Nathalie s’est levée comme d’habitude ce matin. Bien qu’une énorme fatigue rende ses journées plus difficiles. Des douleurs musculaires et articulaires la rongent. Son cœur s’accélère sans raison. Entre deux activités, elle se repose sur le canapé. A l’impression d’être au ralenti. « C’est ainsi depuis cinq mois avec des hauts et des bas », raconte de sa voix éraillée cette infirmière de 34 ans, qui a attrapé le Covid-19 en septembre 2020 sur son lieu de travail.
Nathalie souffre d’une forme légère du virus qui s’aggrave vingt jours après les premiers symptômes alors qu’elle pense être tirée d’affaire. Elle éprouve une forte pression au niveau du cœur. Des douleurs vont apparaître et s’intensifier dans ses articulations, ses muscles. « Des troubles de la concentration et de la mémoire se sont rajoutés. » Ce sont les montagnes russes. « Il y a des jours où c’est si intense, où la fatigue est telle, que je ne peux rien faire. »
Nathalie a dû s’arrêter de travailler dès que son état de santé s’est détérioré. « Mon métier exige que je sois toujours debout. Je reçois entre 50 et 60 patients par jour. Je ne pouvais pas tenir physiquement ni risquer la moindre erreur. » À présent, ses journées sont ponctuées par les soins qu’elle reçoit et les prises de médicaments : kiné, orthophoniste, bétabloquants…
Ce quotidien-là, Dan, musicien de 57 ans, le connaît par cœur. Il a contracté le Covid-19 début mars 2020, avant le premier confinement, lors d’une réunion amicale privée. « Nous étions une vingtaine. Sept d’entre nous ont été contaminés. Un est décédé. Deux ont été admis en réanimation », confie-t-il, encore sous le coup de l’émotion.
À l’époque, on connaît peu la maladie et, à défaut de tests PCR disponibles, Dan se heurte à des incompréhensions et doutes médicaux. Ses symptômes vont traîner, s’accentuer. « J’ai vécu une descente aux enfers jusqu’au mois de juin. Je peinais à respirer, j’avais des douleurs partout, une fatigue jusqu’alors jamais éprouvée. » Pourtant, il se dit « résistant, plutôt actif et positif de nature. »
Certains jours, Dan restait couché des heures entières tant il lui était impossible de tenir debout. « Je n’ai pas voulu l’aide de ma compagne pour pouvoir garder une certaine autonomie. Quand je faisais mes courses, bien souvent le chariot me soutenait. » En juin, Dan ressent une amélioration nette de son état de santé. Mais, mi-octobre, tout reprend de plus belle. « Depuis janvier, c’est variable. Il y a des jours où ça va mieux que d’autres. »
Les séances de kinésie respiratoire lui font du bien. « C’est indiscutable. Et j’ai eu de la chance car ma maladie a été reconnue affection longue durée (ALD). Tous les soins sont couverts par la Sécurité sociale. » Solidaire, Dan a rejoint l’Union pour la prévention et la gestion des crises sanitaire (UPGCS) dans son combat pour que cette possibilité soit offerte à tous les Covid longs sans exception. Dont à Nathalie qui a à sa charge l’ensemble des actes médicaux non remboursés par l’Assurance maladie.
Les Covid long ne sont pas reconnus systématiquement ALD. Et comme l’observe Annie Notelet, présidente de l’UPGCS. « Ces personnes subissent non seulement la maladie mais aussi de forts préjudices économiques et financiers. Elles ne peuvent plus travailler et doivent prendre à leurs frais trop d’actes de soins pourtant vitaux pour leur santé. »
Annie Notelet s’insurge du manque de considération portée aux soignants touchés par le Covid-19 qui ont des symptômes persistants comme Nathalie : « Certes, un décret du 14 septembre 2020 reconnaît le virus comme maladie professionnelle pour les soignants contaminés. »
Toutefois, c’est sous certaines conditions, dont celle d’avoir eu un Covid grave qui a nécessité une oxygénothérapie à l’hôpital ou à domicile. « C’est d’autant plus inadmissible quand se rajoute pour eux un Covid long pas reconnu ALD ! » La présidente de l’UPGCS n’a de cesse d’alerter les gouvernants. « C’est un véritable enjeu économique et de santé publique. On estime que 30 % des malades de Covid-19 sont dans cet état ».
L’OMS a reconnu en août 2020 la persistance de séquelles du Sars-Cov-2. De même que la Haute autorité de Santé qui a publié, le 12 février dernier, les critères de diagnostic et de prise en charge du Covid long à l’adresse des professionnels de santé. Le 17 février, 120 députés ont adopté une proposition visant à reconnaître et prendre en charge les complications à long terme du Covid-19, texte porté entre autres par Patricia Mirallès, députée de l’Hérault, elle-même touchée par un Covid long. Une première étape.