Endométriose : un livre pour raconter une maladie trop méconnue

Publié le

Par Pauline Hervé

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© Alex Puech Kiwi Goji

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Avec « Des Barbelés dans mon corps », Virginie Durant, 38 ans, raconte le calvaire enduré depuis le début de son adolescence. De diagnostics erronés en réactions d’incompréhension, elle aura mis plus de 25 ans à découvrir qu’elle souffre en réalité, comme une femme sur dix, d’endométriose.

Des « barbelés dans mon corps » : c’est ainsi que Virginie Durant décrit les douleurs intenses à l’abdomen qui la broient depuis l’âge de 12 ans. C’est aussi le titre du livre dans lequel elle témoigne de son parcours d’errance médicale et de souffrance, en raison d’une maladie encore trop méconnue : l’endométriose.

Les premiers symptômes apparaissent avec ses premières règles « Mon sang s’écoule dans la douleur dite de la norme. Pourtant, mes lombaires me brûlent. Des éclairs névralgiques foudroient mon bas-ventre qui, au fil des jours, s’alourdit et semble abriter un ballon de handball. Au réveil, j’éprouve de grandes difficultés à quitter mon lit », écrit-elle.

Maladie de la paroi de l’utérus

L’endométriose, « plus d’une femme sur dix en souffre et l’ignore », précise le sous-titre du récit de Virginie Durant. Il s’agit d’une maladie de l’endomètre, la paroi de l’utérus, dont les tissus, « migrant à l’extérieur de l’utérus, pouvant ainsi tapisser tous les organes sous formes de nodules(…). Certains nodules, de la taille d’une tête d’épingle, sont à peine visibles à l’œil nu, ni même mis en lumière par une IRM, et peuvent néanmoins se révéler extrêmement douloureux », décrit la femme de 38 ans qui n’a été diagnostiquée qu’il y a moins de dix ans.

Comme le raconte Virginie Durant, les femmes qui en souffrent se heurtent à deux obstacles. D’abord, l’idée communément répandue « qu’il est normal d’avoir mal durant ses règles » qui retarde la demande d’une prise en charge médicale, mais aussi un manque de connaissance – voire une ignorance teintée de mépris pour la parole des patientes – de la part de certains médecins, selon Virginie Durant.

Sept ans pour un diagnostic

L’endométriose est sous-diagnostiquée, et quand elle l’est, c’est trop tardivement. « Sept ans en moyenne », précise l’association Endofrance, qui se bat pour une meilleure connaissance de cette maladie. Outre les douleurs chroniques et invalidantes qu’elle engendre, celle-ci peut créer des problèmes d’infertilité : c’est le cas pour 40 % des femmes qui en souffrent.

Sans oublier les souffrances psychologiques liées au manque de diagnostic, à l’incompréhension du corps médical et parfois des proches, et à la baisse d’estime de soi que l’endométriose engendre. Virginie Durant raconte comment elle en est venue très tôt à haïr son ventre rond, qui lui valut des moqueries durant l’adolescence. « C’est ainsi que je le vois, avec trop de gras… Mais comment pourrais-je soupçonner que l’aspect de ma silhouette est étroitement lié au processus de mes hormones ? »

Parcours d’errance médicale

Virginie Durant a vécu vingt-deux ans d’errance, de médecin en médecin, en passant par des magnétiseurs, des naturopathes, et autant de diagnostics erronés sur l’origine de ses douleurs abdominales étendues à tout le corps : tour à tour une prétendue appendicite qu’on lui opère, « sûrement le sida (sic) » selon un gynécologue maltraitant, une grossesse, une déchirure musculaire, une fausse couche…

C’est ce que connaissent beaucoup de femmes atteintes d’endométriose. Le Collège national des gynécologues et obstétriciens de France (CNGOF), soutenu par l’association Endofrance, a officiellement demandé en 2018 au ministère de la Santé de créer des centres experts régionaux de cette maladie. Ces centres pluridisciplinaires, qui existent déjà en Angleterre, permettraient de « mettre fin à l’errance diagnostique et thérapeutique des femmes qui en souffrent » explique le docteur François Golfier, qui préside la commission Endométriose au CNGOF. Leur demande a été rejetée. Le docteur Golfier souligne également l’importance d’une formation des praticiens. L’endométriose n’est à ce jour toujours pas au programme de l’examen de médecine.

Suivi médical à vie

L’endométriose n’a pas de traitement – un suivi médical à vie est nécessaire. Et généralement, la prise de la pilule en continu ou la pose d’un stérilet pour empêcher les règles est la seule option. Mais il est crucial de poser un diagnostic tôt, pour éviter l’évolution de la maladie jusqu’à un stade sévère, comme ce fut le cas pour Virginie Durant, quand un chirurgien a enfin mis un nom sur ses souffrances après l’avoir opérée de nombreux kystes et nodules qui menaçaient ses organes abdominaux.

Bien que ses souffrances physiques soient loin d’être encore éliminées, celle-ci éprouve alors un soulagement intense. « Je n’étais pas folle ! Je ne suis pas folle ! Une maladie était bien à l’origine de mes douleurs. Je suis en train de me réveiller d’années de lutte durant lesquelles la surdité médicale m’a armée contre moi-même. Même si je suis à l’hôpital et qu’une maladie grave vient de m’être diagnostiquée, j’ai envie de danser. »

Aujourd’hui, avec son témoignage, Virginie souhaite informer un maximum de femmes pour mettre fin à la double peine de l’endométriose : souffrance physique et ignorance du diagnostic.

En savoir plus :

« Des barbelés dans mon corps », Virginie Durant, Ed. du Rocher, février 2019.

Association Endofrance : Cette association a pour but de « faire sortir la maladie de l’ombre » et propose une information complète sur l’endométriose. Elle lutte aussi pour la création de centres médicaux experts en France.

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