Semi de Paris : ces femmes qui ont couru leur premier semi-marathon

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Par Solal Duchêne

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Le 5 mars 2023 avait lieu le Harmonie Mutuelle Semi de Paris, une course à pied de 21,097 km. A l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, portrait de trois coureuses qui se sont lancées ce défi. Avec beaucoup de détermination et l’envie de laisser derrière elles quelques mauvais souvenirs.

Au moment de franchir la ligne d’arrivée, Elia ne peut s'empêcher de fondre en larmes. Dans les bras de son amie Mathilde, venue courir avec elle, la jeune femme se prend le visage dans les mains, radieuse. Comme si elle n’y croyait pas encore tout à fait. « Ça a été difficile tout de suite, j’ai eu mal aux jambes dès le 6ème kilomètre », lâche la coureuse de 27 ans, à la silhouette élancée. Ce dimanche 5 mars 2023, elle vient de terminer en 2h07 le Harmonie Mutuelle Semi de Paris, une course à pied longue de 21,097 km.

Une performance impensable il y a encore deux ans. « Je pesais 130 kilos et c’était difficile de monter quelques marches », se souvient Elia. Comme elle, Inès et Charlotte ont dû chasser quelques « monstres », comme les appelle Charlotte, pour prendre le départ de la course. Elles faisaient partie des 46 000 participants de l’édition 2023, dont 37% de femmes.

La pratique sportive à l’épreuve de l’anorexie

A quelques minutes du départ, Charlotte termine son échauffement en compagnie de sa mère, Sylvie. Un moment particulier pour elles deux, qui vont s’élancer ensemble. « Ma fille est une battante, explique la maman. Même avec 20 kilos de moins, elle voulait s’inscrire. Mais c’était hors de question. » L’année de ses vingt ans, Charlotte a commencé à souffrir d’anorexie. Sportive, alors qu’elle s’imaginait un jour participer à des marathons, la voilà contrainte de remiser les baskets au placard. « Mon cœur s’est mis à battre plus lentement et j’ai perdu énormément de poids », se remémore celle qui fêtera ses 35 ans cette année. Un âge qu’elle n’était « pas certaine d’atteindre ».

« Je me suis dit que je ne pouvais pas laisser la maladie étouffer mes rêves », confie Charlotte. En même temps qu’un suivi psychologique, elle reprend doucement l’activité physique. Plusieurs années plus tard, son poids est désormais stable et les troubles alimentaires sont derrière elle. « Le sport a été un élément important de ma guérison, il a agi comme un médicament pour me rééquilibrer. Désormais, j’accepte mon corps ».

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C'est sur les pentes de l'Aveyron que se sont entrainées Sylvie et Charlotte pour le Semi de Paris. Photo : Solal Duchêne

Se reconstruire par le sport après une relation toxique

Quelques mètres devant elle, Inès se débat avec un poncho, bricolé avec sa copine Amandine dans un sac poubelle. Il faut dire que la pluie menace et que le thermomètre ne dépasse guère les 5 degrés ce dimanche matin. « J’ai toujours détesté la course à pied, lance cette juriste de 26 ans. Et puis j'ai découvert que courir me faisait oublier mes problèmes, m’aidait à me vider la tête ».

Après être sortie « vidée » et coupée de ses proches à la suite d’une longue relation où elle a subi des violences conjugales, Inès a dû se reconstruire. « Je m’étais perdue, j’étais éteinte. J’ai ressenti le besoin de me fixer un objectif et mon esprit sportif a pris le dessus. » Un premier 10km, couru avec Amandine, la met en confiance. « Avec ce semi-marathon, je veux prouver que les femmes sont fortes, même rabaissées ou détruites par autrui. On peut se relever ! »

Vivre avec l’addiction alimentaire

Lorsque le starter retentit, Inès, Elia et Charlotte se lancent dans la course sans un regard en arrière. « Courir, c’est un bonheur de dingue, rayonne Elia. Je me suis réapproprié mon corps, j’ai appris à l’écouter ».

En 2020, souffrant d’hyperphagie, elle a pris la décision de subir un sleeve, appelé aussi gastrectomie. Cette opération chirurgicale consiste à retirer les deux tiers de l’estomac, pour diminuer sa taille. Avec un résultat spectaculaire, puisqu’en deux ans, Elia a perdu 60 kilos. Et gagné confiance en elle. « Il y a des moments où je me dis ʺ regarde ce que tu es en train de faire, toi qui ne montais pas trois marches, tu fais un semi-marathon !ʺ ».

Aujourd’hui, Elia estime que son combat contre l’addiction se poursuit toujours. Elle partage ses progrès sur les réseaux sociaux, afin de faire profiter de son expérience. « J’ai souffert d’un manque d’information et de repère au moment de mon opération. Je veux donc répondre aux questions, si certains en ont».

Sortir de sa zone de confort

Après quelques kilomètres de course, Charlotte a faussé compagnie à sa mère. « Je me sentais bien, j’ai eu envie d’y aller », rougit la coureuse qui a bouclé la distance en 1h50. « En la voyant s’éloigner, je me suis senti très fière d’elle », partage Sylvie, émue. Sur la ligne d’arrivée, Charlotte est pleine de reconnaissance pour son corps « qui a tenu le coup » pendant 15 ans.

Inès non plus n’a pas réussi à attendre sa comparse, Amandine. « Pendant la préparation, il y a eu des larmes, des cris, des rires. Aujourd’hui, c’est passé très vite, j’ai l’impression d’avoir accompli quelque chose d’incroyable ! » Elle boucle son premier semi en moins de 2h. Enfilant une polaire pour ne pas se refroidir, Inès est heureuse d’être sortie de sa zone de confort. « Toutes les femmes sont fortes. Ne laissons personne nous dire ce que nous sommes capables ou non de faire. »

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