Vrai/faux sur l’obésité

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Par Patricia Guipponi

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L’obésité concerne 17 % d’adultes et 4 % d’enfants. Complexe, mal connue, elle est associée à des préjugés et des stigmatisations très pénalisantes pour les personnes qui en souffrent. On démêle le vrai du faux.

L’obésité est une maladie. 

Vrai et faux. « On considère que l’obésité est une maladie lorsqu’elle est associée à des pathologies comme le diabète, l’apnée du sommeil ou encore l’hypertension et que le patient en souffre. Mais chez des personnes qui n’ont pas de comorbidités liées à l’obésité, on ne parle pas forcément de maladie. Si elles vivent très bien leur poids sans éprouver de difficultés, on ne peut pas les qualifier de malades ni les obliger à suivre des traitements. C’est en cela que le regard des sociologues sur ce thème apporte un éclairage intéressant.

Par ailleurs, l’obésité métaboliquement saine (1) existe », indique le docteur Sandrine Coumes, médecin nutritionniste, gastro-entérologue, coordinatrice médicale du Centre spécialisé de l’obésité (CSO) Grenoble-Arc Alpin au CHU de Grenoble-Alpes.

Être en surpoids et obèse, c’est la même chose. 

Faux. Bien que le surpoids et l’obésité se définissent par une accumulation anormale ou excessive de graisse, qui peut nuire à la santé, ce n’est pas la même chose sur le plan médical. « La différence entre les deux se calcule par l’indice de masse corporelle (IMC), qui est le rapport poids sur taille. Quand l’IMC est entre 25 et 30, on considère que c’est une situation de surpoids. Si l’IMC est supérieur ou égal à 30, on entre dans l’obésité », précise la nutritionniste.

Le surpoids conduit inévitablement à l’obésité. 

Faux. « Certaines personnes vont rester en surpoids et ne basculeront jamais dans les critères de masse corporelle liés à l’obésité », observe le docteur Sandrine Coumes. Rien n’est en effet systématique bien que l’Assurance maladie précise qu’un surpoids ou une obésité constatée dès l’enfance comporte le risque de développer une obésité à l’âge adulte.

La sédentarité peut amener à l’obésité. 

Vrai. Lorsque les calories sont moins dépensées, cela peut effectivement conduire au surpoids et à l’obésité. « Il est donc recommandé à tout un chacun de bouger. L’activité physique régulière permet de conserver un bon état de santé », commente la praticienne. Selon une étude menée en 2017 par l’Inserm sur 800 enfants, le temps passé à jouer en plein air ou à regarder la télévision pendant la petite enfance est déjà prédictif du risque d’obésité ultérieur.

Plus les garçons passent de temps devant des écrans à 2 ans, plus ils ont un pourcentage de masse grasse corporelle élevé à 5 ans. Chez les filles, ce sont celles qui passent le moins de temps à jouer en plein air à 2 ans qui présentent un risque accru de développement de la masse grasse.

L’obésité n’est pas qu’un déséquilibre alimentaire. 

Vrai. Certaines personnes sont en situation d’obésité mais ont une alimentation équilibrée. « L’obésité est plurifactorielle. Elle peut être liée à une prédisposition génétique, des facteurs environnementaux (conditions sociales, sédentarité…), des évènements de vie difficiles et particuliers, tel qu’un décès, qui vont conduire à manger différemment… », précise la nutritionniste. L’Assurance maladie indique que les principales causes de l’obésité sont l’évolution profonde des rythmes de vie, de l’alimentation et la réduction importante de l’activité physique.

Les personnes obèses sont des personnes pauvres. 

Faux. Les personnes en situation d’obésité se trouvent dans toutes les couches de la société. « C’est donc plutôt faux de dire que cela ne touche que les personnes en situation de précarité bien que l’obésité soit plus forte dans les milieux socio-économiques plus défavorisés », observe le docteur Sandrine Coumes. Selon l’Observatoire des inégalités, tous les milieux sociaux ont connu une hausse de la proportion d’adultes obèses en 20 ans (2000-2020). Elle est toutefois moins importante chez les cadres supérieurs que chez les employés et chez les ouvriers.

Les personnes obèses manquent de volonté. 

Faux. « C’est un préjugé contre lequel il faut lutter. En général lorsqu’un patient consulte le centre spécialisé de l’obésité dont je suis la coordinatrice médicale, il a déjà tenté maintes choses, de l’activité physique aux régimes. Et beaucoup font preuve d’une détermination et d’un grand courage », affirme le médecin. Une récente étude menée par des chercheurs français de l'université Sorbonne-Paris Nord, conduite auprès d'une cohorte de près de 34 000 adultes, a révélé que 45 % d’entre eux considèrent que l'obésité est due à un manque de volonté.

Les régimes ne règlent pas l’obésité. 

Vrai. La grande restriction liée aux régimes fait que le poids perdu ait souvent repris (effet yo-yo). « Travailler sur sa façon de manger, sur son rapport avec l’activité physique ou encore sur les liens entre l’alimentation et les émotions sera bien plus pertinent et sain qu’un régime », souligne le docteur Coumes.

La chirurgie bariatrique est la solution la plus efficace pour régler l’obésité.

Vrai et faux. C’est avec la chirurgie que l’on obtient les plus grandes pertes d’excès de poids. Cependant cet acte doit être bien réfléchi. « Il faut savoir qu’on ne peut pas l’imposer à un patient qui ne le souhaite pas. Cela reste son choix. En février 2024, la Haute Autorité de santé a redéfini les critères pour bénéficier de la chirurgie bariatrique, traitement de seconde intention (2) de l’obésité », commente la nutritionniste du CSO Grenoble-Arc Alpin. 

La Haute Autorité de santé précise que la chirurgie bariatrique concerne les patients dont l’indice de masse corporelle (IMC) est supérieur ou égal à 40 kg/m2, ou supérieur ou égal à 35 kg/m2 associé à au moins une comorbidité susceptible d’être améliorée après la chirurgie. 

Le patient doit être clairement informé des techniques existantes, de leurs avantages et de leurs inconvénients. Il doit aussi connaître les conséquences et les complications possibles de l’acte chirurgical et la nécessité de s’engager dans un suivi médical préopératoire et post-opératoire tout au long de la vie.

L’obésité est une maladie qui se soigne mais ne se guérit pas. 

Vrai et faux. « Tout dépend si l’on considère que c’est une maladie ou pas. Les personnes obèses qui n’ont pas de problèmes de santé et n’éprouvent pas de soucis avec leur poids ne ressentiront pas le besoin d’aller vers un soignant. Certains patients, qui ont fait le choix d’une prise en charge en chirurgie bariatrique ou qui peuvent bénéficier des traitements médicamenteux de l’obésité, ont une belle perte de poids, parfois avec rémission du diabète ou de l’hypertension.

Toutefois, certains se perçoivent encore obèses malgré cela. C’est pourquoi il est important de les accompagner durant cette période », soutient le docteur Coumes.

(1) L’obésité est pourvoyeuse de nombreuses anomalies métaboliques et vasculaires. Lorsque des personnes obèses sont indemnes de ces complications, on parle d’obésité métaboliquement saine. 
(2) C’est-à-dire après l’échec d’un traitement médical, nutritionnel, diététique et psychothérapeutique bien conduit pendant 6 à 12 mois. 
 

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