Énergies renouvelables : des projets portés par les citoyens

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Par Angélique Pineau

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© Énergies en Pays de Vilaine - Natacha Roullé

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La transition énergétique ne pourra pas reposer que sur l’État. Les citoyens l’ont bien compris. Un peu partout en France, des collectifs d’habitants montent des projets de production d’énergies renouvelables. Essentiellement des fermes solaires ou éoliennes.

Il y en aurait plus de 300 en France : un tiers est déjà en fonctionnement (voir où les trouver), un tiers est au stade de développement et le reste encore à celui de l’idée. Les projets citoyens de production d'énergies renouvelables se multiplient depuis le début des années 2000. Concrètement, il s’agit de collectifs d’habitants qui imaginent et financent l’installation de panneaux photovoltaïques ou d’éoliennes sur leur commune. Ils montent alors une société de projet dont ils sont les principaux actionnaires. Le plus souvent avec le soutien des collectivités locales.

« Ces dernières années, on sent une envie chez les citoyens de s’impliquer davantage dans la transition énergétique. 86 % des participants au Grand Débat national pensent, par exemple, pouvoir contribuer à titre personnel à protéger l’environnement. Les choses ont déjà commencé à bouger sur l’alimentation avec les circuits courts, les labels de qualité… Mais la prise de conscience de l’urgence environnementale est désormais plus globale », indique Lilian Carpenè, ingénieur économiste au sein du service Réseaux et énergies renouvelables de l’Ademe, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie.

Dans le Morbihan, un parc éolien citoyen

« Lorsqu’un industriel ou une collectivité locale veulent, sans concertation, installer des éoliennes dans un champ, c’est plus difficile à faire accepter aux habitants, assure Marc Mossalgue, porte-parole d’Énergie Partagée, l’association qui accompagne le développement de ces projets citoyens. Là, ce sont des habitants qui en sont à l’origine. Donc ils connaissent tous les tenants et les aboutissants d’un tel projet. Ils vont par exemple échanger entre eux pour trouver le meilleur emplacement, celui qui sera le moins gênant pour tous. Ce sont LEURS éoliennes et cela change tout. »

À Béganne, dans le Morbihan, Bégawatts a été le premier parc éolien citoyen de France. Installées depuis 2014 dans le Pays de Redon, ses quatre éoliennes ont coûté 12 millions d’euros au total. Un projet qui a pu voir le jour grâce à l’investissement d’un millier de citoyens. « On voulait se rapproprier notre énergie et le faire localement pour que cela profite à notre territoire », raconte Jean-Christophe Chaurin. Il est le codirecteur bénévole de la structure qui gère aujourd’hui le projet : une SAS qui fonctionne selon le principe une personne = une voix.

Ces éoliennes permettent de couvrir les besoins en électricité de plus de 6 000 habitants mais aussi de financer des actions de sensibilisation pour promouvoir les économies d’énergie. L’association Énergies citoyennes en Pays de Vilaine, à l’origine de Bégawatts, a depuis monté deux autres parcs éoliens citoyens en Loire-Atlantique.

A lire aussi : Enercoop : une coopérative au service de la transition énergétique citoyenne
Les circuits courts existent aussi pour l’énergie. C'est ce que propose la coopérative Enercoop avec son électricité achetée à des producteurs locaux.

Agir pour la transition énergétique

Tous les projets ne sont pas aussi conséquents que celui de Béganne. Si le coût d’un champ d’éoliennes représente plusieurs millions d’euros, les projets de panneaux solaires installés par exemple sur le toit d’une école ou d’une salle polyvalente sont beaucoup plus accessibles, car d’une puissance moindre. « Pour 60 m2, il faut compter entre 15 000 et 20 000 euros. Ce qui peut être financé par un petit groupe de personnes, souligne Marc Mossalgue. Il existe également quelques projets hydrauliques, de géothermie ou de méthanisation. Mais ils sont plus rares car souvent plus compliqués à mettre en place. »

