Pollution numérique : sept réflexes pour réduire son impact

Publié le

Par Natacha Czerwinski

Temps de lecture estimé 7 minute(s)

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Face à l’ampleur des impacts environnementaux de la pollution numérique, les citoyens ont aussi un rôle à jouer. Le défi ? Utiliser les outils technologiques de manière plus responsable.

Les chiffres ont de quoi donner le vertige. En 2019, à l’échelle de la planète, le numérique était constitué de 34 milliards d’équipements pour « seulement » 4,1 milliards d’utilisateurs. Une gigantesque réalité qui « contribue notablement à alourdir la facture environnementale de l’humanité », souligne l’étude « Empreinte environnementale du numérique mondial » réalisée par le collectif d’experts GreenIT. Sans compter que cet univers est en constante expansion. En 2025, le numérique devrait représenter 5,5 % des émissions de gaz à effet de serre mondiales, contre 2,2 % en 2010.

Même si la lutte contre la pollution numérique est du ressort des pouvoirs publics et des industriels, les citoyens aussi ont un rôle à jouer. Et il n’est pas négligeable. « En 2025, à l’échelle mondiale, les utilisateurs concentreront de 56 % à 69 % des impacts », indique cette même étude de GreenIT.fr. Voici donc quelques bonnes pratiques, simples et efficaces, à adopter pour réduire son empreinte numérique.

  1. Allonger la durée de vie de ses équipements

Nos ordinateurs, tablettes ou smartphones sont encore souvent en état de marche lorsque nous les remplaçons. Or, passer de 2 à 4 ans d’usage pour un appareil électronique améliore de 50 % son bilan environnemental.

« La première étape du cycle de vie des équipements – à savoir l’extraction des matériaux et la fabrication – est la plus impactante, explique Bela Loto Hiffler, fondatrice de Point de MIR (Maison de l’informatique plus responsable)*. De plus, conserver son appareil plus longtemps est aussi une façon de respecter ceux qui l’ont fabriqué. Car il ne faut pas oublier qu’au début de la chaîne, il y a des enfants en République démocratique du Congo ou au Pérou qui ont extrait des minerais et des Chinois qui ont assemblé nos smartphones dans des conditions d’esclavage numérique absolument déplorables. »

Pour maintenir votre appareil en bonne santé, « bichonnez-le », conseille la spécialiste, qui rappelle que « 80 % des pannes de smartphones sont dues à un écran cassé ». Pensez donc à installer une coque ou un film protecteur sur votre téléphone, et évitez de le mettre dans la poche arrière de votre jean.

Attention aussi aux mises à jour dites évolutives qui « encrassent » les machines, prévient Frédéric Bordage, fondateur de GreenIT.fr**. « À force d’en installer, le smartphone devient de plus en plus lent et le consommateur le change alors qu’il suffirait de désinstaller certaines mises à jour inutiles », regrette l’expert.

  1. Acquérir un appareil de seconde main, ou privilégier les produits avec label pour l’achat neuf

Au moment de changer de téléphone ou d’ordinateur, tournez-vous en priorité vers l’occasion, car réutiliser un matériel déjà fabriqué réduit considérablement son empreinte environnementale. Le système du reconditionnement, de plus en plus développé, permet de remettre sur le marché des appareils nettoyés, révisés et vérifiés. Certaines structures comme les Ateliers du Bocage, entreprise du mouvement Emmaüs, combinent d’ailleurs réemploi des équipements et création d’emplois d’insertion.

Si toutefois vous devez acheter du matériel neuf, choisissez des appareils porteurs de labels environnementaux, comme TCO, Epeat ou Ange bleu.

  1. Éteindre ses équipements quand on ne les utilise pas

Saviez-vous que, sur une année, une box consomme autant qu’un grand réfrigérateur ? Pour utiliser moins d’électricité (et faire des économies), pensez à débrancher votre box ainsi que le récepteur TV la nuit et lorsque vous quittez votre domicile. « C’est comme pour l’eau : quand on a fini de se servir, on coupe le robinet wifi », résume Frédéric Bordage.

