Les surdoués : pas plus nombreux mais mieux identifiés

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Par Nathania Cahen

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On pourrait s’imaginer que les cours de récréation en sont remplies vu le nombre de parents qui devisent ou s’inquiètent au sujet de leur enfant à haut potentiel intellectuel (HPI) ou très haut potentiel, encore appelé surdoué ou précoce. Pourtant, la proportion de 2,3% de la population n’a pas bougé.

La psychothérapeute Jeanne Siaud-Facchin les a surnommés les « zèbres », terme qui s’est imposé à elle en 2002 et qu'elle évoque dans son livre, « L'enfant surdoué». « Parce que ces enfants sont de drôles de zèbres et me font penser à cet animal dont le pelage rayé est toujours unique et crée un effet stroboscopique lorsqu’il court. Un animal qui a besoin de la compagnie de son troupeau car il n’aime pas vivre seul ».

En dépit des apparences, le nombre d’enfants à haut potentiel intellectuel (HPI) ou très haut potentiel reste constant à 2,3% de la population, tous milieux confondus. Ce qui a changé, c’est un repérage plus important car aujourd’hui parents et enseignants consultent beaucoup plus facilement les psychologues que la génération précédente. « Pas forcément pour les bonnes raisons. Ils ont tendance à penser qu’être un bon parent, c’est être le parent d’un enfant qui réussit à l’école. Soumis à cette pression, ils s’inquiètent beaucoup plus vite pour un mauvais bulletin que pour un manque d’appétit ou d’entrain ».

Le dernier ouvrage de la psychothérapeute Jeanne Siaud-Facchin, « S’il te plaît, aide-moi à vivre », est paru en 2018 aux éditions Odile Jacob.

Elle y a également publié « L’enfant surdoué » et dispose d’un site Internet.

Des profils hypersensibles

Être doté d’un haut ou très haut potentiel ne rime pas forcément avec être premier de la classe, loin s’en faut. Si la puissance intellectuelle et la capacité d’analyse sont supérieures à la moyenne en raison d’une hyperconnectivité des deux hémisphères du cerveau, cela se double souvent d’une hypersensibilité et d’une porosité au monde importante avec des enfants ou des ados facilement blessés ou en colère, en désaccord et déterminés à interagir ou argumenter avec les adultes, et notamment les enseignants.

« Ils supportent mal le carcan qui veut que tout soit appris d’une certaine façon et à un certain rythme. Et le fait de ne pouvoir exercer leur intelligence de façon naturelle peut amener certains à s’étioler, à se désinvestir de l’école ou à se montrer très dissipés. Les autres y verront quelqu’un qui veut se rendre intéressant et jouer les bolosses », décrypte Jeanne Siaud-Facchin, pointant des « alchimies complexes ».

Consulter dès lors qu’on s’interroge

Quand consulter ? Dès lors qu’on se pose la question. Mais aussi quand la fratrie compte déjà un haut potentiel, quand les comportements sont singuliers, qu’il a fallu du temps pour détecter une dyslexie ou une dyspraxie (compensées ou camouflées par l’intelligence). Alors le bilan s’impose, à titre préventif, pour comprendre et décoder les difficultés avant de se lancer sur une fausse piste. « Un test de QI ne suffit pas, il faut une exploration de l’intelligence de l’enfant et de son territoire par un psychologue habitué à travailler avec cette population, qui saura accompagner parents et enfants », conseille Jeanne Siaud-Facchin.

Reste que certains ne seront jamais détectés et suivront des parcours académiques sans histoire, en raison d’une personnalité bien structurée. Pour les autres, il est important d’éviter que cette intelligence ne devienne un handicap plutôt qu’un potentiel. Dans cette optique, la psychologue avait imaginé en 2003 Cogito’Z, un centre de diagnostic et de prise en charge des troubles des apprentissages scolaires. On en compte aujourd’hui huit en France (Paris, Marseille, Lyon, Avignon, Nantes, Reims et Sophia Antipolis), et deux autres à Londres et Genève.

Zébra, un refuge unique en France

Trop de potentiel débouche parfois sur une prise en charge médicalisée en cas de dépression ou de troubles de l’attention. C’est pour ces cas extrêmes et pour les plus fragiles qu’en 2011, Jeanne Siaud-Facchin a créé à Marseille (où elle a longtemps exercé) le centre Zébra. « Pour accueillir les jeunes qui se trouvaient en marge de leur vie, exclus de l’établissement scolaire, médicalisés de façon outrancière, avec des parents dépassés. Ce n’est ni une école, même si des enseignants interviennent, ni un centre de soins, mais un lieu pensé comme une station de gonflage ».

Zébra qui accueille de 80 à 100 jeunes par an, n’a pas encore été cloné ailleurs, même si Un zèbre à Vitré (Bretagne) propose un accompagnement assez proche. C’est regrettable car il existe un réel besoin.

Pour aider les parents un peu désemparés, Jeanne Siaud-Facchin suggère deux lectures : « 100 idées pour accompagner les enfants à haut potentiel », ouvrage collectif paru chez Tom Pousse, et « Les enfants surdoués ou la précocité embarrassante », par Jean-Charles Terrassier, fondateur en 1971 de la première école dédiée aux enfants intellectuellement précoces.

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