Emploi : regardez leur talent, pas leur handicap

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Par Propos recueillis par Angélique Pineau-Hamaguchi

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Chacun dans leur métier, ils sont reconnus pour leurs compétences, leur savoir-faire. Et malgré les obstacles, ils ont réussi à s’épanouir professionnellement. Ils nous racontent leur histoire.

Grégory Cuilleron : « Je me suis toujours adapté à la situation »

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Crédit photo : Astrid di Crollalanza.

Il est né sans main gauche. Ce qui ne l’empêche pas de manier casseroles et couteaux avec dextérité. D’ailleurs, Grégory Cuilleron*, cuisinier et restaurateur, ne s’est jamais vraiment senti « handicapé ».

« Pour moi, le handicap, c’est juste une inaptitude par rapport à une situation donnée. On n’est pas handicapé pour tout et on peut tous l’être à un moment ou un autre. Si vous mettez mon père devant un ordinateur, par exemple !

Je suis né avec une main en moins mais dans ma famille, avec mes amis, cela n’a jamais été un problème. Et pour moi, c’est “normal”. Donc, je me suis toujours adapté à la situation. Il y a une dizaine d’années, quand j’ai commencé à participer à des émissions de cuisine, les gens m’ont vu comme une personne en situation de handicap. En gros, je suis devenu handicapé à 27 ans !

J’ai alors été sollicité pour m’investir aux côtés d’associations. J’ai pris le temps d’y réfléchir. Et en 2011, j’ai accepté de devenir ambassadeur de l’Agefiph**, après l’humoriste Jamel Debbouze. Pendant sept ans, je suis allé dans les entreprises, dans les associations, j’ai rencontré des personnes ayant d’autres handicaps que le mien. Et c’était très enrichissant. J’aime aller dans les écoles aussi, car les enfants sont sans filtre. Ils vous posent toutes les questions qui leur passent par la tête ! »

* Son autobiographie, La vie à pleine main, est sortie en mars (avec Alexis Jenni, éditions Albin Michel).

Théo Curin : « Dans l’eau, je me sens comme tout le monde »

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Crédit photo : Nicolas Gotz / Vélobs.

À l’âge de 6 ans, il a dû être amputé des quatre membres à la suite d’une méningite. De sa différence, Théo Curin a tiré une force. À 20 ans, il est déjà double vice-champion du monde de natation handisport.

« Après mon amputation, je ne pouvais plus rien faire comme avant : manger, me lever, me brosser les dents. Il a fallu tout réapprendre pas à pas, comme si une nouvelle vie commençait.

À cette époque, ma mère a lu la biographie de Philippe Croizon. Il y raconte comment il a pu se reconstruire après son accident. Et elle lui a demandé s’il voulait bien me rencontrer. On s’est vus pendant l’un de ses entraînements, avant sa traversée de la Manche. Il m’a proposé de le rejoindre dans la piscine mais j’avais très peur de l’eau ! Et je me suis vraiment senti frustré.

En rentrant à la maison, j’ai décidé de m’inscrire dans un club handisport, pour me prouver que j’en étais capable. Rapidement, après mes premières longueurs, j’ai commencé à apprécier cet élément. Puis je me suis fixé des objectifs et la compétition m’a plu. Dans l’eau, je me sens comme tout le monde. Je suis moi, tout simplement. J’ai une sensation de liberté, de légèreté.

Mon sport m’a beaucoup apporté. Un accomplissement personnel et une reconnaissance qui m’a ouvert d’autres portes. Depuis septembre, je présente une chronique mensuelle sur la résilience par le sport au Magazine de la Santé, sur France 5, et je suis devenu égérie d’une marque de cosmétiques. Je m’éclate ! »

Rachel : « J’ai toujours pu travailler en compensant par d’autres compétences »

Ludothécaire et malentendante, Rachel est une lectrice d’Essentiel Santé Magazine qui habite dans le Rhône. Elle nous a envoyé son témoignage.

« J’ai une perte auditive de plus de 95 %. J’ai fait des études universitaires sans difficulté, même si je n’étais pas appareillée à ce moment-là. L’appareillage est venu à 25 ans, avec l’entrée dans la vie professionnelle. L’acceptation d’appareils auditifs n’est pas chose aisée à cette période de la vie. Mais j’ai toujours pu travailler en compensant par d’autres compétences. J’ai eu un parcours dans l’animation puis j’ai souhaité être ludothécaire.

Pour pouvoir monter un projet qui me corresponde pleinement, j’ai créé l’association Ludicité avec l’idée de rendre le jeu accessible à tous. Elle est installée à Villeurbanne au sein d’une maison des initiatives qui a la volonté d’intégrer tous les publics avec des valeurs d’échange. Au sein de cette maison se trouve un fablab/tactilab qui me permet d’adapter des jeux. J’interviens également dans des foyers de vie.

L’association commence vraiment à se développer. J’en suis ravie et j’ai l’impression d’être à ma place, pleinement épanouie professionnellement. »

POINT DE VUE

« Le travail aide à avoir une place dans la société »

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Crédit photo : DR LADAPT.

Anne Festa est directrice associative et développement de LADAPT. Cette association accompagne les personnes en situation de handicap, notamment vers l’emploi. Elle gère des établissements et services d’accompagnement, de formation, d’insertion, de scolarisation ou de soins en France.

« Pour les personnes en situation de handicap, trouver un emploi ne va pas de soi. Elles sont deux fois plus touchées par le chômage que le reste de la population. Pourtant, on le sait, le travail aide à avoir une place dans la société. Malgré tout, la situation n’est pas désespérée. Les choses bougent. De plus en plus d’entreprises souhaitent intégrer des personnes en situation de handicap dans leurs effectifs. Parce qu’elles en voient les bénéfices pour tous leurs collaborateurs. »

Par Propos recueillis par Angélique Pineau-Hamaguchi

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