Vrai/faux sur la cigarette

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Par Pauline Hervé

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© Graffizone / ISTOCKPHOTOS

Un quart des Français fument, occasionnellement ou quotidiennement. Parmi eux, six sur dix souhaitent arrêter, ce qui peut être un véritable défi. Quels en sont les bénéfices et quelle méthode adopter ?

Le nombre de fumeurs ne baisse plus en France.

VRAI et FAUX. Quinze millions de personnes fumaient, dont douze millions quotidiennement en France, en 2022, selon les chiffres publiés par Santé Publique France en 2023. C'est un quart de la population, et cette proportion stagne depuis 2019. Le Pr Bertrand Dautzenberg, pneumologue à La Pitié Salpêtrière, à Paris, souhaite nuancer ce constat. « Le tabagisme baisse moins vite en France que dans d'autres pays d'Europe mais, depuis 20 ans, le nombre de cigarettes vendues est passé de 84 milliards par an à environ 40 milliards. »

Le médecin déplore les insuffisances des enquêtes sur le nombre de fumeurs, menées tous les 18 mois à deux ans par Santé Publique France. Selon lui, « l'une des meilleures mesures de la baisse du tabagisme est l'étude Escapad (Enquête sur la santé et les consommations lors de l'appel de préparation à la défense), menée chaque année auprès des jeunes de 18 ans. Selon celle-ci, le nombre de jeunes qui fument dans le mois est passé de 41 % en 2000 à 15 % en 2022. « Si l'on continue cette trajectoire, on aura moins de 5 % de consommateurs à 18 ans en 2034 », espère le pneumologue.

La cigarette électronique est un bon moyen d'arrêter.

VRAI. On compte 5 % de « vapoteurs » quotidiens en France, dont une grande majorité d'ex-fumeurs qui ont ainsi arrêté la cigarette. La Cochrane Library a publié en 2023 les résultats d'une synthèse d'études menées dans le monde entier sur l'arrêt du tabac. Résultat : le produit le plus efficace est la cigarette électronique, juste devant les patchs associés aux gommes.

Attention cependant, « la moitié des vapoteurs le font seulement pour réduire leur consommation tout en restant fumeurs. Or, cela ne sert à rien », prévient le Pr Daniel Thomas, cardiologue, porte-parole de la Société Francophone de Tabacologie. « Le seul intérêt de la vape est de donner envie d’arrêter totalement la cigarette », acquiesce le Pr Dautzenberg.

En outre, aucune étude sérieuse sur la nocivité à long terme de la cigarette électronique n'a encore été publiée et il est fortement conseillé de l’arrêter à terme. À noter que, contrairement à la e-cigarette, les substituts nicotiniques (patchs, gommes) ou médicaments, eux, sont pris en charge à 65 % par l'Assurance maladie, et le reste à charge par la plupart des mutuelles.

La cigarette électronique est une porte d'entrée vers le tabagisme.

FAUX. « La vape est un concurrent de la cigarette, et un concurrent efficace », martèle Bertrand Dautzenberg. Une très vaste étude du National Health Research britannique s'est penchée sur la question du glissement de la e-cigarette vers le tabac, et les résultats sont encourageants. « Cette analyse complète donne l’assurance que les pays qui ont adopté une position plus progressiste à l’égard des cigarettes électroniques n’ont pas constaté d’impact négatif sur les taux de tabagisme. Au contraire, les résultats suggèrent que plus probablement (…) les cigarettes électroniques ont remplacé les cigarettes nocives dans ces pays », écrit le professeur Lion Shahab, coauteur de l’étude.

En France, les résultats annuels de l’étude Escapad montrent que le nombre de jeunes qui ne consomment rien augmente. « Cela démontre que la vape n'incite pas à consommer du tabac. D'ailleurs, la plupart des jeunes commencent la cigarette avant la vape », commente le Pr Dautzenberg.

Quand on a tenté d'arrêter sans y arriver, cela signifie qu'on ne réussira jamais.

FAUX. « Cela ne sert jamais à rien d’essayer d'arrêter, martèle le Pr Dautzenberg. Cependant, il est important de se faire accompagner et de ne pas compter sur sa seule volonté. On ne demande pas à un diabétique de la volonté pour lutter contre le diabète, on l'aide avec de l'insuline ». Il est utile, si l’on souhaite arrêter le tabac, d'en parler à son médecin ou de consulter un tabacologue, ou encore de profiter de campagnes nationales comme le Mois sans tabac.

