Écrans et enfants : les conseils de Serge Tisseron

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Par Isabelle Blin

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© Lisa5201/Istockphotos, crédit portrait : Alexandre Marchi

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Pas toujours facile de gérer l’utilisation des écrans à la maison et pourtant c’est indispensable. Explications et conseils de Serge Tisseron, psychiatre spécialiste des questions sur les rapports entre le numérique, les images et nos enfants*.

Quelles sont les principales conséquences d’un abus d’écrans sur les jeunes enfants ?

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Serge Tisseron

Serge Tisseron : Plus ils passent de temps devant la télévision ou seuls devant des tablettes, et moins ils en ont pour des jeux créatifs, des activités interactives… Tous les domaines sont touchés : l’acquisition du langage, les capacités d’attention et de concentration (même si l’enfant est dans une pièce où la télévision est allumée sans qu’il ne la regarde) ; la perception de soi comme acteur du monde et pas seulement comme quelqu’un à qui il arrive des choses ; et enfin, les capacités d’empathie avec les autres, le partage, l’appréciation et le respect des autres.

En quoi les écrans sont-ils aussi une opportunité pour l’enfant en âge scolaire ?

S. T. : Ils sont une formidable source d’information sur tous les sujets. Et ils permettent de travailler à plusieurs même si on ne peut pas se déplacer (si l’enfant est hospitalisé par exemple). Ils proposent aussi beaucoup d’outils de création gratuits, comme Scratch pour s’initier à la programmation dès 8 ans, ou des logiciels de Stop Movie pour faire du cinéma image par image.

Peut-on devenir « addict » aux écrans ?

S. T. : Le mot addiction implique l’existence d’un sevrage physiologique et d’un fort risque de rechute. Or il n’y a ni l’un ni l’autre dans le cas des abus d’écrans. En revanche, des adolescents peuvent s’enfermer dans un monde virtuel, mais ce n’est que le symptôme d’une maladie sous-jacente (dépression…). Les parents doivent s’inquiéter si leur enfant joue seul et se coupe de ses copains, de son entourage.

Quelle durée quotidienne devant les écrans vous semble acceptable, en fonction des âges ?

S. T. : Avant 3 ans, toujours en usage accompagné, sur des périodes courtes, et en complément des jeux traditionnels. Entre 3 et 6 ans, de 15 à 30 minutes, puis augmenter progressivement pour arriver à 2 heures maximum d’écrans distractifs par jour à 13 ans. Mais ce qu’on fait avec est tout aussi important que le temps qu’on y passe !

Comment apprendre concrètement aux jeunes à s’auto-réguler ?

S. T. : Cet apprentissage commence dès la naissance, en élevant l’enfant dans des rythmes réguliers : lever, coucher, tétée à heure fixe… Puis, dès 3 ans, il est important de toujours associer les écrans à une durée. Dire à l’enfant qui réclame la tablette ou la télé à quelle heure il y aura droit, et pour quelle durée. Si un parent prépare un saladier de crème au chocolat, il ne le met pas devant son bébé en le laissant se servir. Il dit à l’enfant qu’il faut attendre l’heure du repas et, à ce moment-là, il place une assiette devant l’enfant et lui donne une portion. Il faut faire la même chose avec les écrans : on les consomme à certaines heures fixées d’avance, de préférence les mêmes chaque jour, et chacun a droit à une « portion » – c’est-à-dire à une durée – différente selon son âge. Quand il y a plusieurs enfants, on utilise toutes les pièces de la maison et tous les écrans disponibles (télé, ordinateur fixe ou portable, tablette) pour que chacun ait son écran et sa portion adaptés à son âge.

* Auteur de 3-6-9-12, apprivoiser les écrans et grandir, aux éditions éres.

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