Pas d’écrans pour les enfants de moins de 2 ans

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Par Nathania Cahen

Temps de lecture estimé 4 minute(s)

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L’exposition aux écrans perturbe le développement moteur et intellectuel de nombreux très jeunes enfants. Dans « Les tout-petits face aux écrans »*, le Dr Anne-Lise Ducanda dresse un état des lieux de ce « fléau de santé publique » et détaille pourquoi les écrans sont vraiment nocifs pour les jeunes enfants.

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Le Dr Anne-Lise Ducanda est l’auteur de « Les tout-petits face aux écrans »*. Crédit photo : DR.

C’est avec les années 2000 et l’explosion des tablettes, téléphones mobiles et écrans en tout genre qu’un constat s’impose progressivement au Dr Anne-Lise Ducanda, médecin pour la protection maternelle et infantile (PMI). Lors de ses consultations, elle reçoit de plus en plus d’enfants en difficulté. Retard du langage, agitation, difficultés de communication, intolérance à la frustration, maladresse… sont quelques-uns de leurs symptômes communs. De fait, 95 % d’entre eux sont surexposés aux écrans.

« Chez ces enfants, on constate un retard global de développement, pointe la médecin. Ils ont des retards intellectuels – ils peuvent ne pas comprendre une consigne simple comme Va chercher tes chaussures, avoir du mal à tenir un crayon, et être incapables de se concentrer plus de 30 secondes sur une activité. Idem pour la motricité avec des difficultés à courir, grimper, parfois même marcher ».

Les écrans sont « toxiques » pour le cerveau des tout-petits

S’ajoutent de plus en plus souvent au tableau des troubles graves de la communication et des relations. « Ces enfants vivent isolés dans leur bulle », s’inquiète Anne-Lise Ducanda. Les parents n’en ont pas toujours conscience et ne connaissent pas forcément les stades du développement de l’enfant. Bien souvent, ce sont donc les enseignants ou le personnel des crèches qui signalent les problèmes.

Elle va plus loin dans sa mise en garde. « Les écrans sont toxiques pour le cerveau des tout-petits. C’est comme si les shoots visuels et sonores créaient de mauvaises connexions cérébrales, au détriment d’autres, essentielles. Un cerveau saturé élimine les connexions les moins utilisées, donc peut éliminer les connexions cérébrales essentielles ». Le jeune enfant apprend en évoluant dans le monde réel en trois dimensions avec l’attention et l’affection de ses parents mais pas avec un écran.

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Une surexposition aux écrans peut avoir de graves conséquences sur le développement du cerveau d’un jeune enfant. Crédit photo : Getty Images.

Un seul remède : plus d’écrans et de nouvelles habitudes

La bonne nouvelle, c’est qu’aucun de ces troubles n’est irréversible. Y remédier passe par l’éducation de parents qui pensent parfois que la tablette est un objet très éducatif ou qui admirent la dextérité de leur progéniture avec le téléphone. « Cela relève du sevrage, ce n’est pas toujours facile mais au bout de dix jours, l’agressivité diminue déjà », souligne le médecin.

La moins bonne, c’est que ce phénomène étant relativement récent, certains médecins peuvent soupçonner un trouble de l’autisme ou de l’hyperactivité et s’orienter vers un mauvais diagnostic. « En cas de doute, il faut tenter un sevrage pendant 3 mois pour vérifier si le comportement est impacté », préconise Anne-Lise Ducanda.

Une campagne de prévention massive contre la surexposition aux écrans

En 2017, cette lanceuse d’alerte a tourné une vidéo de mise en garde contre les effets des écrans sur les jeunes enfants. Une vidéo qui a fait le buzz et déjà enregistré plus de 400 000 vues. Malgré tout, à ce jour, aucun plan national de prévention ou de lutte contre la surexposition aux écrans n’a été élaboré. « Il faut une campagne de prévention massive, enjoint-elle. De même envergure que pour les gestes barrières contre le Covid-19 ou les 5 fruits et légumes par jour ! »

Le Dr Anne-Lise Ducanda souligne encore l’importance de former tous les personnels travaillant au contact des tout-petits, des soignants aux assistantes sociales en passant par les structures d’accueil. Et d’apposer une mise en garde sur tous les écrans neufs.
L’ouvrage s’ouvre sur cette phrase : « Quand un écran s’allume, un enfant s’éteint » et se termine sur cette autre : « Quand un écran s’éteint, un enfant s’éveille ».

*« Les tout-petits face aux écrans », Dr Anne-Lise Ducanda (éditions du Rocher, août 2021). Un ouvrage illustré et entrecoupé de nombreux témoignages (courriers de parents et de professionnels), de tests, de conseils, d’exemples de jouets à éviter…

Le Collectif surexposition écrans

Le Dr Anne-Lise Ducanda est membre fondateur du CoSE, le Collectif surexposition écrans. On trouve à ses côtés des praticiens de terrain : pédiatres, pédopsychiatres, neuropédiatres, psychologues, orthophonistes, enseignants. Son objectif principal : que la surexposition aux écrans des enfants soit reconnue comme un enjeu majeur de santé publique (pour appuyer la démarche, la signature de la charte est proposée sur le site).

Le site comporte notamment une partie destinée aux parents : où trouver des conseils, des témoignages et des articles de presse.

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