Le docteur Marc Perrussel est dermatologue à Auray (56) et praticien au sein de l’hôpital Pontchaillou du CHU de Rennes. Il est vice-président du syndicat national des dermatologues-vénéréologues.
Marc Perrussel : L’eczéma est ce qu’on appelle une dermatite atopique, c’est-à-dire une affection de la peau sur un individu ayant un terrain allergique. L’eczéma est une pathologie très fréquente chez les enfants, 25 % d’entre eux en présentent en effet des manifestations.
Elle peut prendre plusieurs formes, la plus classique étant celle du nourrisson. Elle apparaît à partir de trois mois. Le bébé a en général les joues très rouges, que les parents confondent souvent avec une poussée dentaire. L’autre forme se manifeste plutôt vers deux ans au niveau des plis : les coudes, les genoux, les oreilles, le pouce que l’enfant tête… Les deux formes évoluent par poussées et disparaissent la plupart du temps au fil des années, au plus tard vers l’âge de 18 ans.
M.P. : L’eczéma est toujours génétique ! C’est même, par définition, une anomalie génétique de la barrière cutanée.
En cas d’eczéma, la peau réagit à une substance extérieure, comme pour se renouveler et évacuer le contact. C’est une forme de défense, comme en cas d’allergie. Il faut alors soigner l’enfant car la peau peut peler, cloquer, démanger et un mal-être peut apparaître. L’eczéma peut également atténuer la qualité de la peau et favoriser des surinfections sévères, de type impétigo.
M.P. : La base du traitement est l’hydratation quotidienne de la peau de l’enfant, avec des produits adaptés. Vendus en parapharmacie, ils ne contiennent pas de parfum, ni de substance allergisante. Mais en cas de phase aiguë, il faut impérativement utiliser des crèmes dites dermocorticoïdes, c’est-à-dire contenant de la cortisone. Beaucoup de parents en ont peur, et c’est dommage car c’est LE traitement de la phase aiguë de l’eczéma.
Il faut bien expliquer aux parents inquiets que ces crèmes sont parfois nécessaires pour éviter les complications. Il faut alors les utiliser en quantité pour calmer l’inflammation et sur un temps suffisamment long. Les problèmes avec l’usage des dermocorticoïdes arrivent seulement quand on en met trop peu ou de façon inadaptée.
Les parents peuvent, dès les premiers signes, consulter un dermatologue afin d’avoir son avis d’expert, après avoir vu au préalable leur généraliste dans le cadre du parcours de soins. C’est vraiment là le rôle du dermatologue d’expliquer ce qu’il faut faire et comment le faire.
M.P. : La première précaution à prendre est de connaître la dureté de l’eau du lieu où l’on habite. Si l’eau est très calcaire, elle peut dessécher la peau et accentuer le problème. On peut alors installer des filtres sur les arrivées d’eau par exemple. Les parents peuvent également ajouter de l’amidon de blé dans l’eau du bain de l’enfant, à hauteur d’une à deux poignées par bain. C’est une ancienne astuce qui fonctionne très bien, et qui permet de reconstituer la peau.
Pour le lavage au quotidien, privilégier des huiles nettoyantes est une bonne solution. Elles permettent de laisser un film protecteur sur la peau, sur lequel on pourra ajouter une crème hydratante. Mais en cas de phase aiguë, le lavage devra se faire à l’aide de crèmes dermocorticoïdes.
M.P. : Ne pas habiller ses enfants avec des vêtements trop près du corps, et privilégier le coton. Les matières synthétiques peuvent en effet augmenter les démangeaisons et l’irritation.
Ne pas protéger de manière trop excessive ses enfants du soleil. Il ne faut pas les exposer, certes, mais il ne faut pas non plus les en priver totalement. Les UV ont en effet un rôle anti-inflammatoire intéressant sur l’eczéma.
M.P. : Moins d’1 % des enfants continuent à souffrir d’eczéma à l’âge adulte. Et souvent car ils ont été mal pris en charge. Il faut comprendre que c’est une maladie évolutive : le terrain de l’individu se désensibilise au fil du temps et la pathologie se transforme, souvent en rhume des foins. Néanmoins, l’eczéma est une maladie inflammatoire et chronique : même si les symptômes ont disparu, l’adulte en ayant souffert enfant devra toujours faire attention à sa peau.