Maladie d’Alzheimer : diagnostiquer au plus tôt

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Par Patricia Guipponi

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La maladie d’Alzheimer touche près d’un million de personnes en France. Aujourd’hui, aucun médicament ne permet d’en guérir. On peut toutefois agir à un stade précoce de la pathologie pour tenter de ralentir sa progression.

Alzheimer est la plus fréquente des démences constatées chez la personne âgée. Elle touche 23 % de la population après 80 ans et résulte de la dégénérescence des neurones*. Celle-ci est causée par l’accumulation progressive dans le cerveau de deux protéines : beta-amyloïde et tau. Chaque année, 225 000 nouveaux cas sont recensés. « On ne sait pas guérir cette maladie », admet Bruno Dubois**, professeur de neurologie à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris. Aucun médicament n’a montré de réelle efficacité.

Les traitements symptomatiques, « qui opèrent sur les symptômes comme les troubles de mémoire », n’améliorent pas l’état du patient. Ils peuvent, au mieux, ralentir la dégradation ou stabiliser la pathologie. Ils sont, depuis le 1er août 2019, déremboursés par décision du ministère de la Santé, à la suite d’un avis de la Haute Autorité de santé. Quant aux traitements physiopathologiques, ceux qui agissent sur les causes, leurs effets sont peu encourageants. « Le problème est que l’on traite les patients à un stade trop avancé de la maladie », souligne le professeur.

* Selon le Ministère des Solidarités et de la Santé.
** Bruno Dubois est l’auteur du livre Alzheimer, la vérité sur la maladie du siècle, publié aux éditions Grasset.

Des lésions visibles avant que la maladie ne se déclare

De ce fait, l’enjeu actuel de la recherche est d’œuvrer au plus tôt, en amont du déclenchement d’Alzheimer, pour une meilleure efficacité thérapeutique. « Aujourd’hui, on peut visualiser les lésions de concentration de plaques amyloïdes chez des personnes non atteintes. » Ces lésions précèdent la survenue des symptômes de la pathologie neurodégénérative de plusieurs années. De 10 à 20 ans avant son apparition, selon de récentes études, dont celle que Bruno Dubois a menée avec Harald Hampel, professeur à la Sorbonne et à l’Institut du cerveau et de la moelle épinière.

Le neurologue français coordonne aussi l’étude clinique Insight : 320 personnes en bonne santé, mais à risque, sont suivies afin de saisir pourquoi et comment la maladie se déclare chez les unes et pas chez les autres.

Le Dr Thomas Tannou remporte le Prix Harmonie Mutuelle Alzheimer

Depuis dix ans, Harmonie Mutuelle et la Fondation de l’Avenir distinguent la recherche sur la maladie d’Alzheimer. Le 20 septembre dernier, le Prix Harmonie Mutuelle Alzheimer a été remis au docteur Thomas Tannou du CHU de Besançon. Son étude princeps*, « Imagison », analyse la réelle autonomie d’un malade d’Alzheimer et sa capacité à décider de son lieu de vie, facteur majeur dans l’évolution de la pathologie. L’étude, lancée en 2020, va concerner 58 personnes et leurs aidants respectifs. Des entretiens multidisciplinaires permettront de définir le lieu de vie qui leur convient le mieux.

* Se dit d’une étude qui sert de référence.

Le bienfait des activités de stimulation cognitive et multisensorielle

Les activités de stimulation cognitive et multisensorielle peuvent ralentir la progression d’Alzheimer et améliorer le quotidien du malade et de ses proches. La musicothérapie en est la parfaite illustration. Elle canalise l’agitation, les humeurs. La pratique de la cuisine comme celle de la danse, pour ne citer qu’elles, montrent aussi des résultats encourageants.

Psychiatre à l’hôpital de gériatrie Émile-Roux dans le Val-de-Marne, Véronique Lefebvre des Noëttes* a développé très tôt dans ses services les ateliers de stimulation cognitive. « Leur impact positif sur la neuroplasticité, c’est-à-dire sur la dynamique du cerveau, est scientifiquement démontré. » La spécialiste martèle qu’il faut se rendre dans les consultations mémoire dès qu’un doute s’installe : « On bénéficie d’un bon maillage de dispositifs en France ».

Se faire dépister ne veut pas dire que l’on court le risque d’avoir Alzheimer. « L’image véhiculée fait peur. Il faut dédramatiser, s’informer pour comprendre. » La praticienne préconise des règles saines à appliquer afin de se maintenir en forme et de faire reculer la prédominance de la maladie : une bonne alimentation, une vie sociale active, de l’activité physique. Ne pas laisser son cerveau en jachère, mais le solliciter, sans toutefois le surstimuler, ne serait-ce que par des activités simples qui font plaisir, comme le jardinage, le bricolage, la lecture.

* Véronique Lefebvre des Noëttes est l’auteur de Que faire face à Alzheimer ?, publié aux éditions du Rocher.

Accompagnement : l’état des lieux des dispositifs

Des dispositifs de diagnostic et d’accompagnement du malade et de ses proches ont vu le jour sur le territoire français grâce aux plans Alzheimer successifs et à l’impulsion des associations. « Il y a 30 ans, c’était le désert. France Alzheimer a initié les groupes de parole et de soutien pour les aidants », explique Judith Mollard-Palacios, psychologue.

Le territoire dispose notamment de 563 lieux de diagnostics mémoire hospitaliers, dont 443 consultations mémoire labellisées*. On compte 171 structures d’accompagnement et de répit, 1 749 accueils de jours équivalant à 14 517 places. Dans les 3 550 Ehpad et Unités de soins longue durée, disposant d’une unité spécifique, 79 400 places d’hébergement sont réservées aux malades d’Alzheimer.

* Source : Fondation Médéric Alzheimer.

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