La Convention citoyenne pour le climat rend ses conclusions

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Par Natacha Czerwinski

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Après neuf mois de travail, les 150 citoyens chargés de proposer des mesures pour lutter contre le réchauffement climatique viennent de remettre leur rapport final. Retour sur une expérience démocratique inédite.

Leur dernière session de travail a été chargée. Du 19 au 21 juin, les 150 membres de la Convention citoyenne pour le climat ont débattu et voté leurs 150 propositions puis remis leur rapport final à la ministre de la Transition écologique et solidaire. Du logement aux transports en passant par la consommation, ces Français ont planché pendant près de neuf mois sur des mesures destinées à lutter contre le réchauffement climatique.

Comment la Convention citoyenne pour le climat (CCC) est-elle née ? Comment ses membres ont-ils travaillé ? Qu’ont-ils proposé ? Essentiel Santé Magazine fait le point sur cette aventure démocratique unique.

Qu’est-ce que la Convention citoyenne pour le climat ?

Lancée le 25 avril 2019 au sortir du Grand débat national, la CCC a été pensée par le chef de l’État comme une réponse au mouvement des « Gilets jaunes » (lui-même déclenché par l’annonce de la hausse de la taxe carbone fin 2018).

150 Français ont participé à cette initiative inédite dont le but était de « définir une série de mesures permettant d’atteindre une baisse d’au moins 40 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 (par rapport à 1990) dans un esprit de justice sociale. »

Les travaux de la Convention avaient démarré en octobre 2019 et devaient à l’origine se conclure en janvier 2020. Mais ils ont pris du retard du fait des manifestations autour de la réforme des retraites, puis de la crise sanitaire et du confinement.

Comment les participants ont-ils été choisis ?

Les 150 membres de la Convention ont été tirés au sort après la génération aléatoire de numéros de téléphone. Six critères (le sexe, l’âge, le niveau de diplôme, la situation socioprofessionnelle, la zone géographique et le type de territoire habité) ont été fixés. Le but : assurer une « représentation descriptive » de la population française dans la composition du groupe. Celui-ci comptait ainsi 51 % de femmes et 49 % d’hommes, 28 % de personnes âgées de 50 à 64 ans ou encore 16 % d’employés et 10 % d’ouvriers (entre autres).

À noter que « les 150 » ont bénéficié d’une indemnisation, sur le modèle des jurés d’assises, soit 86,04 € par jour (1 462 € pour la totalité du processus), ainsi que d’une indemnité de perte de revenu professionnel pour les personnes qui sont venues sur leur temps de travail (10,03 € par heure).

Comment ces citoyens ont-ils travaillé ?

L’organisation opérationnelle de la Convention citoyenne pour le climat (CCC) a été confiée au Conseil Economique Social et Environnemental (Cese) et c’est au palais d’Iéna (siège parisien du Cese) que la CCC s’est réunie. Les volontaires, organisés en groupe de travail, ont planché sur cinq grands thèmes liés à la vie quotidienne : « se nourrir », « se déplacer », « se loger », « consommer », « produire et travailler ».

Pour les aider dans leurs travaux, les participants ont auditionné près de 140 experts (scientifiques, associatifs, syndicalistes, entrepreneurs, hommes politiques). Ils ont aussi été accompagnés par des professionnels de la délibération collective et ont bénéficié d’un groupe d’appui et d’un comité légistique* pour les aider dans l’élaboration de leurs propositions et dans la transcription juridique et réglementaire de leurs idées.

* La légistique est un terme de droit qui désigne l'ensemble des méthodes et conventions de rédaction des textes normatifs (lois, décrets…).

Quelles sont les principales propositions de la Convention citoyenne pour le climat ?

Parmi les 149 préconisations de la Convention, certaines sont particulièrement ambitieuses. Les citoyens proposent ainsi de soumettre à référendum la création d’un crime d’« écocide ». Celui-ci est défini comme « toute action ayant causé un dommage écologique grave en participant au dépassement manifeste et non négligeable des limites planétaires, commise en connaissance des conséquences qui allaient en résulter et qui ne pouvaient être ignorées. »

« Les 150 » ont également voté en faveur d’un référendum visant à introduire dans la Constitution la préservation de l’environnement et la lutte contre le dérèglement climatique.

Du côté des déplacements, la CCC propose de limiter la vitesse sur l'autoroute à 110 km/h (au lieu de 130), de renforcer le bonus-malus écologique sur les véhicules ou encore de réduire la TVA sur les billets de train de 10 % à 5,5 %. Pour limiter les effets néfastes du transport aérien, les membres de la Convention recommandent d’interdire la construction de nouveaux aéroports (et l’extension des aéroports existants) et d’« organiser progressivement la fin du trafic aérien sur les vols intérieurs d’ici à 2025 sur les lignes où il existe une alternative bas carbone satisfaisante en prix et en temps. »

Pour ce qui est de l’alimentation, les citoyens participants veulent « atteindre 50 % d'exploitations en agroécologie en 2040 », « taxer les produits ultra- transformés à forte empreinte carbone et faible apport nutritionnel » et mettre en place des chèques alimentaires pour les plus démunis à utiliser dans les AMAP ou pour des produits bios. La CCC souhaite également réguler la publicité pour réduire les incitations à la surconsommation, limiter le suremballage (et développer le vrac) ou encore supprimer tous les plastiques à usage unique dès 2023.

Sur le plan du logement, la Convention plaide pour rendre obligatoire la rénovation énergétique globale des bâtiments d’ici à 2040 et « limiter le recours au chauffage et à la climatisation dans les logements, les espaces publics et ceux ouverts au public ainsi que les bâtiments tertiaires ».

À noter qu’une seule proposition a été rejetée par les votants : la réduction du temps de travail à 28 heures par semaine.

Que va-t-il se passer maintenant ?

Le président de la République s’était engagé à ce que les propositions de la Convention soient soumises « sans filtre » soit au vote du Parlement, soit à référendum, soit à application réglementaire directe.

Emmanuel Macron recevra, le 29 juin, les 150 membres de la Convention citoyenne pour le climat « afin d'apporter une première réponse à leurs propositions », a fait savoir l’Élysée.

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