Gynécologie : une culotte qui préserve l’intimité

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Par Patricia Guipponi

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Se déshabiller lors d’un examen médical est problématique pour les plus pudiques. Une Héraultaise a imaginé des sous-vêtements, à ouverture vaginale, qui ne dévoilent que ce qu’il faut.

Mylène n’a plus poussé la porte du cabinet de son gynécologue depuis trois ans. À quatre jours du rendez-vous, elle a annulé la consultation. « J’ai le même médecin depuis vingt ans. J’ai confiance en lui. Pourtant, je rechigne à aller le voir ». Ce n’est pas tant l’examen que la quinquagénaire redoute. Ce qui l’angoisse, c’est de se dévêtir. Mylène se dit pudique. Le fait que l’intime soit au centre même de l’acte médical gynécologique la dérange. « Il faut montrer ses parties génitales. Comme si la posture des pieds dans les étriers n’était pas assez embarrassante. Je préfère aller chez le dentiste alors que je déteste la roulette ». Elle s’expose à de potentiels dangers en n’ayant pas de suivi régulier. « À mon âge, il faut se faire surveiller pour le dépistage des cancers du col de l’utérus ou du sein. Je ne suis pas raisonnable ».

Testée auprès de plusieurs femmes

Audrey éprouve la même difficulté. « J’ai du mal à me mettre en maillot à la piscine ». Alors, quand il s’agit de se rendre chez un gynécologue, la jeune maman n’en mène pas large. Ce qui rend l’examen encore plus désagréable, car elle se contracte. « Le suivi de ma grossesse a été très compliqué ». Cependant, elle a accepté de se prêter aux tests effectués par l’Héraultaise Marie Rimbault-Joffard, auprès de plusieurs femmes, pour mettre au point une culotte dédiée aux examens endovaginaux en condition non-stérile. « Je me fais violence car je crois en ce projet salutaire pour beaucoup de patientes comme de gynécologues ». Pauline partage cet avis. « Je ne suis pas pudique pour ce qui relève du médical. Je désacralise le rapport au corps ». Elle a des amies pour qui cela est plus délicat. « En participant aux tests, je pars dans l’optique d’aider celles qui sont gênées ».

33 % négligent leur suivi gynécologique

Cette forte contrariété, Marie Rimbault-Joffard la connaît. Elle l’a éprouvée le long de son douloureux parcours de procréation médicalement assistée. « Une fois le côté affect dépassé, j’ai réfléchi à un prototype de culotte pour préserver l’intimité ». Marie lance un sondage en ligne qui la conforte dans son idée. « Pour 80 % des femmes interrogées, ces examens sont synonymes de stress. Elles sont 33 % à négliger leur suivi gynécologique et 15 % leur contraception, par peur d’être examinées ». Le haut conseil de l’égalité entre les femmes et les hommes a publié un rapport en juin 2018 qui place la pudeur dans les problématiques à un bon suivi gynécologique. « La culotte, que j’ai brevetée, est en tissu. Elle sera commercialisée entre 20 et 25 €, en ligne, sous le nom de Imagyne ». Plusieurs tailles seront disponibles, calibrées au mieux à la morphologie de chacune. Les tests pratiqués sur les patientes volontaires, par des gynécologues bénévoles, vont en ce sens. Une version jetable est à l’étude pour les cabinets de gynécologues-obstétriciens, médecins généralistes, sages-femmes.

Uniquement pour les actes endovaginaux

La culotte est pensée pour les actes endovaginaux, dans un premier temps. « Entendre par là, le frottis, la pose ou le retrait du stérilet… ». C’est-à-dire, ce qui ne nécessite pas l’accès global à la vulve. « Dans ce cas, il faudra toujours se déshabiller, mais c’est déjà un sacré plus ». L’entrepreneuse a reçu le soutien de médecins et de personnels de santé. « J’ai discuté avec des sages-femmes, des gynécologues pour analyser les besoins, afin d’apporter un confort aux patientes ainsi qu’aux praticiens ». Le projet est porté par Alter Incub, incubateur de la région Occitanie. Il est financé par l’Europe.

Trois questions à

Pia de Reilhac, gynécologue à Nantes et présidente de la fédération nationale des collèges de gynécologie médicale.

« Prendre le temps d’expliquer »

La pudeur est-elle un frein à l’examen gynécologique ?

Certaines femmes ont, en effet, du mal à se dévêtir. C’est compréhensible. Je dis toujours à mes patientes que l’on commence par le bas, puis on fera le haut. Elles ne se déshabillent pas complètement. Elles dénudent seulement la partie à examiner. Certaines viennent en jupe ou avec de longs pulls. Ça les couvre. Elles se sentent mieux. Redouter les examens gynécologiques n’est pas lié qu’à une histoire de pudeur. Il y a cette idée fausse que c’est douloureux. Certes, ce n’est pas agréable mais ça ne doit pas faire mal. Ainsi de jeunes femmes ne consultent pas. C’est dramatique, surtout à des âges où la sexualité est active.

Comment combattre ces a priori ?
Il faut rassurer, expliquer, prendre le temps avec les patients. Ce que l’on néglige parfois car nous sommes très sollicités puisque nous sommes de moins en moins nombreux à exercer. Notre rôle est important dans la vie des femmes : des premières règles à la ménopause. On peut discuter de tout sans tabous et on décèle des choses que l’on ne peut voir sur de simples analyses de sang : les infections à chlamydia par exemple ou encore le gonocoque. On prescrit aussi une contraception adaptée en prenant le temps de discuter.

Et si l’une de vos patientes porte une culotte gynécologique ?
Ça m’est égal si ça ne perturbe pas l’examen. Si ça doit rassurer la patiente et faciliter les choses, tant mieux !

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