SuperQuinquin à Lille : «le supermarché dont tu es le héros»

Publié le

Par Angélique Pineau

Temps de lecture estimé 5 minute(s)

Illustration
© Angélique Pineau (et vidéo)

Installé dans un quartier populaire de Lille, SuperQuinquin est un supermarché coopératif et participatif. Notre reportage à découvrir aussi en vidéo.

SuperQuinquin est ce qu’on appelle un supermarché coopératif et participatif. Concrètement ? Ses clients sont les patrons, mais aussi les « employés » du magasin : ils doivent y travailler bénévolement. C’est le principe même de ces supermarchés autogérés et à but non lucratif qui débarquent en France.

SuperQuinquin a ouvert ses portes le 1er avril 2017, au sein de Lille-Fives, un quartier populaire de la ville. Depuis, son slogan s’affiche fièrement sur la devanture : « Le supermarché dont tu es le héros ». Son nom, quant à lui, fait référence à la célèbre berceuse ch’ti : « le P'tit Quinquin ». Un véritable emblème à Lille. Mais cet enfant-là n’est pas prêt à s’endormir. Il arbore une cape et tient son caddy, bien décidé à arpenter les rayons et à peser sur les choix du magasin. Un logo qui illustre parfaitement le concept du lieu.

Une alternative à la grande distribution

L’idée a germé, fin 2014, dans la tête de trois personnes : Geneviève Sevrin, Ghislain de Muynck et Nicolas Philippe. Quinquagénaire, quadragénaire et trentenaire, tous les trois ont été inspirés par le projet de La Louve, à Paris. Le premier supermarché coopératif et participatif français. Les trois Nordistes, sensibles aux valeurs de l’économie sociale et solidaire, avaient eux aussi envie de créer un supermarché qui fasse « du bien à l’environnement, à la santé et au porte-monnaie ». Avec l’ambition de proposer « une vraie alternative à la grande distribution », se rappelle Geneviève Sevrin, aujourd’hui présidente de la coopérative.

« Notre supermarché est différent car il appartient à ses clients. Tout le monde ne peut pas y faire ses courses. Il faut être coopérateur pour cela et présenter sa carte à l’entrée. C’est un statut qui donne à la fois des droits et des devoirs. »

Pour devenir coopérateur, c’est-à-dire copropriétaire de SuperQuinquin, il faut acheter des parts sociales. Ce ticket d’entrée, qui s’élève à 100 euros, est payé une fois pour toutes. Mais il est possible de le récupérer si l’on souhaite un jour quitter le projet. Les trois fondateurs ont également souhaité proposer un tarif préférentiel de 10 euros pour les étudiants et les bénéficiaires de minima sociaux.

« On tient à une certaine mixité sociale. C’est aussi pour cette raison que l’on a choisi de s’installer dans un quartier populaire. L’idée, ce n’est pas d’être un magasin de "bobos", mais bien d’être accessible au plus grand nombre. »

Donner trois heures de son temps chaque mois

Autre devoir des coopérateurs : ils doivent assurer un service bénévole de trois heures consécutives toutes les quatre semaines. Équipés de leur tablier vert fluo, ils effectuent toutes les tâches nécessaires au bon fonctionnement du supermarché. De la réception des commandes à la tenue de la caisse, en passant par la mise en rayons. Avec la marge réduite à 20 %, c’est ce qui permet de faire baisser le coût des produits (vendus jusqu’à 40 % moins cher). Ici, on privilégie la qualité, avec notamment des circuits courts et du bio, même si on ne s’interdit pas de vendre des produits « conventionnels ».

Et visiblement, l’obligation de mettre la main à la pâte ne semble pas freiner les bonnes volontés. Bien au contraire. Antoine n’hésite pas à faire un détour à vélo, depuis son travail, pour venir à SuperQuinquin. Son service bénévole, c’est le jeudi soir, de 18 heures à 21 heures. Il a choisi ce créneau car, ce jour-là, sa femme aussi termine tard.

« Donner trois heures par mois, ce n’est rien du tout, je pourrai donner plus. Ce n’est vraiment pas une gêne, c’est un plaisir. J’ai même participé aux travaux dans le magasin. »

Reprendre son alimentation en main

À l’ouverture du supermarché, ils étaient 500 coopérateurs. Moins d'un an plus tard, ils sont plus de 1000. Et chaque semaine, de nouvelles personnes franchissent la porte du 15 rue du Prieuré pour venir grossir les rangs des « SuperQuinquin ». Des habitants de toute l’agglomération lilloise. Marie-Noëlle, qui vit à Roubaix, est présente depuis le début de l’aventure.

« Ce qui m’a plu, c’est le côté participatif : on est tous acteurs de notre supermarché. On peut avoir un impact sur le choix des produits mis en vente, connaître le vrai prix des choses et savoir comment sont rémunérés les producteurs. »

Car être coopérateur, c’est aussi pouvoir donner son avis et participer à toutes les décisions importantes. Chacun d’entre eux comptant pour une voix à l’assemblée générale. Comme Marie-Noëlle, David a tout de suite été séduit par le concept. Il y a vu une façon d’améliorer l’alimentation de toute sa famille et de devenir un peu plus que « consommateur ».

« SuperQuinquin, c’est la reprise en main par le citoyen de sa destinée alimentaire. C’est la base de tout : savoir ce que l’on mange, d’où ça vient et comment ça a été fait. On est dans la démocratie participative à 100 %. »

SuperQuinquin voit plus grand

Le supermarché est encore en phase de test, jusqu’au mois de septembre. Mais après seulement quelques mois d’existence, les ambitions ne manquent pas. Le local (une ancienne menuiserie) pourrait rapidement s’avérer trop petit. SuperQuinquin espère donc pouvoir intégrer un projet de réaménagement d’une friche industrielle à quelques pas de là, dans le même quartier. Ce qui lui permettrait de passer de 300 à 1 000 m2 et d’augmenter sa capacité de stockage. Car la gamme de produits s’étoffe elle aussi peu à peu : de 300 références au lancement, le magasin en compte déjà plus de 1 100.

Quant aux coopérateurs (bénévoles), ils sont accompagnés dans leurs tâches par deux salariés, aujourd’hui à temps partiel. Ces derniers s’occupent notamment du suivi administratif et budgétaire de la structure. Si le nombre de coopérateurs continue de croître, il est envisagé d’en embaucher un troisième d’ici à la fin de l’année 2017. Et, pourquoi pas, de les passer tous à temps complet. Quand on vous dit que l’économie sociale et solidaire crée de l’emploi !

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