Le « Green Friday », le mouvement anti-« Black Friday »

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Par Natacha Czerwinski

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Lancé en 2017, le Green Friday a pour objectif de sensibiliser aux enjeux sociaux et environnementaux de la consommation de masse. Il se tient le 26 novembre, soit le même jour que le Black Friday.

Vous connaissez forcément le Black Friday, cette tradition commerciale venue des États-Unis qui, le dernier vendredi de novembre, encourage les enseignes à proposer des prix cassés. Mais avez-vous entendu parler du « Green Friday » ? Cet événement écocitoyen, qui aura lieu le même jour que le « Vendredi noir », entend prendre le contre-pied de cette opération marketing et promouvoir une consommation responsable.

Pourquoi avoir créé le Green Friday ?

Le collectif Green Friday s’est constitué en 2017 sous l’impulsion de quatre acteurs de la consommation responsable : Altermundi, Dream Act, Envie et le Refer. « Nous avions des missions complémentaires et nous sommes retrouvés autour de ce même effroi généré par la surproduction et son symbole qu'est le Black Friday, détaille Diane Scemama, cofondatrice de Dream Act. Le Black Friday est un événement qui sert à déstocker les produits fabriqués en trop grande quantité et qui, du coup, incite à la surconsommation. »

Loin de vouloir culpabiliser les consommateurs, le Green Friday se veut une façon de les faire réfléchir à ce qui se cache derrière les supposées « bonnes affaires » de cette opération commerciale. « L’argument marketing est de nous faire gagner du pouvoir d’achat, mais c’est exactement l’inverse. Nous vendre des produits dont nous n’avons pas besoin et qui, en plus, sont souvent de mauvaise qualité, c’est ce qui ruine notre pouvoir d’achat », estime Diane Scemama, qui invite aussi les citoyens à s’interroger sur le « prix juste ».

« Quand un produit est vendu 40, 60 voire 80 % moins cher le jour J, quelle est la marge du commerçant le reste de l’année ? Et lorsqu’on achète un tee-shirt 9,90 euros, combien sont payés ceux qui le fabriquent ? Il est urgent pour notre pouvoir d’achat, pour notre planète et pour le respect des travailleurs de redonner leur valeur réelle aux choses. »

En quoi consiste le Green Friday ?

Le mouvement Green Friday fédère environ 500 structures (associations et entreprises), dont l’adhésion, soumise au vote des membres du collectif, doit répondre à des critères d’impact écologiques et éthiques. « Nous ne voulons pas que le Green Friday soit utilisé pour faire du greenwashing* », précise Diane Scemama.

Le jour J, les entreprises participantes s’engagent à ne pas proposer de réductions à leurs clients et à reverser 10 % de leur chiffre d’affaires de la journée à des associations préalablement sélectionnées. Cette année, les fonds seront répartis entre HOP-Halte à l’obsolescence programmée, RespectOcean, Zéro Waste France et E-Graine.

De plus, différents événements (tables rondes, marchés de seconde main, ateliers de réparation ou de fabrication de produits…) sont organisés le 26 novembre. La carte des initiatives est disponible sur le site greenfriday.fr. Enfin, une pétition visant à faire interdire le Black Friday est également diffusée sur les réseaux sociaux.

Dans quelles mesures un événement comme le Black Friday est-il néfaste pour la planète ?

Chaque produit que nous consommons a des effets sur l’environnement. Saviez-vous par exemple que, pour confectionner un jean, il faut l’équivalent en eau de 285 douches ? « L’immense majorité des biens d’équipement (textile, électronique, ameublement, électroménager…) ont leurs principaux impacts au moment de la fabrication, explique Pierre Galio, chef du service "consommation responsable" à l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). Cela veut dire que, dès que vous achetez un produit neuf, vous avez généré en amont des émissions de gaz à effet de serre, de la consommation d’énergie et de matières premières, du transport, de l’emballage… Il est donc essentiel, pour répondre aux enjeux de la transition écologique, d’orienter la consommation vers du moins et du mieux. »

Et si les fabricants ont évidemment leur rôle à jouer dans cette démarche, les consommateurs doivent aussi « donner le signal par leurs choix », insiste l’expert. Adopter un comportement plus écoresponsable passe d’abord par une série de questionnements. Ai-je vraiment besoin de ce nouvel objet ? N’est-il pas surdimensionné ? Pourquoi ne pas l’acheter d’occasion ? Mon équipement actuel ne peut-il pas être réparé ?

« L’allongement de la durée de vie des produits a un intérêt environnemental mais aussi économique », indique Pierre Galio en se référant à une étude réalisée sur le sujet par l’Ademe.

Comment les consommateurs perçoivent-ils le Green Friday ?

D’après un sondage Yougov réalisé en octobre 2020, 7 personnes sur 10 se disent favorables au Green Friday mais seulement 41 % ont l’intention de soutenir le mouvement.

« Les enquêtes post-Covid montrent qu’il y a une vraie volonté des Français de changer de modèle, mais il y a une différence entre ce qu’ils déclarent et ce qu’ils font, confirme Pierre Galio. La consommation est un marqueur social et identitaire, notamment pour les jeunes. Le défi est de retravailler nos imaginaires pour que l’accumulation ne soit plus un gage de réussite et de bonheur. Mais c’est un processus qui va prendre du temps… »

*Le greenwashing (ou « écoblanchiment ») consiste en l’utilisation fallacieuse d’arguments faisant état de bonnes pratiques écologiques dans des opérations de marketing ou de communication (définition du Larousse).

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