De la même manière, éteignez votre ordinateur dès que vous n’en avez plus l’usage. « On peut aussi le mettre en veille prolongée, précise Bela Loto Hiffler. C’est une quasi-extinction – on est proche de zéro en termes de consommation d’énergie – mais cela permet de retrouver tous ses onglets et fenêtres au moment où on relance l’appareil. »

  1. Regarder des vidéos de façon plus écoresponsable

« La vidéo en ligne représente entre 60 et 90 % du trafic internet d’un pays développé, chiffre Frédéric Bordage. Le dimensionnement du réseau internet est donc d’abord lié à celui de la vidéo : streaming, VOD (video on demand), Netflix… L’enjeu est de ne pas avoir à en changer. »

Sans aller jusqu’à se priver de sa série préférée, il est possible d’adopter un visionnage plus raisonnable, par exemple en s’abstenant de passer par la 4G (beaucoup plus énergivore que le wifi) et en téléchargeant les vidéos au lieu de les regarder en ligne. « Évitons de streamer dans un TGV à 300 km/h, car cela va solliciter toute la chaîne de l’appareil jusqu’au data center et générer un maximum de requêtes », explique Bela Loto Hiffler. Pensez aussi à sélectionner une résolution adaptée à votre écran : si vous regardez un film sur votre téléphone, inutile d’être en haute définition.

Pour pousser la logique vertueuse encore plus loin, essayez de « basculer sur la TNT dès que c’est possible », conseille Frédéric Bordage. « Aujourd’hui, de plus en plus de foyers regardent la télévision via leur box, alors que la TNT diffuse quoi qu’il arrive les matchs de foot ou les émissions en direct ! Dès que c’est en direct, privilégier la TNT évite de rajouter des impacts inutiles de l’ADSL et pèse beaucoup moins lourd d’un point de vue environnemental. »

  1. Avoir une « hygiène numérique » au quotidien

« Le numérique est une ressource critique, non renouvelable et qui s’épuise inéluctablement, rappelle Frédéric Bordage. L’idée de la sobriété numérique, c’est d’utiliser cette ressource de façon raisonnable pour que les générations futures puissent toujours avoir accès à ces outils technologiques. »

La responsabilité de chaque citoyen est donc, avant tout, de se poser la question de ses besoins et de ses usages. La dernière machine à café connectée va-t-elle vraiment changer ma vie ? Est-il nécessaire d’investir dans un écran de télévision encore plus grand alors que l’actuel fonctionne encore très bien ?

« Il faut revenir à du bon sens et privilégier, dès que c’est possible, la solution la plus low tech possible, plaide Frédéric Bordage. Par exemple, on n’est pas obligé d’écouter la radio en 4G chez soi quand on a une chaîne hi-fi ! De la même façon, de plus en plus de gens écoutent des vidéos sur Youtube – sans les regarder – ce qui a un impact considérable par rapport au service rendu… »

  1. Participer à la collecte du matériel en fin de vie

Les déchets électroniques sont l’une des principales sources de pollution des écosystèmes : mal pris en charge, ils contaminent les sols, les nappes phréatiques et intoxiquent la faune et la flore. « Informez-vous sur les points de collecte officiels autour de chez vous de manière à déposer vos équipements en fin de vie aux bons endroits », insiste Bela Loto Hiffler.

Ne conservez pas non plus vos anciens ordinateurs et téléphones dans vos placards, car ils peuvent être reconditionnés pour être réemployés.

  1. Télétravailler « léger »

Certes, la généralisation du travail à distance a permis de réduire la pollution liée au trafic automobile. Mais le télétravail n’est pas non plus neutre écologiquement parlant. Pour limiter son empreinte numérique en télétravail, l’Ademe recommande notamment de :

  • couper la caméra lors des réunions en visioconférence et de privilégier l’audio,
  • utiliser le cloud avec modération (le disque dur est une option plus écolo),
  • envoyer les mails « les plus légers possible » (compressez les pièces jointes ou utilisez un site de dépôt temporaire),

« Supprimer ses courriels ne sert pas à grand-chose, mais il peut être utile de réfléchir, avec son service, à sa "politique de mails", fait remarquer Bela Loto Hiffler. On peut par exemple se dire qu’on va en envoyer moins, ou bien éviter de "répondre à tous" systématiquement. »

Pour vos recherches web, essayez d’utiliser des mots-clés précis, de taper directement l’adresse du site si vous le connaissez et de recourir à l’historique et aux marque-pages. Car « plus la navigation va être rapide et efficace, plus on va être écoresponsable », conclut l’experte.

* Bela Loto Hiffler est l’auteure du Guide d’un numérique plus responsable (éditions Ademe).

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