Quelles que soient la taille ou la forme de ces projets, les citoyens qui s’y investissent le font avant tout par conviction. « Bien sûr, ils n’ont pas envie de perdre l’argent qu’ils ont investi, mais le but premier n’est pas là, confirme le porte-parole d’Énergie Partagée. Leur moteur, c’est l’envie d’agir pour amorcer la pompe à transition énergétique. Et ils ne s'impliquent pas que financièrement. Ils participent aussi activement à la gouvernance de ces projets de production d’énergies renouvelables. »

Tous ne choisissent pas la forme coopérative au sens strict pour leur structure mais ils souscrivent à la charte d’Energie partagée. Et celle-ci s’appuie sur quatre grands principes : l’ancrage local, la finalité non spéculative, la gouvernance démocratique et l’exemplarité sur le plan écologique.

Comment monter son propre projet citoyen de production d’énergies renouvelables ?

Même si ces projets se développent ces dernières années, la France reste en retard par rapport à certains de ses voisins européens. « Cela représente moins de 1 % de la production française d’électricité. En Allemagne, c’est près du tiers », souligne Lilian Carpenè de l’Ademe.

Toutefois, certaines régions sont plus en avance que d’autres. « L’éolien est très présent en Bretagne car elle peut compter sur le vent. Et puis il y a une grande tradition de coopération entre les gens. En région Rhône-Alpes, le niveau d’ensoleillement en fait le berceau du solaire », précise Marc Mossalgue d’Énergie Partagée.

Pour aider les porteurs de projets citoyens à aller au bout de leur idée, son association propose une « boîte à outils » sur son site. Avec notamment un guide « Premiers pas » pour savoir par où commencer. Vous y trouvez également une carte de France avec les contacts des relais régionaux qui peuvent vous accompagner dans vos démarches.

Et si vous ne vous sentez pas l’âme d’un aventurier, vous pouvez tout simplement investir un peu de votre argent dans l’un de ces projets citoyens d’énergies renouvelables. Et ainsi en devenir actionnaire. Car Énergie Partagée les aide aussi à trouver les fonds suffisants pour être viables économiquement, en collectant l’épargne solidaire, là encore des citoyens.

Alors, vous vous y mettez quand ?

Pour en savoir plus :

Consultez le site d’Energie Partagée et découvrez une vidéo qui présente son action.

En Seine-Saint-Denis, des panneaux solaires citoyens sur les toits des écoles

Des habitants de Plaine Commune ont créé une coopérative pour produire de l’électricité sur leur territoire.

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Crédit photo : Louizart Lou pour Plaine Énergie Citoyenne.

Comment agir à mon échelle ? Cette question, Laurent Monnet se l’est posée après la COP 21*. À la même époque, les projets citoyens de production d’énergies renouvelables commençaient à être médiatisés. Il en a donc parlé autour de lui et rapidement un petit groupe d’habitants de Seine-Saint-Denis s’est constitué en association.

« Ce qui nous intéressait, c’était de créer quelque chose près de chez nous, sur notre territoire », raconte Laurent Monnet. Leur territoire, c’est celui de Plaine Commune, qui regroupe neuf villes au nord de Paris. Au fil du temps, le projet s’est précisé et une coopérative est née : Plaine Énergie Citoyenne. Elle réunit aujourd’hui des habitants, qui ont investi une partie de leur épargne dans ce projet. Mais aussi des collectivités locales et des entreprises intéressées par la démarche.

En début d’année prochaine, des panneaux solaires devraient commencer à produire de l’électricité sur les toits d’une école primaire à Épinay-sur-Seine et d’un collège à La Courneuve. De l’électricité qu’ils voudraient revendre à la coopérative Enercoop, fournisseur d’énergie 100 % renouvelable.

En parallèle, Plaine Énergie Citoyenne compte mener des actions de sensibilisation à l’environnement auprès des élèves et de leurs parents. Et dans un avenir proche, elle a pour objectif de faire naître d’autres projets de ce type dans chacune des neuf villes de Plaine Commune.

* Présidée par la France, la 21e Conférence internationale sur les changements climatiques a eu lieu du 30 novembre au 11 décembre 2015.

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