Cancer après 75 ans : quelle prise en charge ?

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Par Isabelle Blin

Temps de lecture estimé 5 minute(s)

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Plus d’un tiers des nouveaux cas de cancer touche des personnes de plus de 75 ans, souvent déjà fragilisées en raison de leur âge. Ceci implique un accompagnement adapté.

Quels sont les principaux cancers chez les personnes âgées ?

Le pic du cancer colorectal se situe à 75 ans. Mais à l’exception relative de quelques cancers de l’adulte « jeune », c’est-à-dire survenant généralement avant 50-60 ans (testicule, col de l’utérus, thyroïde et certaines localisations ORL), tous les cancers sont possibles chez les sujets âgés. Avec une incidence culminant après 70 ans.

Au-delà de 75 ans, les cancers les plus fréquents sont respectivement celui de la prostate chez l’homme et le cancer du sein chez la femme. « L’incidence des cancers est croissante avec l’âge. Dans 10 ans, plus de la moitié des cancers va survenir après l’âge de 75 ans », assure le Dr Étienne Brain. Oncologue à l’Institut Curie (Paris), le Dr Brain est un spécialiste des cancers des personnes âgées.

 

A lire aussi : Cancers masculins : le diagnostic précoce, pour qui, pour quoi ?

Notre article pour comprendre les enjeux du dépistage des cancers de la prostate et des testicules.

 

Y a-t-il des signes précurseurs ?

Trop souvent, on considère qu’il est normal d’être fatigué ou d’avoir des douleurs avec l’âge. C’est faux. Ce n’est pas parce que les dépistages collectifs s’arrêtent à 74 ans qu’on ne se surveille plus. Au contraire ! « Il faut absolument continuer à consulter son médecin régulièrement (au moins une fois par an), rester vigilant sur ce que l’on voit, ce que l’on ressent et ne pas hésiter à en parler à son médecin », rappelle Priscille Le Bon, infirmière coordinatrice à l’UCOG (unité de coordination en oncogériatrie) de Normandie.

 

Ces cancers sont-ils plus graves que chez une personne plus jeune ?

Pas nécessairement. Tout dépend du moment où ils sont diagnostiqués et pris en charge. Il est également faux de penser qu’ils évoluent plus lentement. Il existe aussi des formes agressives chez les personnes âgées. Ce n’est pas l’âge qui en fait la gravité, c’est l’état général de la personne.

Plus on vieillit, plus on a de risques d’avoir déjà d’autres maladies chroniques, des traitements en cours, des antécédents… Autant de raisons d’interférences avec les traitements du cancer, avec des risques accrus d’effets secondaires. Il est donc essentiel que les malades âgés soient évalués soigneusement, osent parler de ce qui ne va pas et de ce qu’ils souhaitent.

 

Combien de personnes concernées ?

Un million de Français âgés de 75 ans et plus ont (ou ont eu) un cancer au cours de leur vie. Près de 700 000 d’entre eux sont actuellement en traitement ou suivis pour cette affection.

Parmi les 385 000 nouveaux cancers diagnostiqués en France chaque année, plus de 120 000 le sont chez les personnes âgées de 75 ans et plus : 63 500 chez les hommes et 58 300 chez les femmes.

 

Quelle est la première étape de la prise en charge ?

Il s’agit d’abord d’évaluer l’état de santé général du patient (diabète, hypertension, insuffisance cardiaque…) pour établir des priorités et une hiérarchisation. Le test de dépistage des fragilités gériatriques en cancérologie (issu de l’étude ONCODAGE) apporte un intérêt complémentaire. « En 3 minutes, on identifie une potentielle fragilité. Et si besoin, on vous dirige vers une consultation pluridisciplinaire approfondie qui propose un véritable check-up sur une demi-journée », explique Priscille Le Bon.

Les résultats, véritable photo du patient à l’instant T, permettront ensuite de mettre en place les traitements et prises en charge les plus adaptés, dans les conditions que souhaite le malade, et d’anticiper ses besoins.

 

Faut-il alléger le traitement en raison de l’âge ?

Il faut l’ajuster en fonction de l’état de santé global de la personne, c’est-à-dire trouver le juste milieu pour limiter les effets indésirables tout en gardant l’efficacité du traitement. Par exemple, en diminuant les doses des traitements de chimiothérapie, en espaçant les séances de radiothérapie. « Cela nécessite d’écouter le malade et que les différents membres de l’équipe médicale (gériatre, oncologue…) travaillent en étroite collaboration », précise le Dr Brain.

Et parce qu’à cet âge, tout est plus fragile, ces malades peuvent aussi, selon les cas, bénéficier de soins de kinésithérapie (perte d’équilibre, de motricité…), des conseils d’une nutritionniste (en cas de dénutrition), d’un accompagnement social (aide-ménagère à la maison, portage des repas…), d’un suivi psychologique... On prend en compte leur état de santé, mais aussi leurs conditions de vie (isolement, lien social), leur situation financière, leurs activités.

 

A lire aussi : Cancer : enfin le droit à l’oubli

Les personnes qui ont guéri d’un cancer n’ont plus à indiquer leur ancienne maladie, passé un certain délai, lors d’une demande de prêt. Explications.

 

Quelles sont les principales attentes de ces malades ?

Rester chez eux et surtout ne pas souffrir, tant moralement que physiquement. Ils souhaitent majoritairement (80 %) privilégier leur qualité de vie plutôt que le nombre d’années à vivre. C’est pour cette raison que l’accompagnement inclut aussi des personnes extérieures à l’hôpital, comme le médecin généraliste, le pharmacien, l’infirmier libéral.

L’objectif : tout mettre en œuvre pour les accompagner et les aider à mieux vivre avec leur maladie, en respectant leurs souhaits. Avec le plus souvent en priorité la protection du niveau d’autonomie qu’ils détiennent encore.

 

Pour en savoir plus

Retrouvez le 6e rapport de l’Observatoire sociétal des cancers et des brochures sur le cancer après 70 ans sur le site de la Ligue contre le cancer.

Plus d’informations sur le cancer chez les personnes âgées sur le site de l’Institut Curie.

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