La Louve, premier supermarché coopératif et participatif de Paris

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Par Delphine Delarue (ANPM-FRANCE MUTUALITÉ

Temps de lecture estimé 4 minute(s)

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© Roxanne Sévigny

Situé dans le 18e arrondissement de Paris, le supermarché La Louve propose une alimentation de qualité à prix réduits. Ici, pas de clients mais des coopérateurs, qui participent à la fois au financement, à la gouvernance et au fonctionnement du magasin.

En passant la porte de La Louve, premier supermarché coopératif et participatif de Paris, on est d’abord frappé par l’ambiance. Ici, pas de panneaux publicitaires agressifs, pas de promo choc en tête de gondole ni de musique improbable en fond sonore. Sur les visages, on ne lit ni agacement ni impatience. Les gens sont souriants, détendus et font leurs courses avec plaisir. Et pour cause : ils sont chez eux.

Pour remplir son cabas dans ce magasin, « il faut d’abord devenir membre de la coopérative (propriétaire et gestionnaire des lieux, N.D.L.R.), explique Tom Booth, cofondateur de La Louve avec Brian Horian. Pour cela, on en achète dix parts, soit 100 euros. Les bénéficiaires de minimas sociaux peuvent n’acquérir qu’une seule part, c’est-à-dire 10 euros. Ces sommes sont remboursables si l’on souhaite se retirer. »

Ce modèle s’inscrit dans la tradition des coopératives de consommateurs du XIXe siècle. Et il s’inspire plus particulièrement du fameux Park Slope Food Coop, créé en 1973 à New York. Ce sont tout simplement les coopérateurs qui détiennent le capital. Ils sont donc copropriétaires et participent à la fois au financement, à la gouvernance et au fonctionnement du supermarché. Chaque coopérateur, peu importe le nombre de parts qu’il détient, bénéficie d’une voix. Deux fois par mois lors des assemblées générales, les membres décident ensemble des actions à mener.

Donner trois heures de son temps chaque mois

En plus de l’achat de parts, « les coopérateurs s’engagent aussi à donner, chaque mois, trois heures de leur temps au magasin, précise Rémi, coordonnateur d’équipe. Les tâches sont très variées. Cela peut être de la réception de livraisons, du réassort, vous pouvez être à la caisse, peser des légumes, du vrac ou encore faire du ménage. » Ce qui pourrait être perçu comme une contrainte dans un quotidien de Parisien surbooké prend ici un autre sens. « Ces trois heures, c’est aussi l’occasion de rencontrer des tas de personnes d’horizons différents : des étudiants, des retraités, des architectes, des informaticiens, des assistants sociaux… On partage quelque chose. Ça crée du lien social entre des gens qui ne se seraient jamais croisés ailleurs », confie Catherine, coopératrice depuis trois ans.

Ce modèle d’autogestion permet aussi de limiter la masse salariale (il n’y a que dix salariés à La Louve, chargés essentiellement de l’administratif et des achats) et, grâce à l’absence de frais de marketing et d’actionnaires à rémunérer, de pratiquer des prix raisonnables. 15 à 40 % plus bas que dans les autres circuits de distribution pour des produits équivalents.

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La participation de chacun aux tâches du supermarché permet à des gens différents de se rencontrer. Ce qui crée du lien social dans le quartier. Crédit photo : Delphine Delarue.

Ici, on choisit ce que l’on met dans son assiette

Comme dans la plupart des supermarchés, on trouve de tout dans les 1 450 mètres carrés de La Louve : de l’alimentaire mais aussi des produits d’hygiène et d’entretien. Au total, plus de 5 000 références choisies par les coopérateurs selon des critères qui les rassemblent : l’impact écologique, la proximité de production, son caractère équitable, le goût, le tarif et la nécessité de répondre aux besoins des habitants du quartier.

« Ici, on choisit et on sait ce qu’on met dans son assiette ! », sourit Catherine. « Environ 80 % de nos produits sont bio, ajoute Tom, mais on trouve aussi les mêmes produits conventionnels que dans la grande distribution. Notre idée, c’est d’être ouvert à tous et de satisfaire l’ensemble de nos membres. Tout le monde n’entre pas spontanément dans un magasin 100 % bio. Pour la plupart des gens, c’est synonyme de produits chers. Chez nous, comme on propose de tout, du bio, du non-bio et aussi du halal à des prix raisonnables, chacun peut venir et faire ses choix sur place. »

Un esprit à la fois solidaire, coopératif et participatif qui fait des émules. Des initiatives similaires voient le jour à Lille, Nantes, Montpellier ou Bordeaux. Toutes espèrent sans doute la même réussite que leur grande sœur. Près de deux ans après son ouverture, La Louve a atteint l’équilibre et était même rentable en 2018. Elle rassemble aujourd’hui 5 000 coopérateurs, tous réunis par la volonté de bien manger sans se ruiner.

Par Delphine Delarue (ANPM-FRANCE MUTUALITÉ

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