lecteurs s’ils avaient l’intention ou non de se faire vacciner. Découvrez leurs témoignages.

« Bien que frileux vis-à-vis de la vaccination en général (même si on m'a tout "imposé" jeune puis pour mon travail), je me suis fait vacciner pour la première fois contre la grippe cet automne (j'ai 71 ans). Et je tenterai celui contre le Covid ». Ce témoignage de Jacques, l’un de nos lecteurs habitant dans le Tarn, est révélateur des nombreux messages que nous avons reçus suite à notre appel à témoignages lancé en janvier 2021. En majorité, nos lecteurs sont plutôt enclins à se faire vacciner.

Ce coronavirus et sa propagation dans le monde entier ont eu des effets inédits, avec des confinements et une crise à la fois sanitaire et économique. Et face à cette situation sans précédent, certains Français auraient revu - au moins pour cette fois - leur point de vue sur la vaccination. D’ailleurs, contrairement à la grippe H1N1 en 2009, les centres de vaccination ne restent pas désespérément vides. Certains ont même des difficultés à répondre à la demande, faute de doses de vaccins suffisantes.

Alors la pandémie de Covid-19 aurait-elle rebattu les cartes de l’antivaccinisme ? Les Français seraient-ils devenus subitement « pro-vaccins » ?

Les antivaccins en recul en France ?

« L’antivaccinisme ne va sans doute pas disparaître du jour au lendemain. Il existe depuis trois siècles, c’est-à-dire depuis l’invention de la vaccination », tempère Françoise Salvadori. Docteure en pharmacie et maître de conférences en immunologie à l’université de Bourgogne, elle a coécrit, avec Laurent-Henri Vignaud, un essai sur les « Antivax »*, c’est-à-dire les personnes qui s’opposent à la vaccination.

« Dans le cas présent, c’est peut-être la pénurie qui crée l’envie. La méfiance envers les vaccins anti-Covid augmentait jusqu’au mois de décembre, avant le lancement de la campagne de vaccination. Et depuis que l’on sait que l’on pourrait en manquer, il semble que la défiance ait tendance à diminuer. Par ailleurs, il y a traditionnellement moins d’antivaccins chez les plus âgés. Or, ce sont ceux eux qui sont le plus touchés par la maladie et aussi ceux qui peuvent se faire vacciner en premier. »

Les Français ne sont donc pas devenus majoritairement pro-vaccins. Selon une étude de l’institut de sondage Ipsos, menée en décembre 2020 pour le Forum Économique mondial auprès de 15 pays, la France figure toujours en queue de peloton. C’est le pays où les intentions de vaccination contre le Covid sont les plus faibles. Seuls 40 % des Français souhaitent se faire vacciner s’ils en avaient la possibilité. C’est deux fois moins que les Chinois, et loin derrière les Britanniques (77 %), les Américains (69 %), les Espagnols ou les Italiens (62 %).

* Antivax, la résistance aux vaccins du XVIIIe siècle à nos jours de Françoise Salvadori et Laurent-Henri Vignaud (éditions Vendémiaire, 2019).

Des inquiétudes sur les effets secondaires des vaccins

Ce qui effraie le plus les Français réfractaires aux vaccins, ce sont les éventuels effets secondaires : 72 % en ont peur. Ceux qui ne souhaitent pas se faire vacciner évoquent aussi des doutes sur l’efficacité ou encore le fait de ne pas être eux-mêmes particulièrement à risque face à la maladie. Et 14 % expliquent être tout simplement « antivaccin » de façon générale.

« J’aimerais bien me faire vacciner pour aller voir mes enfants et petits-enfants à l'étranger car je suis à risques. J’ai des facteurs de comorbidité : une BPCO**, des problèmes de cœur, de la tension. Mais j’ai aussi un terrain allergique, avec deux chocs anaphylactiques*** dans le passé », raconte Renée, l’une de nos lectrices.

