Hypnose : à quoi sert-elle dans le domaine de la santé ?

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Par Patricia Guipponi

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La pratique de l’hypnose s’est démocratisée dans les établissements de santé et les cabinets de médecine de ville. Elle offre un confort de soin au patient en diminuant notamment son angoisse et la douleur. On l’utilise dans de nombreux domaines médicaux, psychologiques et paramédicaux.

Qu’est-ce que l’hypnose ?

L’hypnose modifie l’état de conscience de la personne hypnotisée. Dans le cadre médical et paramédical, c’est un soin relationnel qui se base sur cet état conscient particulier pour mobiliser les ressources internes du patient afin de l’aider, par exemple, à mieux gérer une angoisse préopératoire ou à réduire l’impact émotionnel de sa douleur.

Le patient est dans un état de transe caractérisé par une indifférence au monde extérieur, par l’activation d’automatismes et de mécanismes inconscients et par une hyper-suggestivité. Il ne dort pas. Son esprit est focalisé. Il reste donc réactif et acteur de sa santé.

« L’hypnose s’articule autour de la relation de confiance entre le praticien et le patient », indique le docteur Arnaud Gouchet*, médecin formateur en hypnose médicale. « Le soignant a un rôle de facilitateur dans cette relation », souligne le docteur Philippe Aïm, psychiatre et psychothérapeute, enseignant en hypnose.

Dans quel domaine de la santé peut-elle servir ?

Le domaine de prédilection de l’hypnose est celui de la douleur. Le soignant y a recours pour que le patient gère mieux la douleur aiguë consécutive par exemple à une fracture ou lors de la réduction d’une luxation d’épaule.

« L’hypnose est utilisée dans la douleur dite procédurale, c’est-à-dire provoquée par un acte médical : pose d’un drain thoracique, opération du genou… », indique le docteur Arnaud Gouchet. Elle agit par ailleurs sur la douleur chronique, relative aux troubles fonctionnels intestinaux, à la fibromyalgie

« En psychothérapie, elle peut réduire l’anxiété, traiter la dépression, le psycho-traumatisme », ajoute le docteur Philippe Aïm. Elle est adoptée pour traiter les addictions (tabac, jeux…), les troubles du sommeil comme les troubles alimentaires, les phobies, les affections physiques et psychosomatiques (acouphènes, urticaire…). L’hypnose ne guérit en aucun cas les maladies graves comme le cancer. Mais elle aide le patient à mieux vivre le parcours de soins.

Qui peut pratiquer l’hypnose médicale et paramédicale ?

Tout soignant formé sérieusement à la pratique de l’hypnose peut s’en servir : infirmier, kiné, dentiste, oncologue, sage-femme… Et ce, dans les hôpitaux, les cliniques, les cabinets de ville. « Ce doit être dans la limite de la discipline, des compétences et de l’exercice du soignant », insiste le docteur Arnaud Gouchet.

L’hypnose complète la palette d’outils à sa disposition dans son domaine d’expertise au service du patient.

Comment trouver un bon praticien ?

L’hypnose est enseignée dans certaines universités de médecine. Elle est au centre de formations dispensées notamment pour les instituts soignants de formation à l’hypnose regroupés dans la Confédération francophone d’hypnose et thérapies brèves. Pourtant, la profession d’hypnothérapeute n’est pas réglementée.

Cela signifie qu’elle ne fait l’objet d’aucun contrôle d’instances comme c’est le cas pour les médecins ou les infirmiers responsables devant leurs Ordres. « N’importe qui peut s’autoproclamer hypnothérapeute », admet le psychiatre Philippe Aïm.

Il est plus prudent de s’adresser à un professionnel de santé qui pratique l’hypnose en complément et en accord avec sa discipline et/ou de demander conseil à son médecin généraliste. Des annuaires de soignants pratiquant l’hypnose sont disponibles sur les sites de l’Association française de l’étude pour l’hypnose médicale ou d’autres instituts de la Confédération francophone d’hypnose.

