VIH : renforcer le dépistage avec l’opération « VIH Test »

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Par Peggy Cardin-Changizi

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Depuis le 1er janvier 2022, l’opération « VIH Test » permet à tous les patients qui le souhaitent de réaliser gratuitement, sans ordonnance ni rendez-vous, un test VIH dans n’importe quel laboratoire de biologie médicale de France. Un dispositif supplémentaire qui vise à simplifier et renforcer le dépistage, élément central dans la lutte contre le sida.

La disparition de l'épidémie d’infection à VIH (Virus de l'Immunodéficience Humaine) en 2030. Tel est l’objectif mondial annoncé par l’ONUSIDA et l’OMS qui s’appuient conjointement sur la combinaison de tous les éléments de prévention : l’usage du préservatif, l’accès au traitement par antirétroviraux, la prophylaxie pré-exposition (prep)*, le traitement postexposition et bien sûr le dépistage précoce.

Sur ce dernier point, les chiffres récents ne sont pas encourageants, notamment en France. En effet, conséquence de la pandémie de Covid, le nombre de nouveaux diagnostics du VIH a été estimé à 4 856 en 2020, soit un recul de 22 % par rapport à 2019, selon Santé Publique France. Par ailleurs, avec 5,2 millions de sérologies VIH réalisées dans les laboratoires de biologie médicale, l’activité de dépistage du VIH, qui avait augmenté entre 2013 et 2019, a diminué de 14 % entre 2019 et 2020. C’est ainsi, qu’en 2020, 30 % des infections à VIH ont été découvertes à un stade avancé de l’infection, ce qui constitue une perte de temps en termes de prise en charge et un risque de transmission aux partenaires avant la mise sous traitement antirétroviral.

Un dépistage gratuit et sans ordonnance du VIH

Pour inverser cette tendance, l’ex-ministre de la Santé Olivier Véran a généralisé, depuis le 1er janvier 2022, l’opération « Au labo sans ordo » (désormais rebaptisée « VIH Test ») à l’ensemble du territoire. À l’heure où le dépistage reste très insuffisant (et encore plus depuis le Covid), ce dispositif permet à tout assuré social  ̶  et à ses ayants droit  ̶  de réaliser une sérologie VIH sans ordonnance, prise en charge à 100 % et sans avance de frais dans n'importe quel laboratoire de biologie médicale de France. Le patient se présente au laboratoire et est pris en charge.

« Ce programme s’inscrit dans les nouvelles missions du biologiste médical, explique le Dr Vincent Gleize, pharmacien biologiste, directeur marketing et communication des laboratoires Unibio et Membre du réseau Les Biologistes Indépendants. À savoir, proposer aux patients un parcours de prévention simplifié et une meilleure orientation dans la prise en charge de la maladie ». Pour rappel, les patients qui se font dépister dans le cadre du VIH Test représentent environ 7 à 8 % des sérologies VIH effectuées par les laboratoires.

Les tests réalisés au laboratoire

Les tests de dépistage d’infection par le VIH sont effectués après une simple prise de sang ne nécessitant pas d’être à jeun. Dans la majorité des cas, les résultats sont disponibles en moins de 24 heures. « Le VIH est l'agent viral du sida, rappelle le Dr Gleize. Le test de dépistage, appelé test Elisa (Enzyme Linked Immuno Sorbent Assay), permet de rechercher la présence d’anticorps anti-HIV-1 et anti-HIV-2, signe de l’infection ». C’est un test dit de 4e génération car il détecte simultanément les anticorps anti VIH-1 et anti VIH-2, et Antigène P24. « Il peut être réalisé au minimum 6 semaines après la prise de risque contre 12 semaines pour les autres tests (TROD et autotest), car plus sensible ». C’est le test le plus fiable et par lequel le patient peut connaître son statut sérologique le plus rapidement après la prise de risque.

Accompagner le patient diagnostiqué séropositif

Désormais, en cas de séropositivité détectée dans le cadre de VIH Test, c’est au biologiste médical – en l’absence de médecin contact signalé par le patient – d’annoncer le résultat. « Les biologistes, mais aussi les infirmières et les secrétaires médicales, peuvent bénéficier de formations car il y a tout un volet psychologique à mettre en place pour épauler le patient séropositif. Cela passe par l’accueil, l’écoute, le conseil, mais aussi par une aide dans sa démarche de soins : prise d’un premier rendez-vous auprès d’un médecin référent pour le VIH dans un établissement de santé, orientation vers une association dédiée ou un psychologue », détaille Vincent Gleize.

Pour cela, il a été mis en place un « navigateur » que le biologiste peut contacter par téléphone. « Ce système est organisé au niveau régional par la concertation des différents acteurs de santé : l’ARS, la Sécurité sociale, l’URPS biologistes, Santé Publique France, le Comité de coordination régionale de la lutte contre le virus de l'immunodéficience humaine (Corevih), Sida Info Service ou des associations locales de patients… ».

Cibler les populations à risque

Le dépistage gratuit existait déjà auparavant au sein des Centres gratuits d'information, de dépistage et de diagnostic (CeGIDD). « Mais leur nombre reste le plus souvent insuffisant dans les départements », reconnaît Étienne Fouquay, chargé de mission programme dépistage et Prep chez AIDES. Le VIH Test va permettre de multiplier les points de dépistage et de faciliter son accès ».

De son côté, l’association AIDES se focalise notamment sur les populations à risque (hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes, travailleurs et travailleuses du sexe, usagers et usagères de drogues…), qui « ont tendance à moins se faire dépister ».

« Suite aux deux phases de confinement en 2020, nous avons lancé en 2021 le site jefaisletest.fr qui permet de recevoir un autotest sanguin gratuitement par la Poste ». Il suffit d’en faire la demande en quelques clics. « Nous en avons envoyé près de 10 000 l’an dernier. Et nous allons continuer à proposer ce dispositif, en partenariat avec les agences régionales de santé (ARS), car il répond à un vrai besoin des populations ciblées par le virus ».

Même si on meurt moins du sida aujourd’hui grâce aux progrès de la médecine, « le dépistage reste la pierre angulaire de la lutte contre le VIH », conclut Étienne Fouquay, rappelant que près de 25 000 personnes vivraient avec le virus en France sans le savoir…

* Prep : un traitement préventif qui, pris une fois par jour, permet une protection contre le VIH aussi fiable qu’un préservatif.

Par Peggy Cardin-Changizi

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