« On ne peut nier qu’il y ait de possibles effets secondaires mais c’est le cas de tout vaccin, de tout médicament, rappelle Françoise Salvadori, docteure en pharmacie et maître de conférences en immunologie à l’université de Bourgogne. Avec les premiers vaccins anti-Covid, il y a plus fréquemment que pour d’autres vaccins des petites réactions inflammatoires à l’endroit de la piqûre, un peu plus de fatigue aussi. Mais rien d’anormal. Cela correspond au déclenchement de la réponse immunitaire et cela passe en général avec un peu de paracétamol. »

Quant à la peur d’un éventuel choc anaphylactique, Françoise Salvadori souligne que c’est quelque chose de très rare. « Et les personnes qui viennent d’être vaccinées restent sous la surveillance de professionnels de santé plusieurs minutes après l’injection. Donc en cas de choc, phénomène qui survient très rapidement, elles peuvent être prises en charge tout de suite. »

** BPCO : bronchopneumopathie chronique obstructive.

Des vaccins à ARN Messager qui font peur

En dehors des effets indésirables, c’est aussi la nature même des premiers vaccins anti-Covid qui pose question. Celui de Pfizer/BioNTech et celui de Moderna sont les premiers vaccins à ARN Messager mis sur le marché. Et comme toute nouveauté, ils suscitent des interrogations, des peurs, voire des suspicions.

« Je me ferai vacciner si les vaccins "traditionnels" de type vecteur viral ou protéines virales sont autorisés mais pas avec le vaccin à ARN messager, nous dit Dan, l’un de nos lecteurs. Car il n’y a pas assez de recul sur cette technologie intrusive. » C’est d’ailleurs souvent le procès qui est fait à ces « nouveaux » vaccins.

« Ils ne sont pourtant pas si nouveaux que cela, insiste Françoise Salvadori. En réalité, cela fait longtemps que cette technique est étudiée. Parmi les critiques, on entend souvent dire que ces vaccins auraient été "vite faits, mal faits", que l’on serait des "cobayes". Mais s’ils ont pu être mis sur le marché rapidement, c’est aussi le résultat de grands progrès en biologie et en immunologie, accumulés depuis plus de 20 ans. Il n’aura fallu que quelques jours pour séquencer ce coronavirus alors que cela a pris presque deux ans pour le VIH par exemple. »

Se faire vacciner pour retrouver sa vie d’avant Covid

Parmi nos lecteurs, certains s’interrogent encore et n’ont pas fait leur choix. C’est le cas d’Émeline, 38 ans : « Je ne sais plus trop. Un jour, oui je veux me faire vacciner, dans l'élan collectif. Un autre, je me dis que ça ne sert à rien, car ça protège pour une courte période et on n'a pas encore de garantie que l'on ne sera plus porteur. Comme je n'y aurai pas accès avant un moment, je me laisse encore le temps de la réflexion ».

Dominique a elle aussi hésité. Cette retraitée qui vit à Toulouse se pose toujours des questions sur les effets secondaires des vaccins. Mais après réflexion, elle se dit prête à sauter le pas. « Je crois que c'est la seule solution pour sortir de cette boucle infernale confinement-déconfinement, dont on ne voit pas la fin. »

Retrouver « sa vie d’avant », c’est l’argument principal de la plupart de nos lecteurs favorables à la vaccination. À l’image d’Annick : « En l’absence de traitement efficace, la vaccination est la seule solution pour sortir de la pandémie ». Ou de Marie-Agnès : « Je me ferai vacciner, pour pouvoir recevoir mes petits-enfants, comme avant, j'ai l'impression d'être emprisonnée chez moi. » Un sentiment partagé par Charlotte : « C’est le seul moyen de retrouver une vie culturelle, sociale et économique et d’éviter des reconfinements en chaîne ».

Yvette estime quant à elle qu’il faut se faire vacciner « pour protéger les autres et se protéger soi-même et surtout pour permettre à l’économie de redémarrer. Car les jeunes ont besoin de travail ».

Par Angélique Pineau-Hamaguchi

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