Sida : les idées reçues ont la vie dure

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Malgré une vingtaine d’années de prévention contre la transmission du VIH, les idées fausses sur le sida subsistent, notamment auprès des jeunes. 21 % d’entre eux pensent par exemple que le virus peut se transmettre par un baiser*.

Sida : les idées reçues ont la vie dure

Le point avec le docteur Alain Lafeuillade, spécialiste du sida, et auteur du livre « Un médecin ne devrait jamais dire ça ».

Aujourd’hui en France, on n’attrape plus beaucoup le sida.

FAUX. Depuis la dernière décennie, le chiffre est stable : entre 6 000 et 7 000 nouvelles contaminations par an en France, selon les données des « réseaux sentinelles ». En revanche, les modes de transmission évoluent. « Nous ne voyons pratiquement plus de toxicomanes intraveineux, grâce aux programmes de seringues « propres », souligne le docteur Alain Lafeuillade. Mais l’épidémie continue à se propager chez les hétérosexuels, les bisexuels, et surtout chez les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes ».

VIH et sida, c’est pareil.

FAUX et VRAI. Le sida (syndrome d’immunodéficience acquise) est une maladie, elle-même causée par un virus : le VIH (virus de l’immunodéficience humaine. On peut ainsi être séropositif (c’est-à-dire infecté par le virus) et ne pas avoir le sida, mais aussi être infecté par le VIH sans ressentir aucun symptôme pendant des années, voire des dizaines d’années !

« Le VIH détruit progressivement les défenses immunitaires (des globules blancs nommés « lymphocytes CD4 »), détaille le docteur Lafeuillade. Chez une personne séronégative, le taux de CD4 varie entre 800 et 1 200/mm3. Chez un séropositif, les problèmes « mineurs » (infections à champignon au niveau digestif ou zona à répétition) surviennent entre 200 et 500 CD4/mm3. La définition du sida par les chercheurs américains est lorsque le taux de ces globules blancs passe sous 200 CD4/mm3. C’est alors que surviennent chez le malade des « infections opportunistes graves » ou des tumeurs qui sont souvent mortelles pour les patients… mais aussi une des phases finales du sida : la démence, quand le virus s’attaque au système nerveux et le détruit. »

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On peut attraper le sida en embrassant ou en serrant la main d’une personne séropositive.

FAUX. « L’infection à VIH est transmissible, mais pas contagieuse. Cela signifie qu’il faut certaines pratiques pour la contracter, rappelle le docteur Alain Lafeuillade, spécialiste du sida. Le sang et le sperme sont les liquides les plus riches en virus. Donc un rapport sexuel avec pénétration ou un échange de sang contaminé à sang (scarifications) sont à risque. Le reste est de l’imaginaire. »

Le sida reste une maladie qui ne touche que certaines populations.

FAUX. Cela était relativement vrai au début de l’épidémie, quand les homosexuels, bisexuels, toxicomanes étaient les seuls touchés. Par la suite, l’épidémie a diffusé dans la population hétérosexuelle.

Avec les nouveaux traitements, le sida n’est plus mortel.

FAUX. Aucun traitement disponible actuellement ne permet de « tuer » le VIH. Il n’existe que des médicaments dits « virostatiques ». Ces produits bloquent la multiplication du virus dans une cellule et permettent ainsi d’obtenir chez un patient ce qu’on appelle une charge virale indétectable. Autrement dit, le virus est présent, mais en quantité très basse, jusqu’à devenir quasiment non contaminant pour une autre personne.

Mais attention, rappelle le docteur Lafeuillade, le VIH est toujours là. « On a démontré que chez des patients à charge virale dite indétectable qui stoppent leur trithérapie, celle-ci redevient détectable dans plus de 95 % des cas dans les 2 à 3 semaines qui suivent. »

Avec les nouveaux traitements, plus besoin de se protéger pendant les rapports.

FAUX. « Il existe des traitements « post-exposition » destinés aux personnes qui viennent de s’exposer à un haut risque de transmission du VIH. Ils doivent être mis en route dans l’idéal moins de 48 heures après la prise de risque pour tenter d’empêcher la contamination. « En pratique, c’est une trithérapie de 28 jours, avec surveillance pendant trois mois, précise le docteur Alain Lafeuillade. Si deux semaines après l’arrêt de ce traitement, la charge virale reste indétectable, on peut penser que la personne n’a pas été infectée. »

Il ne faut pas confondre cela avec les traitements administrés en prévention (la « prophylaxie pré-exposition »), réservés à des populations à très haut risque de contamination par le VIH, qui n’utilisent pas systématiquement le préservatif. Quand il est bien suivi, il diminue le risque d’infection au VIH de près de 90 %. En théorie, cela s’inscrit dans de la prévention incluant le port du préservatif, sauf que certains s’en passent. Or, ce traitement ne protège ni contre la syphilis, l’hépatite A, l’hépatite C, les infections à gonocoque et chlamydiae… », s’inquiète le docteur Lafeuillade.

Dans un rapport hétérosexuel, hommes et femmes ont autant de risques d’être contaminés.

FAUX. « Le VIH est plus concentré dans les globules blancs qui accompagnent le sperme, que dans les cellules des sécrétions vaginales. Et à l’inverse, le vagin contient de nombreuses cellules susceptibles d’être infectées par le VIH. C’est pourquoi le risque de transmettre le VIH à une partenaire est plus important que le risque de transmission femme vers homme (bien que non nul). »

Un spermicide seul ou un contraceptif sont efficaces pour prévenir la contamination.

FAUX. Le contraceptif n’a pas d’action antivirale et ne remplace jamais un préservatif pour se protéger des infections sexuellement transmissibles « Un spermicide « usuel » non plus, souligne le docteur Lafeuillade, bien que l’on cherche à mettre au point des spermicides contenant des molécules anti-VIH. Mais jusqu’à présent, leur degré de prévention reste inférieur à celui de l’usage du préservatif. »

Pour en savoir plus :

  • Pauline Hervé
  • Crédit photo : Vasyl Dolmatov / Getty

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