Bientôt un test salivaire pour dépister l'endométriose ?

Publié le , actualisé le

Par Pauline Hervé

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Une nouvelle étude confirme la haute fiabilité du test salivaire conçu par une start-up française, avec des gynécologues, pour identifier l’endométriose. Une maladie qui touche une femme sur dix et provoque douleurs et infertilité.

Huit ans : c’est le temps moyen, en France, avant de diagnostiquer l’endométriose. Cette maladie, qui touche une femme sur dix en âge de procréer, provoque des douleurs intenses et invalidantes et peut causer une infertilitéSes symptômes peuvent prendre des formes multiples. Et les examens pour la diagnostiquer sont longs et coûteux (échographies, IRM, cœlioscopie…). Or le temps perdu avant le diagnostic risque d’aggraver l’endométriose.

Mettre un terme à cette errance diagnostique et rendre le dépistage accessible à toutes, c’est le but d’Endotest. Ce projet de test salivaire avait été présenté fin janvier 2022 par la start-up française Ziwig, en collaboration avec le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF). Une première étude, menée sur 200 femmes, montrait alors que l’analyse d’un simple prélèvement de salive permettrait de dépister l’endométriose avec 97 % de précision.

En juin 2023, de nouvelles données publiées dans une revue scientifique en anglais (NEJM Evidence), et jugées encourageantes par des chercheurs de l'Institut nationale de la santé et de la recherche médicale (Inserm), viennent confirmer ces premiers résultats. Cette seconde étude a été menée sur 200 nouvelles patientes (159 avec endométriose et 41 témoins) recrutées dans plusieurs centres en France. Elle montre en effet une sensibilité de 96%, « validant ainsi les chiffres de la première étude », détaille l'Inserm dans sa publication.

Les micro-ARN, « signature » de l’endométriose

Ces recherches s’appuient sur l’analyse des micro-ARN dans la salive des femmes. Ce sont des petites molécules présentes dans tous les fluides corporels. Des études menées sur d’autres affections, comme le cancer, ont montré que ces micro-ARN jouent le rôle de marqueurs biologiques de certaines maladies.

Les équipes de recherche ont donc séquencé les quelque 2 600 micro-ARN connus dans le corps humain avant d’isoler ceux qui étaient les plus spécifiques des femmes atteintes d’endométriose. Ceci a permis d’identifier la « signature » de cette maladie, qui consiste en une centaine de micro-ARN caractéristiques de cette pathologie.

« L’intelligence artificielle a permis de traiter ces quantités phénoménales d’information, ce qui aurait été impossible pour des équipes « humaines », précise le Pr François Golfier, chef de service gynécologie-obstétrique à l’hôpital Lyon-Sud, qui participe aux études menées pour mettre au point ce test.

Vers un test salivaire en dix jours

Le résultat espéré ? Un test que chaque femme pourrait réaliser facilement chez elle, en prélevant un échantillon de salive, avant de l’envoyer pour analyse à un laboratoire. « En une dizaine de jours, le résultat permettrait de diagnostiquer une endométriose ou d’éliminer cette possibilité », poursuit le Pr Golfier, qualifiant cette perspective de « révolution ».

Cette seconde étude n'était qu'une étape intermédiaire. 800 nouvelles patientes ont été recrutées pour élargir et préciser les résultats des deux premières. Une nécessité pour « éviter au maximum les risques de faux positifs, qui créeraient la confusion chez les patientes », tempère le Pr Michel Canis, gynécologue-obstétricien et spécialiste de l’endométriose.

On parle de faux positifs quand le résultat indique, à tort, la présence d'une endométriose alors que ce n'est pas le cas. « Il faut être sûr que les marqueurs d’autres maladies n’interfèrent pas dans les résultats. La grande quantité de micro-ARN impliqués dans ce test devrait cependant permettre d’éliminer cette possibilité. »

Poser un diagnostic rapide

La Haute Autorité de santé suit « de près ces avancées » selon le Pr François Golfier. Et ce d’autant plus que le gouvernement a lancé en février 2022 une Stratégie nationale de lutte contre l’endométriose. A l'étranger, le test est déjà disponible dans une quinzaine de pays. En France, la start-up Ziwig dit travailler en étroite collaboration avec les autorités sanitaires pour le rendre « disponible pour les professionnels de santé et les patientes avant la fin de l’année 2023 », selon un communiqué.

« Ziwig a fait le choix de permettre au plus grand nombre de femmes concernées possible d’avoir recours au test, grâce à son remboursement. Les procédures nécessaires pour le permettre sont en cours », précise le service de presse de la start-up. Impossible pour autant pour une française d'aller se le procurer à l'étranger car « comme il s’agit d’un un test diagnostique, il est soumis à prescription. Ce qui veut dire qu'il faut être suivie par un spécialiste dans les pays où il est disponible », ajoute Ziwig.

Cette perspective est saluée par les auteurs de la publication de l'Inserm, Daniel Vaiman, chercheur à l’institut Cochin à Paris, et Samir Hamamah, professeur de médecine et de biologie de la reproduction à la Faculté de médecine de Montpellier-Nîmes :

« L’analyse des 800 femmes additionnelles recrutées par l’équipe devrait désormais permettre d’apporter de nouvelles confirmations et perspectives. Cette étude représente une innovation technique, scientifique et médicale destinée à résoudre un problème de santé publique qui est l’errance diagnostique des patientes et à les orienter vers des choix thérapeutiques adéquats. »

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