Le long rétablissement des cas graves de Covid-19

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Par Patricia Guipponi

Temps de lecture estimé 5 minute(s)

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© CRM/Le Mag de Mulhouse Alsace Agglomération

Les patients infectés par le coronavirus sont très affaiblis lorsqu’ils sortent de réanimation. Ils sont alors suivis par des équipes pluridisciplinaires de soignants afin de récupérer leur forme physique et mentale. Exemple avec le centre de réadaptation de Mulhouse et le service de rééducation post-réanimation Covid du CHU de Montpellier, qui ont pris en charge nombre d’entre eux.

Chloé Dal Cin, kinésithérapeute, prend son service après avoir revêtu sa tenue médicale de protection : masque, visière, blouse et surblouse, charlotte… Elle se dirige dans l’aile du centre de réadaptation de Mulhouse (CRM), où sont pris en charge les patients guéris de formes graves de Covid-19. Ces derniers sont très diminués par l’infection subie et par leur séjour en réanimation.

Avec sa consœur, Sarah Escot, elle va dispenser des exercices de rééducation adaptés à l’état de santé de chacun d’entre eux. Les deux femmes et l’ensemble de leur équipe pluridisciplinaire sont sur le front depuis le mois de mars 2020. Elles ont souvent travaillé à flux tendus car le Haut-Rhin et la ville de Mulhouse ont été durement touchés par l’épidémie.

Certains patients atteints du Covid-19 ne tenaient plus debout

« Nous voyons arriver des personnes extrêmement affaiblies sur le plan musculaire et respiratoire. Certaines ne tiennent pas debout, ne peuvent plus bouger. Les gestes et les mouvements les plus simples sont une épreuve. D’autres ont perdu la parole », témoigne Sarah Escot. Il a fallu trouver ses marques, adapter son savoir de soignant face à la situation exceptionnelle. « On n’imaginait pas à quel point les gens seraient fragilisés et désorientés, avec autant de fatigue et de difficultés respiratoires persistantes ».

Les conséquences de l’infection au Covid-19 et de la réanimation sont très traumatisantes sur le plan physique et psychologique pour ces personnes, comme l’explique Chloé Dal Cin. « Leur parcours est éprouvant. Certaines, endormies début mars pour les besoins de la réanimation, se sont réveillées à l’hôpital militaire de Mulhouse, dans un monde confiné, isolées de tout, y compris de leurs proches ».

Déperdition musculaire et dénutrition

Les patients sont également suivis sur le plan nutritionnel et orthophonique. « Ils ont subi une énorme déperdition musculaire et sont dénutris ce qui complique leur rééducation », souligne Bérengère Caquelard, diététicienne au Centre de réadaptation de Mulhouse (CRM). « À cause de l’infection, leur corps a brûlé plus d’énergie qu’en temps normal. Et en réanimation, l’inactivité et l’intubation ont encore plus mis à mal leurs réserves ».

La perte de l’odorat et du goût, ajoutée à l’extrême fatigue, compliquent la déglutition et la reprise de l’alimentation classique. « Nos patients sont pour la plupart des personnes de plus de 60 ans. C’est plus difficile de récupérer à ces âges-là », note la diététicienne.

« L’intubation prolongée a pu provoquer des lésions au niveau du larynx, influer sur la possibilité d’avaler liquides et solides », observe Margot Broll, l’orthophoniste de l’équipe. L’alimentation, élaborée dans les cuisines du CRM, est adaptée afin d’éviter de trop mastiquer et de s’épuiser : potages hyperprotéinés, liquides gélifiés, purées… « Les patients se réhabituent en général assez vite. Avaler est un réflexe que l’on accomplit inconsciemment en permanence. À nous de les aider à conscientiser le fait que tout va revenir et qu’il ne faut pas forcer ».

La plupart des patients Covid sont âgés de 55 à 75 ans

La région Occitanie a été moins impactée par le coronavirus que le Grand-Est. Cependant, les établissements de soins ont géré avec le même dévouement les patients les plus touchés par la maladie. Un service de rééducation post-réanimation Covid (SRPR) a été rapidement mis en place au CHU de Montpellier. « On a compris sa nécessité dès que l’on a constaté la longueur des séjours en réanimation », confie le docteur Claire Jourdan, qui supervise l’unité.

Les patients du SRPR présentent à leur arrivée le même profil que ceux pris en charge à Mulhouse. Âgés pour la plupart de 55 à 75 ans, ils ont encore besoin d’oxygène, souffrent de difficultés respiratoires, de troubles de la déglutition. Ils ont accusé une perte de poids importante (16 kg en moyenne). « Certains ont les reins tellement abîmés qu’on doit poursuivre des dialyses en alternance avec la rééducation, le temps qu’ils récupèrent ».

Ces patients ont parfois développé des troubles neurologiques, plus ou moins sérieux selon les cas. « La maladie a affecté leurs fonctions intellectuelles (comme leur concentration, leur mémoire…), la gestion des émotions », poursuit la responsable de médecine physique et de réadaptation.

Séjour de 15 jours à un mois

Les progrès et la récupération de ces patients sont toutefois encourageants. C’est le constat positif observé par les équipes du service de rééducation post-réanimation Covid de Montpellier et du centre de réadaptation de Mulhouse. « Leur séjour chez nous dure une quinzaine de jours en moyenne, 3 à 4 semaines au maximum, selon leurs antécédents et les facteurs de comorbidité qu’ils présentent », souligne la responsable du SRPR. Stabilisés, requinqués, les patients sont alors réorientés vers une autre structure de soins de suite ou retournent chez eux.

À Mulhouse, ils repartent avec un livret d’auto-rééducation remis par les soignants dès leur arrivée. « Cet ensemble de conseils a été pensé pour les accompagner entre les séances qu’ils ont eues à effectuer au centre et pour la suite de leur parcours de santé », explique la kinésithérapeute Chloé Dal Cin. De quoi les épauler dans leur reprise de confiance et d’autonomie et dans leur retour à la vie quotidienne.

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