Le sport en entreprise : artifices ou réels bénéfices ?

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Par Victoire N’Sondé

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Moins de stress et de fatigue côté salariés, une réduction de l’absentéisme et des gains de productivité pour l’employeur… une table ronde « Bouger en entreprise » organisée en marge du semi-marathon de Paris, en présence notamment du champion olympique Stéphane Diagana, a permis de faire le point sur les bénéfices qu’amène la mise en place de programmes de sport en entreprise.

A l’occasion de la 31ème édition de l’Harmonie Mutuelle Semi de Paris qui a vu quelques 46 000 coureurs s’élancer dans les rues de la capitale, une table ronde s’est tenue à la grande Halle de la Villette, à l’initiative d’Harmonie Mutuelle et d'Amaury Sport Organisation (ASO). Cette rencontre, consacrée au sport en entreprise, avait pour objectif de faire le point sur, d’une part, les besoins et attentes des salariés et, d’autre part, les enjeux et éventuels freins chez les employeurs. Un invité de marque, l’ancien athlète et champion olympique Stéphane Diagana, désormais ambassadeur Harmonie Mutuelle du sport en entreprise, comptait parmi les intervenants.

Un nombre non négligeable de salariés fatigués au travail

La table ronde s’est ouverte sur la présentation des résultats du premier Baromètre du sport en entreprise que viennent de publier Harmonie Mutuelle et ASO (1). « Cela permet de disposer d’une photographie du sport dans l’entreprise à un instant T alors que nous sortons d’une crise sanitaire importante qui a affecté tout le monde, en particulier les salariés, et qui a chamboulé le monde de l’entreprise. Nous allons suivre ce baromètre dans la durée et voir sa progression afin d’aider les entreprises à mettre en place des outils pour assurer le développement du sport en entreprise », explique Florent Garrigoux, directeur commercial et partenariats adjoint chez ASO.
En cette période post-covid, ce baromètre confirme la santé mentale et physique fragile d’un certain nombre de salariés en France. Ainsi 25% des salariés interrogés se sentent fatigués. Un chiffre qui monte à 54% chez les femmes et dans les entreprises de plus de 250 salariés ou plus.

Le télétravail, facteur de stress

Signe des temps, l’enquête mesure également l’impact du télétravail sur la santé. 51% des salariés interrogés qui télétravaillent se disent stressés (contre 25% s'ils ne font pas de télétravail).

Pourtant, le télétravail peut être mis à profit pour le bien-être des salariés, juge Frédéric Delannoy, directeur technique national de la Fédération française du sport d’entreprise (FFSE) : « Des entreprises utilisent par exemple l’espace libéré par le télétravail pour créer un lieu consacré à l’activité physique, afin d’améliorer le bien-être et de permettre une sociabilité quand on est de retour dans l’entreprise ». Jérôme Decrion, directeur prévention chez Harmonie Mutuelle, abonde dans son sens : « l’activité physique sur le lieu de travail contribue à aligner vie personnelle et professionnelle ».
Le baromètre suggère d’ailleurs le rôle bénéfique que peut jouer l’activité physique dans le cadre professionnel. Ainsi, la fatigue exprimée par les salariés concerne en majorité (55% exactement) ceux qui ne pratiquent pas de sport. De plus, 91% des personnes interrogées pensent que le sport favorise leur bien-être.

La sédentarité et l’inactivité physique en augmentation

Le défi à relever pour les entreprises est majeur en matière de santé, insiste Stéphane Diagana. « Il y a bien deux enjeux distincts pour les entreprises : réduire la sédentarité et augmenter l’activité physique des salariés. La sédentarité est quelque chose de normal. Elle correspond au temps d’éveil caractérisé par une dépense énergétique au repos. Mais au-delà de 7 heures de sédentarité, on augmente différents risques pour la santé. Quand on cumule le temps assis pour les repas, le temps de travail, le temps de transport…, on est largement au-delà de 7 à 10 heures de sédentarité. Concernant l’activité physique, on est souvent bien en dessous des recommandations officielles (2). Il faut savoir qu’en 200 ans, notre niveau d’activité physique a été divisé par 8 alors que nous sommes faits et régulés pour le mouvement ».