Comment se déroule la pratique de l’hypnose ?

Le patient est volontaire. L’acte n’est pas imposé mais proposé par le soignant, voire souvent demandé par le patient. Il faut connaître les particularités de l’état de santé physique et psychique du soigné. L’urgentiste ou l’anesthésiste pratique l’hypnose durant le temps limité de son intervention. Pour les psys et les autres thérapeutes, cela s’inscrit plus dans la durée. « Les séances vont varier d’une demi-heure à une heure », indique le docteur Philippe Aïm.

En psychothérapie, l’hypnose est déclenchée progressivement. Le patient ferme les yeux ou fixe un point précis, guidé par le thérapeute qui l’invite à activer certains mécanismes inconscients.

Lors d’une hypnosédation en intervention chirurgicale, l’anesthésiste reçoit en amont le patient pour recueillir les informations nécessaires au bon déroulé de l’opération comme il le fait en temps ordinaire. L’accompagnement hypnotique de dissociation de l’esprit et du corps se fait par le soignant habilité dès que le patient est installé au bloc. Quand l’acte chirurgical est terminé, le patient est ramené dans un état de conscience normal.

Tout le monde peut-il être hypnotisé ? Et les enfants ?

Chacun possède la capacité d’entrer en hypnose encore faut-il qu’il le souhaite, qu’il sollicite cette aide. Le degré de réceptivité à l’hypnose n’est pas le même pour tous. Le changement d’état peut prendre plus de temps d’une personne à une autre.

« Les enfants sont de bons sujets hypnotiques. Le monde de l’imaginaire leur est plus directement accessible », observe le docteur Philippe Aïm, dans l’ouvrage qu’il a écrit sur l’hypnose**.

Est-ce que l’hypnose est reconnue scientifiquement ?

Longtemps perçue comme sulfureuse, associée à tort à l’hypnose de spectacle ou de rue, l’hypnose est utilisée dans les soins depuis au moins 200 ans. Le psychiatre américain Milton Erikson a modernisé la technique. C’est le père fondateur de l’hypnose clinique et thérapeutique pratiquée aujourd’hui.

Les études scientifiques françaises pour juger de l’efficacité de l’hypnose dans le domaine du soin ont toutefois tardé. La première évaluation de la littérature a été menée en 2015 par l’Inserm à la demande du ministère de la Santé.

Est-ce que l’hypnose est efficace ?

L’Inserm estime que l’efficacité de l’hypnose thérapeutique est surtout notable en anesthésie, dans la prise en charge du syndrome du côlon irritable, sur l’anxiété et d’autres indications de thérapie. L’institut souligne que les données observées ne permettent pas d’affirmer que l’hypnose est aussi efficace dans des domaines comme le sevrage tabagique, la schizophrénie ou encore la prévention de la dépression post-partum.

Peut-on s’autohypnotiser ?

« Le patient peut s’autohypnotiser. Cela fait partie de son implication active. Mais il ne doit pas le faire en autodidacte », précise le docteur Arnaud Gouchet. « Il doit être accompagné par le soignant hypnothérapeute qui va l’amener à reproduire seul ce qu’il a vécu en sa compagnie. »

L’autohypnose est sans danger mais il faut s’entourer de précautions comme privilégier un endroit calme et confortable dans lequel on est en sécurité.

Est-ce que l’hypnose est prise en charge par l’Assurance maladie ?

Dans le cadre d’un acte hospitalier, le patient est pris en charge. La consultation d’hypnothérapie chez un médecin conventionné, généraliste ou spécialisé, de ville est généralement remboursée sur la base du tarif de la Sécurité sociale et peut l’être par les mutuelles en complément. Il faut compter entre 50 et 100 € la séance d’hypnose selon le lieu et le praticien.

* Le docteur Arnaud Gouchet a supervisé la réalisation de l’ouvrage La boîte à outils de l’hypnose en anesthésie-réanimation, aux éditions Dunod.

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