Dénutrition : une semaine pour mieux connaître ce mal silencieux

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Par Patricia Guipponi

Temps de lecture estimé 5 minute(s)

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La dénutrition touche deux millions de Français et se manifeste dès que les besoins en énergie et en protéines de l’organisme ne sont pas couverts. Du 12 au 19 novembre, une semaine de sensibilisation est consacrée à cet état pathologique sous-estimé.

La perte de poids peut entraîner des effets néfastes sur la santé. La dénutrition en est la parfaite illustration. Elle survient lorsque les apports alimentaires quotidiens sont insuffisants pour couvrir les besoins nutritionnels de l’organisme.

« On est dénutri quand on perd 5 % de son poids en un mois ou 10 % en six mois. Et cela n’a rien à voir avec le fait que vous soyez mince ou obèse. Si vous pesez 100 kg et en perdez 5 en 30 jours, on considère que c’est de la dénutrition », témoigne le docteur Vincent Attalin, coordinateur médical de l’unité transversale de nutrition du CHU de Montpellier. « Quand on fait un régime, il faut surveiller que la perte de poids ne soit pas trop rapide. C’est pourquoi il est conseillé de se faire suivre par un professionnel de la nutrition. »

La dénutrition touche deux millions de Français. C’est un mal méconnu, alors qu’il a un impact majeur sur la qualité de vie de la personne qui en souffre et qu’il grève les coûts de santé. La première édition de la semaine de la dénutrition, qui a lieu du 12 au 19 novembre, entend informer le grand public des conséquences de cet état pathologique et, par ailleurs, rappeler aux soignants combien la vigilance s’impose.

Des ateliers d’éducation nutritionnelle

Cette semaine rentre dans le cadre du 4e Programme national nutrition santé. Elle est organisée par le Collectif de lutte contre la dénutrition, en partenariat avec le ministère de la Santé et la Mutualité Française.

Plus de 500 manifestations sont au programme. Dont des ateliers d’éducation nutritionnelle et de promotion d’activités physiques ou encore des cafés connaissances à destination des soignants pour mieux dépister, gérer la dénutrition des patients en activant, notamment, le suivi systématique de leur poids à chaque consultation ou hospitalisation.

« En tant qu’offreur de soins, acteur de la prévention, financeur et assureur complémentaire, nous sommes préoccupés par cette problématique qui peut fragiliser tout un chacun, avoir des conséquences sur le système immunitaire, le psychique, la mobilité… », indique Séverine Salgado, directrice santé à la Mutualité Française. « C’est à ce titre que nous appuyons ou engageons les opérations de sensibilisation sur le territoire français durant cette semaine. »

Peu de signes avant-coureurs

On parle de dénutrition exogène quand les apports énergétiques diminuent à la suite d’une baisse de la consommation alimentaire. De dénutrition endogène quand les apports ne parviennent plus à compenser les besoins énergétiques. Il s’agit, dans ce cas, d’une réaction immunitaire de l’organisme consécutive à une infection à la suite de maladies comme le cancer, Alzheimer ou encore la mucoviscidose...

La gravité de la dénutrition est liée à l’importance de la fonte musculaire. Or, celle-ci est difficilement mesurable. « La dénutrition est silencieuse. Elle ne présente que peu de signes avant-coureurs et alarmants. Pourtant, les outils pour la dépister sont simples. », observe le docteur Vincent Attalin. « C’est pour cela qu’il est primordial de surveiller son poids régulièrement, de le connaître et de comprendre qu’être dénutri peut avoir de lourdes conséquences. »

Le médecin nutritionniste précise que « chacun a des besoins nutritionnels différents ». Ils varient en fonction de l’âge, du sexe, de la taille, des activités pratiquées… « L’organisme d’un joueur de foot ne nécessitera pas les mêmes apports journaliers que celui d’une personne sédentaire ou d’un marcheur régulier. »

Le Covid-19 a amplifié le phénomène de dénutrition

La Haute Autorité de santé estime qu’en milieu hospitalier, un enfant sur dix et 20 à 40 % des adultes sont touchés par la dénutrition. Entre 20 et 40 % de résidents d’Ehpad en sont affectés. Et 5 et 10 % des plus de 65 ans, vivant à domicile, sont dénutris.

Cet état n’est pas seulement dû au vieillissement, bien qu’il soit observé principalement chez les personnes âgées dont l’appétit peut diminuer. « Le Covid-19, qui a précipité l’isolement social, le repli sur soi de certains aînés, a augmenté les risques du syndrome de glissement (1) et les troubles de la dénutrition », remarque Séverine Salgado.

Plus la dénutrition est repérée et traitée tôt, moins elle sera sévère. « La prise en charge consiste à augmenter les prises alimentaires, les enrichir de beurre, de fromage râpé… On peut aussi recourir à des compléments alimentaires ou, si cela n’est pas suffisant, à de la nutrition artificielle », ajoute le docteur Vincent Attalin. Et de conclure : « Il ne faut pas oublier de s’alimenter et surtout de privilégier la notion de plaisir quand on passe à table. »

L’importance de se peser régulièrement

Le docteur Vincent Attalin est l’initiateur de la journée Mon poids un indicateur de taille, qui consiste à rappeler l’importance de se peser et ainsi dépister une potentielle dénutrition. Cette opération a été adoptée par une vingtaine d’établissements de santé, publics et privés, lors de son lancement en 2018. « Cette année, plus de deux cents hôpitaux, cliniques ou encore Ehpad y participent », observe le nutritionniste du CHU de Montpellier. L’édition 2020 est naturellement intégrée aux manifestations de la première semaine de la dénutrition.

Pour de plus amples informations : www.luttecontreladenutrition.fr

Le programme des opérations reste soumis à la situation sanitaire lié au Covid-19. Il est de ce fait susceptible d’évoluer.

Des signes d’alerte

La vigilance des proches et aidants de personnes âgées s’impose face aux signes peu alarmants de la dénutrition. Cet état peut être visible lorsque :

  • le poids de la personne a diminué ;
  • son frigidaire est quasiment vide ou entasse des restes de nourriture ;
  • les trois repas par jour ne sont pas respectés et les assiettes pas terminées ;
  • la personne paraît amincie et flotte dans ses vêtements ;
  • la personne n’a plus le goût à rien et a tendance à s’isoler.

(1) Le syndrome de glissement se caractérise par un changement de comportement assez soudain chez une personne âgée, accompagné d’une perte d’autonomie.

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