Quand l’hypnose soulage la douleur

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Par Propos recueillis par Cécile Fratellini

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Depuis une dizaine d’années, le traitement de la douleur par l’hypnose se développe. Pour quelles douleurs ? Comment ? En combien de temps ? Réponses avec le Dr Bruno Dubos, psychiatre à Rennes formé à l’hypnose.

Comment l’hypnose peut soulager la douleur ?

Bruno Dubos : L’hypnose peut soigner les douleurs aiguës et chroniques. Mais ce ne sont pas les mêmes approches et les mêmes stratégies thérapeutiques. Dans le processus de la douleur aiguë, il y a la douleur ressentie et la charge émotionnelle qui va avec. Le travail avec l’hypnose va donc agir sur les deux niveaux. Tout d’abord au niveau sensoriel. On a tous la capacité, accompagné par un thérapeute, de modifier nos perceptions sensorielles d’une façon extrêmement importante. Et ensuite au niveau émotionnel, le thérapeute va aider le sujet à se souvenir d’expériences positives, en s’appuyant notamment sur ses apprentissages. On utilise l’hypnose sur des interventions de plusieurs minutes voire plusieurs heures.

Où trouver un praticien en hypnose ?

Les coordonnées de professionnels de santé ayant été formés à l’hypnose dans un institut référencé sont disponibles dans cet annuaire.

Qu’en est-il pour la douleur chronique ?

B.D. : C’est différent. Car une douleur chronique, c’est un processus douloureux qui a été aigu mais qui dure. Et à partir du moment où il dure, il va induire des modifications dans la perception que les gens ont d’eux-mêmes. On ne se perçoit plus de la même façon quand on est en permanence habité par une douleur. Celle-ci va induire des modifications émotionnelles, relationnelles, comportementales qui vont prendre de plus en plus de place dans la vie du sujet et de son entourage. On est donc cette fois sur des prises en charge de l’ordre de la psychothérapie avec l’hypnose : travail sur les signaux douloureux et les impacts émotionnels et psychologiques. Plusieurs séances sont nécessaires pendant 6 à 8 mois environ.

Dans quels domaines l’utilise-t-on ?

B.D. : L’hypnose peut être utilisée pour des interventions chirurgicales, pour des examens comme la coloscopie… Pour la douleur aiguë, certaines équipes en intervention de SAMU pratiquent l’hypnose pour aider les gens à supporter des désincarcérations par exemple. Des urgentistes s’en servent pour poser des perfusions.

Dans le domaine de l’obstétrique, les sages-femmes sont de plus en plus formées à cette technique pour la préparation à l’accouchement notamment. En pédiatrie, l’hypnose fonctionne également : pour la « petite chirurgie », les enfants ne sont plus endormis.

L’hypnose n’est pas réservée aux psychologues et aux psychiatres. Les professionnels de santé se sont appropriés cet outil-là. Ils en ont très vite vu les avantages. Ils sont formés de manière conséquente (entre un et deux ans). L’hypnose nécessite un savoir-faire et un savoir-être qui a besoin d’être expérimenté et travaillé.

Quels sont les avantages de l’hypnose ?

B.D. : L’hypnose limite et réduit la consommation médicamenteuse. Sur des petites interventions chirurgicales, l’anesthésie générale est remplacée par l’anesthésie locale associée à l’hypnose ou juste par l’hypnose.

Il y a une vingtaine d’années, l’utilisation de l’hypnose était confidentielle. C’est de moins en moins le cas. L’hypnose est revenue dans le grand public par le traitement de la douleur. Beaucoup de familles et de patients en ont entendu parler et c’est donc beaucoup plus naturel.

Le deuxième intérêt de cette technique est que le fonctionnement biologique du corps reste le même qu’à l’éveil. Ce qui n’est pas le cas lors d’une anesthésie générale. Les phénomènes de défense restent réactifs, donc les risques d’infection sont moindres ainsi que les risques hémorragiques. Les temps d’hospitalisation sont diminués de manière significative.

Et enfin, au niveau psychologique, l’intérêt est majeur. Car c’est une expérience qui renforce. Quand on a pu contrôler sa douleur sans anesthésie générale, il en ressort un vécu très positif.

Toutes les personnes sont-elles réceptives à l’hypnose ?

B.D. : De l’enfant à la personne âgée, tout le monde réagit, ce n’est pas une question d’âge.
Mais cela dépend des méthodes hypnotiques. En majorité, on utilise la méthode Ericksonienne qui est une façon d’aider les gens à contacter un état hypnotique de manière très indirecte. Les résistances sont de l’ordre de 5 à 10 %. Dans des méthodes plus directes comme celles utilisées dans l’hypnose de spectacle, 75 % des sujets ne répondent pas aux inductions hypnotiques.

L’autohypnose est-elle efficace ?

B.D. : L’autohypnose a un intérêt dans le contrôle de la douleur. Car les gens apprennent ainsi à gérer et contrôler leur état. Mais elle ne permet pas de répondre efficacement aux enjeux émotionnels et relationnels qui accompagnent la douleur. L’autohypnose permet à l’individu de mieux gérer au quotidien sa douleur mais il ne la soignera pas uniquement avec cela. Le volet psychologique nécessite un accompagnement.

Par Propos recueillis par Cécile Fratellini

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