« C’était en CP, au mois de décembre. Ses difficultés de lecture m’ont interpellée. Sans forcément m’attendre à ce qu’il soit lecteur à ce stade de l’année, il me semblait que quelque chose ne « collait » pas dans le fonctionnement de Paul à l’égard de la lecture. Sans que je sois pour autant en mesure de mettre des mots sur ses difficultés ». Comme dans le cas de Paul, 8 ans, le fils d’Aurélie (*), qui vit à Nantes, ce sont souvent des difficultés scolaires qui sont à l’origine d’un diagnostic de « troubles dys ».
Ces troubles, on en parle de plus en plus sans forcément bien les connaître. Ils se manifestent par des difficultés importantes et durables à manier la lecture (dyslexie), la langue parlée (dysphasie), les opérations mathématiques (dyscalculie) ou bien les gestes de motricité fine (dyspraxie).
Le docteur Alain Pouhet, médecin en rééducation fonctionnelle, explique dans son livre Questions sur les dys- des réponses (Ed Tom Pousse) que les troubles dys sont « des pathologies neurologiques cognitives de développement, stables et spécifiques, à début précoce ». Autrement dit, ils sont liés à des anomalies de certaines connexions du cerveau, dont l’origine serait génétique. « Les troubles dys sont présents dès la naissance et même avant lors de la formation du cerveau, souligne le médecin, mais c’est bien souvent dans le contexte de l’école que sont repérés les premiers signes ».
Les troubles dys peuvent passer pendant des années pour de simples difficultés d’apprentissage, un comportement chahuteur, un élève que l’on étiquette « inattentionné, maladroit, dans la lune… Pas évident à repérer, même pour les enseignants. « C’est d’autant plus difficile que Paul s’exprime très bien et a de bonnes facultés de raisonnement, se désole Aurélie. L’écart entre ses contributions à l’oral et à l’écrit est inexplicable pour quelqu’un qui ne connaît ou reconnaît pas ce handicap ».
Alors comment faire la différence ? Si, malgré la mise en place d’aides classiques, les difficultés de l’enfant persistent, voire que l’écart se creuse avec le niveau moyen, il est utile de proposer un bilan de dépistage. Ce premier bilan peut être réalisé par un médecin scolaire, un centre de PMI (protection maternelle et infantile), un pédiatre ou encore un généraliste, même si les associations de parents recommandent de se tourner vers des « centres de référence » qui existent dans les CHU de plusieurs régions. « D’abord, on exclut les problèmes d’audition, de vue, une éventuelle déficience intellectuelle… » pour écarter d’autres possibilités, explique Sandrine Mularoni, vice-présidente de la fédération Dyspraxique mais fantastique, et mère d’un garçon diagnostiqué dyspraxique en 2010.
Ensuite, l’enfant est orienté vers un bilan pluridisciplinaire qui fait intervenir psychomotricien, orthophoniste, neuropsychologue, ergothérapeute, et même neuropédiatre, avant de pouvoir poser un diagnostic. Une période longue, douloureuse parfois pour les parents qui avancent en terre inconnue, mais parfois, aussi, un soulagement. Aurélie se souvient de la conclusion posée par une orthophoniste pour Paul : « trouble avéré et sérieux de l’apprentissage de la langue écrite » et dyscalculie. « Pas une surprise : cela n’a fait que mettre un mot sur une réalité que nous avions constatée depuis quelques mois. Pour autant ce fut un coup de massue qui nous a fait craindre que son parcours scolaire soit compromis ».
Car les troubles dys posent en effet un vrai handicap – ils peuvent d’ailleurs être reconnus comme tels par les Maisons départementales des personnes handicapées. « On naît dys- et on le reste toute sa vie, souligne le docteur Pouhet dans son livre. Pourtant, les élèves dys- progressent » avec les aménagements nécessaires. Pas de remède miracle ou de formule magique, il faut pour l’enseignant et les parents s’adapter au cas individuel.
Ces enfants peuvent poursuivre une scolarité ordinaire avec, d’une part, des rééducations (orthophonie, ergothérapie) et d’autre part des adaptations pédagogiques. Sandrine Mularoni cite par exemple l’utilisation d’un ordinateur en classe pour aider un enfant dyspraxique à écrire, l’agrandissement de supports de cours pour qu’il soit lisible par un enfant dyslexique, ou tout simplement la reformulation des consignes par l’enseignant. Son association propose de nombreuses ressources, matérielles et théoriques, en ligne pour les parents et insiste sur le soutien apporté par les familles concernées aux autres parents.
On pourrait encore mieux faire, souligne-t-elle pourtant, en évoquant les difficultés pour se procurer des livres adaptés aux dys « Si des manuels scolaires sont adaptés par les éditeurs, pour les romans par exemple c’est loin d’être le cas et on aimerait une exception aux droits d’auteur pour le faire ». Autre cheval de bataille des associations de parents : l’inégalité dans le parcours de soin selon les régions, et la formation des enseignants et des médecins scolaires à ces troubles qui mettent encore trop de temps à être diagnostiqués.
Pour retrouver l’association la plus proche de votre domicile, rendez-vous sur le site de la fédération française des dys
Les troubles dys de l’enfant expliqués dans le guide pratique pour les parents de l’INPES – Santé Publique France
Le cartable fantastique est une association qui facilite la scolarité des enfants en situation de handicap et plus particulièrement les enfants dyspraxiques.
Pour mieux connaître la dyspraxie, retrouvez l’association Dyspraxique mais fantastique.
(*) Les prénoms ont été modifiés.