Déchets alimentaires : une nouvelle vie

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Par Matthieu Perotin

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© Thomas Gogny

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Il est désormais possible, pour les restaurateurs, de valoriser leurs déchets alimentaires. Biogaz, engrais, terreau, nourriture animale… Rencontre avec les équipes de l’entreprise Moulinot, spécialiste du traitement des biodéchets*.

En ce matin de mars, Patrick Jovené, le responsable technique de l’entreprise Moulinot, est accueilli dans un collège parisien. Il en ressort peu après, les bras chargés de trois gros sacs. À l’intérieur, les déchets alimentaires issus des repas servis la veille par la cantine scolaire. Une fois à l’arrière d’un camion, les sacs sont aussitôt pesés puis hissés dans la benne du véhicule. C’est le point de départ d’une tournée qui, après plusieurs haltes (notamment devant la succursale d’un grand groupe de nourriture rapide et un hôtel 5 étoiles), se terminera dans un centre de réception et de traitement des biodéchets* à Saint-Denis, en région parisienne. Les déchets seront ensuite transformés en biogaz dans des usines de méthanisation.

 

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Deux autres filières sont utilisées. Les drèches (résidus dérivés de l’orge et issus de la fabrication de la bière) font le bonheur d’éleveurs qui l’utilisent comme nourriture animale. Et Moulinot a ouvert, à l’automne 2017, sa propre plateforme de lombricompostage en Essonne. De quoi donner vie au concept d’économie circulaire : le terreau obtenu bonifie les terres des maraîchers qui approvisionnent les clients de l’entreprise.

* Biodéchets : partie biodégradable des déchets ménagers (déchets alimentaires, déchets verts, papier et carton).

 

À lire aussi : Quèsaco « l’économie circulaire » ?

Envie de mieux comprendre ce concept ? Lire notre article pour avoir davantage d’explications.

 

Une économie circulaire et solidaire

Patrick Jovené est, historiquement, le premier salarié de l’entreprise. « Je suis arrivé en 2014. J’étais alors au chômage et j’ai répondu à une annonce pour un poste de conducteur de véhicule léger. À l’époque, il s’agissait seulement d’une opération pilote impliquant 80 restaurateurs parisiens. » Un exemple solidaire parmi d’autres puisque, en moins de quatre ans, plus de 30 salariés sont venus grossir les rangs. Tous étaient auparavant en recherche d’emploi ou en insertion. Stephan Martinez, le P-DG, en fait un principe de recrutement : « Nous les accueillons pour leur donner un métier et leur faire signer un CDI ». Un engagement qui a valu à Moulinot Compost & Biogaz de recevoir le label ESUS (entreprise solidaire d’utilité sociale).

La réflexion commence en 2007 pour Stephan Martinez, fondateur de l’entreprise, lorsqu’il cherche un moyen pour recycler les cinq tonnes de rebuts alimentaires qui sortent chaque année de son restaurant parisien. Destination : l’enfouissement ou l’incinération. « Après m’être documenté sur le lombricompostage, c’est-à-dire l’utilisation de vers de terre en vue de transformer les déchets en engrais, j’ai mené l’expérience dans ma propre cave. J’en suis sorti optimiste quant à la possibilité de développer la filière. »

 

« Nous accueillons nos équipiers pour leur donner un métier et leur faire signer un CDI. »

Stephan Martinez, fondateur de l’entreprise sociale Moulinot. Crédit : DR Moulinot

 

Un modèle à dupliquer

Depuis, et alors que l’utilité du compost n’est plus à démontrer, le modèle a vocation à se multiplier un peu partout en France. Stephan Martinez rencontre de nombreux porteurs de projets intéressés par sa démarche. « Se faire connaître localement, déployer des outils adaptés, aider leurs clients dans les démarches administratives : c’est sur ces aspects que les entreprises de l’économie circulaire comme Moulinot doivent convaincre. »

Pour une grande partie des restaurateurs qui ont choisi de faire traiter ainsi leurs déchets alimentaires, la plus-value écologique est au cœur de leur choix. « Cuisiner des produits de saison vendus en circuits courts, les utiliser dans leur intégralité pour ne pas gaspiller, rémunérer les fournisseurs au juste prix… Quand on adopte ces pratiques, il me semble logique de vouloir offrir un débouché durable aux déchets organiques », résume François Pasteau, chef du restaurant L’Épi Dupin, à Paris. Ce dernier a lui-même reçu le Trophée « Solution Climat » de la COP 21.

Pour Françoise Dedic, responsable des prestations de services pour les Hôpitaux universitaires de Paris Ouest, l’un des intérêts de la prestation réside dans l’outil de traçabilité associé. « Nous connaissons les quantités collectées, nous disposons des récapitulatifs. Ce qui nous aide à communiquer sur les résultats obtenus grâce au tri et à l’utilisation de nos biodéchets, mais aussi à mener des actions de sensibilisation pour diminuer le gaspillage alimentaire ».

Le développement de cette activité devrait très vite connaître une croissance majeure. Loi Grenelle 2 oblige, les producteurs de plus de 10 tonnes par an de biodéchets doivent en effet, depuis 2016, trouver une solution de traitement.

 

EN CHIFFRES

  • 4 500 tonnes de biodéchets ont été transportées par les camions Moulinot en 2017.
  • 400, c’est le nombre de clients que compte l’entreprise : restaurants, structures hospitalières, restauration collective…

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