Insuffisance rénale : mieux comprendre la dialyse

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Par Peggy Cardin-Changizi

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L’insuffisance rénale est un problème majeur de santé publique. En effet, elle peut évoluer vers une insuffisance rénale chronique majeure ou terminale qui va nécessiter des traitements de suppléance : la greffe ou la dialyse. Selon le choix du patient, cette dernière peut se faire à domicile ou dans un établissement de santé.

En France, environ 7 à 10 % de la population présenterait une atteinte rénale*. Un fléau qui ne cesse de progresser puisque plus de 11 000 personnes apprennent chaque année qu’elles souffrent d’une insuffisance rénale chronique terminale. Cette dernière nécessite un « traitement de suppléance », par dialyse ou par greffe, qui permet de remplacer le fonctionnement des reins.

« Des maladies chroniques comme le diabète ou l’hypertension peuvent entraîner une détérioration progressive et une insuffisance de la fonction rénale », explique le professeur Thierry Lobbedez, néphrologue au CHU de Caen et président de la commission dialyse à la SFNDT (Société Francophone de Néphrologie Dialyse et Transplantation). « Le rein est un organe dont l’une des fonctions est d’épurer le sang des toxines produites par le métabolisme. Lorsque sa capacité d’épuration devient inférieure à 15 ml par minute, un traitement de suppléance doit être envisagé. »

La greffe : le traitement le plus efficace

En France, en 2020, sur les 91 875 personnes souffrant d’insuffisance rénale chronique terminale, 55 % étaient sous dialyse et 45 % portaient un rein greffé. « La transplantation d’un rein provenant d’un donneur vivant ou décédé est le meilleur traitement de l’insuffisance rénale chronique terminale, reconnaît le néphrologue. Cependant, du fait de leur état de santé ou de leur choix personnel, de trop nombreuses personnes ne peuvent bénéficier d’une greffe de rein. Un traitement par dialyse est alors proposé. »

La dialyse : un traitement à domicile ou à l’hôpital

La dialyse permet d’éliminer les toxines qui ne le sont plus par les reins. C’est un traitement contraignant qui a un impact important sur la qualité de vie des malades. Il peut se faire au domicile du patient ou en établissement de santé, en concertation avec l’équipe de soin. « Mais les patients sont souvent polypathologiques et n’ont pas le choix du traitement », répond Jan Marc Charrel, président de France Rein, qui réunit plus de 10 000 membres. Notre rôle est de les sensibiliser à toutes les options afin de trouver celle qui leur permettra de vivre le mieux possible la maladie. »

L’hémodialyse : 3 séances par semaine

On distingue deux types de dialyse. Tout d’abord, l’hémodialyse qui est une méthode d’épuration extracorporelle. Le sang du patient est filtré à l’extérieur de l’organisme dans une machine équipée d’une membrane artificielle de filtration. « Une connexion (fistule) entre la veine et l’artère du bras doit préalablement être créée de façon chirurgicale afin d’augmenter le diamètre et le débit sanguin dans la veine », détaille le médecin. Au bout de quatre à six semaines, la veine devient suffisamment solide pour tolérer les ponctions répétées.
La séance de dialyse dure en général de 3 heures par jour de façon quotidienne à 4 heures 3 fois par semaine, en milieu médicalisé. « Le traitement peut aussi être fait à domicile après un apprentissage, la difficulté principale étant d’apprendre à ponctionner la fistule artérioveineuse. »

La dialyse péritonéale

Autre technique utilisée : la dialyse péritonéale, qui va utiliser les capacités de filtration du péritoine (membrane entourant les organes de la cavité abdominale et le tube digestif). Cette méthode permet des échanges entre le sang et un liquide appelé dialysat, à l’intérieur du corps. « On va injecter dans l’abdomen 2 litres de ce liquide, qui va se charger progressivement en toxines et qui sera renouvelé au bout de 4 à 6 heures », détaille le néphrologue.
Cette manipulation se fait grâce à un cathéter souple qui aura été placé par un chirurgien deux semaines environ avant le début du traitement. « L’injection peut être faite manuellement ou de façon automatique pendant le sommeil à l’aide d’une machine qui assure les remplissages et les vidanges de l’abdomen. » La dialyse péritonéale peut être gérée à domicile par le patient lui-même ou avec l’aide d’une infirmière.

La fatigue, principal effet secondaire de la dialyse

Le traitement par dialyse est bien toléré. « Il entraîne malgré tout une sensation de fatigue qui est source d’inconfort pour le patient, reconnaît le professeur. Néanmoins, il est possible de continuer à travailler, de faire du sport et même de mener une grossesse à terme tout en étant traité par dialyse », assure le professeur Lobbedez.
L’enquête sur la qualité de vie des patients dialysés révèle toutefois une réduction voire un arrêt total de l’activité professionnelle dès le passage en dialyse. « Leur qualité de vie est fortement impactée, et en dehors d’une prise en charge médicale, il n’existe pas d’accompagnement social spécifique, notamment pour les patients pratiquant la technique au domicile », précise Jan Marc Charrel.
L’espérance de vie des patients sous dialyse dépend des possibilités thérapeutiques et de la prise en charge de leurs pathologies. « Malheureusement, elle est inférieure à celle de la population générale », reconnaît le médecin. En effet, la maladie rénale au stade de la dialyse augmente le risque de maladie cardiovasculaire.

Peut-on arrêter une dialyse ?

Il n’est pas possible d’interrompre un traitement par dialyse. « Mais tout doit être fait pour réduire son impact sur la qualité de vie des patients, assure le professeur Lobbedez. La simplification des dispositifs de dialyse, la diminution de la taille des machines et l’augmentation de la performance des traitements permettent de diminuer le retentissement de la maladie rénale chronique sur la santé des individus. »
Parallèlement, les équipes soignantes travaillent à l’amélioration de l’accès à la greffe rénale, « le seul moyen d’améliorer de façon majeure le devenir des patients ».

Sensibiliser les patients

On estime que 6 millions de personnes ont les reins malades et l’ignorent. Lorsqu’elles s’en rendent compte, il est souvent trop tard et elles doivent envisager un traitement - greffe ou dialyse - en urgence. « Les maladies rénales sont silencieuses car elles ne provoquent pas de symptômes perceptibles, reprend Jan Marc Charrel. Mais en se faisant dépister, il est possible de retarder, voire d’éviter ces pathologies très lourdes. »
C’est dans cette optique que l’association France Rein organise tous les ans, début mars, « la Semaine nationale du rein ». Sa mission : sensibiliser au dépistage précoce en encourageant les patients à faire des examens réguliers auprès de leur médecin généraliste ou à l’hôpital. De nombreux stands d’information et de dépistage sont ainsi installés dans toute la France. Comme une forme d’éducation populaire à la santé…

*Selon les derniers chiffres du REIN (Réseau épidémiologique et information en néphrologie).

Par Peggy Cardin-Changizi

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