Pourquoi les muscles sont-ils essentiels à notre santé ?

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Par Patricia Guipponi

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La première Semaine du muscle, lancée par l’AFM-Téléthon et l’Institut de myologie, s'est tenue du 1er au 7 juin 2023. Cet organe, qui compose l’organisme humain et lui permet de vivre, est trop peu connu du grand public. Quel est son rôle ?

Lorsque l’on évoque les muscles, on pense souvent aux biceps, partie du bras située entre l’épaule et le coude. S’impose alors l’image d’une personne bodybuildée, ce qui est réducteur pour définir ces organes essentiels pour vivre. En effet, les muscles ne se résument pas aux seuls pectoraux et autres abdominaux. Ils se comptent par centaines, sont de différents types et ont leurs caractéristiques. Leur point commun est qu’ils ont la capacité de se contracter.
« Les muscles représentent 40 à 45 % de la masse de notre organisme. On en a plus de 600 et ils permettent de marcher, de respirer, de parler, de voir, d’entendre… », commente Serge Braun, directeur scientifique de l’AFM-Téléthon qui a lancé, avec l’institut de myologie, centre d’expertise sur le muscle, une semaine de sensibilisation à ces précieux organes, enjeux de santé publique. Cette Semaine du muscle s'est tenue du 1er au 7 juin 2023.

Le muscle, un sujet infini

Le corps humain comprend divers groupes de muscles. Les muscles blancs ou lisses sont présents dans la paroi d’organes comme l’intestin, les bronches, l’utérus ou encore les vaisseaux sanguins, dont ils assurent les mouvements. Puis, vient le muscle cardiaque, autrement dit le cœur, qui se caractérise par ses contractions régulières et spontanées pour propulser le sang dans tout l'organisme et assurer ainsi l'alimentation en oxygène du corps.
Enfin, les muscles squelettiques, fixés aux os par les tendons, activent la mécanique du corps. Le cerveau leur ordonne de bouger. Cet ordre va être transmis par la moelle épinière jusqu’aux nerfs qui vont donner le signal aux muscles. Ces derniers se contractent alors et propulsent le mouvement. Le plus petit muscle, le stapédien, est situé dans l’oreille. Le plus volumineux est le grand glutéal ou grand fessier. « Et nous ne connaissons pas encore tous les muscles. Récemment, nous en avons découvert un dans la mâchoire* », observe Serge Braun, directeur scientifique de l’AFM-Téléthon.

Dès 30 ans, notre masse musculaire perd entre 4 et 5 % tous les 10 ans

Les muscles sont essentiels car ils permettent, tout comme le foie, de stocker des réserves d’énergies comme le sucre. Ce sont par ailleurs de fins régulateurs. Par exemple, ils maintiennent notre température corporelle à 37 degrés pour le bon fonctionnement de notre métabolisme. Par ailleurs, les muscles régulent le taux de cholestérol, dont ils sont les plus gros consommateurs, contenu dans le sang. L’exercice musculaire conforte cette régulation. « Il va aussi bénéficier au cerveau. Lorsque l’on se dépense, que l’on active ses muscles, les fonctions cognitives n’en sont que meilleures et l’évolution de maladies neurodégénératives peut-être freinée », poursuit Serge Braun.
Quand nous sourions, dix-sept muscles squelettiques sont sollicités. « Moins que lorsque nous pleurons où une quarantaine d’entre eux entrent en jeu. Les muscles de la face offrent une palette de 10 000 expressions », souligne le directeur scientifique de l’AFM-Téléthon. Ces contractions se font de façon naturelle et coordonnée. Pourtant, il faut un certain temps pour que cette mécanique bien huilée se mette en place. « Tout commence au stade de fœtus et se poursuit tout au long de la construction de l’être humain ».
Nous naissons avec une quantité de muscles représentant entre 20 et 25 % de la masse de notre organisme, bien que nous ne soyons pas tous égaux en l’espèce. « Il y a des variations d’une personne à l’autre liées au capital génétique ». Cette masse va croître au fur et à mesure de notre développement. Puis, diminuer à partir de 30 ans. « Tous les dix ans, nous en perdons entre 4 et 5 %. De ce fait, à 70 ans, la masse musculaire peut avoir diminué de moitié ».

Des maladies musculaires souvent mortelles et sans traitement

Lorsque l’on perd en masse musculaire, notre adaptation et notre résistance à l’environnement sont impactées. Ainsi, les personnes âgées ont moins d’énergie et de fonctions régulatrices efficaces avec la perte de leurs muscles. « Le déficit musculaire précipite la mort dans bien des circonstances. Par exemple, on ne meurt pas nécessairement du cancer mais de la fonte musculaire engendrée par le cancer et éventuellement par les traitements lourds », observe Serge Braun.
Il existe des centaines de maladies associées aux dysfonctionnements musculaires. « La première est la sarcopénie. Elle survient quand la perte de masse musculaire liée à l’âge est trop importante. On ne sait pas empêcher ce phénomène ». D’autres maladies des muscles, ou myopathies, sont aussi sans solution mais des thérapies géniques donnent l’espoir qu’il en soit autrement. « La plus connue est la myopathie de Duchenne, maladie génétique et mortelle qui touche uniquement les garçons et concerne une naissance sur 5 000 ». Les fibres musculaires résistent en principe aux contractions grâce à un réseau sophistiqué de protéines. « Dans la myopathie de Duchenne, ces dernières sont altérées ou absentes. Les cellules fragilisées cassent, ce qui aboutit à la perte progressive de la masse musculaire ».
Certaines myopathies conduisent au décès du patient avant l’âge de deux ans. D’autres entre 20 et 40 ans. « D’autres encore ne seront pas mortelles mais vont s’avérer très invalidantes jusqu’à nécessiter l’usage du fauteuil roulant ». Selon la maladie, des muscles peuvent être touchés et d’autres épargnés. « On le voit avec les myopathies qui affectent les muscles respiratoires comme le diaphragme et les muscles intercostaux qui ouvrent et ferment les poumons. Certains patients ont besoin d’une assistance respiratoire 24 heures sur 24 ».

Beaucoup de maladies musculaires touchent les plus jeunes

En France, plus de 100 000 personnes sont concernées par les myopathies. Beaucoup d’entre elles touchent les enfants. D’autres peuvent apparaître plus tardivement, après 50 ou 60 ans. « C’est pour cela qu’il est important de sensibiliser le grand public aux muscles, à leurs fonctions vitales et aux pathologies attenantes pour faire en sorte que la recherche soit soutenue et avance », rappelle Serge Braun.
Des muscles sains, entretenus par une activité physique quotidienne, préviennent l’obésité, retardent le vieillissement et le développement des maladies neurodégénératives (Alzheimer, Parkinson, etc.), les récidives de cancers, les troubles musculosquelettiques, les problèmes articulaires. Entre autres.
Il n’y a pas une seule discipline médicale qui ne soit pas impliquée par le fonctionnement des muscles. La cardiologie, la pneumologie, l’ophtalmologie, l’oncologie et tant d’autres sont concernées. « Et pourtant, conclut le directeur scientifique de l’AFM-Téléthon, la myologie, l’étude scientifique et médicale qui s’en réfère, reste une sous-discipline de la neurologie. Elle est encore trop peu reconnue et enseignée ».

*On doit cette découverte à des chercheurs de l’Université de Bâle en Suisse. Ce muscle, appelé le masséter coronoïde, est essentiel à la mastication.

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