En outre, « il n'est jamais trop tard pour stopper, souligne le cardiologue Daniel Thomas. Arrêter après 60 ans réduit encore le risque de décès de l’ordre de 25 %, en particulier les décès liés à une maladie cardiovasculaire ».

Fumer une à deux cigarettes par jour est bien moins risqué qu'en fumer 20.

FAUX. Toute consommation implique un risque qui n'est pas proportionnel à la quantité fumée. « Par exemple, le risque cardiovasculaire lié à une à cinq cigarettes par jour correspond déjà à la moitié du risque d’en fumer 20 », explique le Pr Thomas. Même si, précise le Pr Dautzenberg, « cela dépend du type de risques pour la santé pris en compte : le risque d'infarctus ou d'hémiplégie est quasi le même, quelle que soit la quantité fumée. Celui de BPCO (bronchopneumopathie chronique obstructive) est, lui, proportionnel à celle fumée quotidiennement. »

Arrêter le tabac fait grossir.

VRAI et FAUX. La moitié des fumeurs ne prennent pas plus de 5 kg en arrêtant, selon Tabac Info Service. Il est courant de prendre un peu de poids car la nicotine diminue l’appétit, augmente les dépenses en énergie et ralentit le stockage des graisses. Pourtant, ce n'est pas systématique. « 16 % des ex-fumeurs perdent même du poids ! », souligne le Pr Daniel Thomas.

Aussi, il importe d’augmenter son activité physique quotidienne quand on arrête de fumer. Cela a des effets bénéfiques, à la fois physiques et psychologiques.

Les bénéfices de l'arrêt du tabac sont rapides.

VRAI. Dès huit heures d'arrêt, le taux de monoxyde de carbone dans le sang est divisé par deux et on est mieux oxygéné, selon Tabac Info Service. « Les premiers bénéfices sur le système cardiovasculaire sont présents au bout de 15 jours d'arrêt car la coagulation se normalise », précise le Pr Thomas. Après un an, le risque d’accident vasculaire cérébral redevient équivalent à celui d’une personne n’ayant jamais fumé. Et après 10 ans, l'espérance de vie se rapproche de celle de quelqu'un qui n'a jamais fumé. Les bénéfices sont d’autant plus importants et rapides que le sevrage est précoce, mais il n’est jamais trop tard pour en bénéficier.

Le tabagisme passif d’une femme enceinte n’est pas nocif pour le bébé.

FAUX. Lorsqu’une femme enceinte, non fumeuse, est exposée au tabac, les substances contenues dans la fumée passent dans son sang mais également dans le sang du fœtus, indique Tabac Info Service. L'un des risques est d'avoir un bébé plus petit à la naissance. Par ailleurs, « il a également été montré que le risque d’asthme était augmenté lorsqu’il y avait eu une exposition in utero du fœtus au tabagisme (actif ou passif) de sa mère », ajoute l'organisme.

La cigarette détend.

FAUX. Le soulagement rapide ressenti par les fumeurs, assimilé à de la détente, est la conséquence de la réponse du cerveau à l’apport de nicotine à chaque cigarette fumée. Celle-ci vient agir sur certains récepteurs de plaisir du cerveau et combler le manque. Mais cet effet ne dure pas, c'est pourquoi les fumeurs auront régulièrement besoin d'une nouvelle dose pour se sentir bien.

En revanche, « il est prouvé que la consommation de nicotine augmente le niveau d’anxiété, de stress, voire de dépression des fumeurs. La majorité des fumeurs ne fume pas parce qu’ils sont stressés, mais sont stressés parce qu’ils fument », selon le Comité national contre le tabagisme.

Le Mois sans tabac

Chaque année, en novembre, Tabac Info Service organise le Mois sans tabac, un défi national auquel chaque Français peut adhérer afin d'arrêter la cigarette ou de constater les bienfaits de l'arrêt pendant plusieurs semaines. Coaching gratuit, conseils, suivi téléphonique avec un tabacologue sont quelques-uns des outils proposés. Et il est possible de rejoindre le mouvement même dans le cours du mois ! En savoir plus sur le site du Mois sans tabac.

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