Une meilleure santé, moins d’absentéisme et des gains de productivité

Côté dirigeants, quel intérêt de promouvoir l’activité physique des salariés alors que ce n’est pas la vocation première de l’entreprise ? « Une entreprise ne peut pas fonctionner sans des salariés présents, en bonne santé et engagés, répond Virginie Malnoy, directrice Nouveaux Modèles chez Harmonie Mutuelle. Un salarié qui pratique une activité sportive se sent moins fatigué. Pour l’entreprise, c’est moins d’absentéisme, un gain de productivité et donc un bénéfice économique. Et au-delà de cela, pratiquer une activité sportive en collectif, avec ses collègues, ça apaise les relations sociales et ça permet un travail collectif bien plus positif ! ».

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Extrait du Baromètre 2023 du sport en entreprise

Diagramme sur la moitié des salariés qui souhaitent pouvoir faire du sport sur leur lieu de travail

Pour rassurer les dirigeants encore frileux à l’idée de mettre en place une offre d’activité physique au sein de leurs structures, Florent Garrigoux d’ASO rappelle que dans le Baromètre 2023 « 78% des salariés se disent prêts à pratiquer du sport en entreprise, organisé par leur employeur. Mais ils ne demandent pas à faire du sport au travail. Ils veulent bénéficier de dispositifs pour pratiquer pendant leur temps de loisirs ».

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Extrait du Baromètre 2023 sport en entreprise

Diagramme Proposer des offres sports, de nombreux bénéfices pour les entreprises …

Pour limiter le coût pour l’entreprise, il faut savoir que des aides peuvent être mobilisées. « Au niveau des branches professionnelles, avec les partenaires sociaux, il est possible de financer le sport en entreprise dans le cadre des actions de prévention rattachées aux fonds de solidarité », indique Virginie Malnoy. De plus, désormais, le financement par l’employeur de prestations d’activité physique et sportives, est, dans certaines conditions, exonéré de cotisations et de contributions sociales par l’Urssaf, explique Stéphane Diagana. « Cela diminue le coût des services offerts aux salariés ».

Associer dirigeants, salariés et médecine du travail

En pratique, pour favoriser le bien-être et limiter le stress de leurs salariés, les entreprises peuvent aussi s’appuyer sur des outils digitaux, à l’image des applications développées par la start-up Sport Heroes. Au menu : des programmes personnalisés pour mesurer son niveau de stress, des challenges pour favoriser la cohésion des équipes ou encore la possibilité de se rapprocher de collègues qui partagent les mêmes passions...

« La recette magique consiste à mettre en place des choses simples, accessibles à tous et qui puissent créer de nouvelles habitudes, tout en ayant en tête le fait que les profils sont divers en entreprise. Une minorité de la population d’une entreprise est représentée par des experts qui n'ont quasiment pas besoin de l’entreprise pour se mettre en mouvement. Mais la majorité, environ 70%, sont des aspirants au bien-être qui vont avoir besoin de l’entreprise pour mettre en place une nouvelle routine et, pour eux, le collectif est une force pour ancrer ces nouvelles habitudes dans leur quotidien » insiste Elsa Feugueur, directrice commerciale de la start-up.

Enfin, pour garantir le succès d’une offre d’activité physique en entreprise, Frédéric Delannoy de la FFSE plaide pour une « co-construction » entre dirigeants et salariés. « Nous sommes le plus souvent sollicités par la direction. Mais notre première recommandation consiste à associer les collaborateurs pour que le sport en entreprise ne soit pas quelque chose de descendant ». La médecine du travail doit également être partie prenante. « Malheureusement, elle manque de moyens et ses effectifs sont en baisse », déplore-t-il.

(1) Méthodologie du baromètre : L’étude a été réalisée en ligne, sur la base d’un questionnaire auto-administré, auprès d’un échantillon de 1 001 salariés, travaillant dans des entreprises de 50 salariés ou plus, dans le secteur privé. Cet échantillon a été constitué d’après la méthode des quotas sur la base des critères suivants : sexe, âge, profession, taille d’établissement, secteur, UDA 5 (découpage du territoire métropolitain français en 5 régions).

(2) 30 minutes d’activité physique par jour, 5 fois par semaine, correspondant à une marche rapide à 5-6 Km/h ou tout équivalent, précise Stéphane Diagana.

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