AFM : 60 ans de mobilisation des familles

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Par Cécile Fratellini

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© Christophe Hargoues / AFM-Téléthon

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Plus de 89 millions d’euros ont été récoltés lors du Téléthon en décembre 2017. Mais tout a commencé il y a 60 ans avec la naissance d’une petite association : l’AFM (association française contre la myopathie).

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Yolaine de Kepper, fondatrice en 1958 de l’AFM, ici avec deux de ses enfants, Edouard et Philippe. ©AFM-Téléthon

Ils étaient neuf au départ. Ils sont des milliers aujourd’hui mobilisés pour lutter contre les maladies génétiques rares. En février 1958, un petit groupe de parents décident de créer l’AFM (association française contre la myopathie). Yolaine de Kepper, maman de 7 enfants dont 4 garçons atteints de myopathie de Duchenne, en prend la présidence.

 

« Le premier de mes frères est né en 1946, raconte François de Kepper, l’un de ses enfants. Mes parents avaient remarqué qu’il avait du retard dans ses gestes mais aucun médecin n’avait posé le diagnostic. Il a fallu attendre 1952 pour qu’un spécialiste lâche le mot de myopathie. Ce fut la douche froide pour mes parents. Car il n’était pas question de traitement. Ils se sont alors lancés dans une croisade et ont décidé de faire un collectif avec d’autres parents pour peser sur le corps médical ».

 

« Les malades en haut de la pyramide »

Les parents essaient de collecter des fonds pour faire avancer la recherche en vendant des cartes de vœux, des chocolats… Ils partagent leur expérience, rencontrent des chercheurs comme le Pr Robert Debré. « Ma mère souhaitait mettre les malades en haut de la pyramide en partageant avec eux les informations des scientifiques rencontrés », ajoute François de Kepper.

La première victoire de l’association arrive 11 ans après sa création en 1969 : la myopathie est prise en charge à 100 % par la Sécurité sociale. En 1976, l’AFM est reconnue d’utilité publique.

« Ma mère a plusieurs faits d’armes à son actif. Elle a su s’entourer, Simone Veil était devenue une amie. De nombreux projets ont abouti comme l’homologation des fauteuils électriques au début des années 1970, elle s’est battue pour la loi sur l’accessibilité », rappelle avec fierté François de Kepper.

Grâce à l’association, au début des années 80, une résidence d’accueil, de soins et de vie ouvre près d’Angers. En 1983, Yolaine de Kepper passe la main à la présidence de l’AFM. Le combat continue. En 1986, l’association organise un colloque scientifique. Le gène responsable de la myopathie de Duchenne est alors identifié.

 

Le premier Téléthon en 1987

Un an plus tard en 1987, deux pères d’enfant malade, Bernard Barataud et Pierre Birambeau, importent le Téléthon en France, marathon télévisuel qui existe déjà aux États-Unis. « Quand ma mère a vu arriver le premier train du Téléthon avec les artistes en gare d’Angers, elle a dit “ça y est, on a gagné” », se souvient François de Kepper.

Entre 1990 et 2000, la recherche s’accélère avec la création du laboratoire Généthon par l’AFM-Téléthon.

 

A lire aussi : Généthon, un labo (presque) comme les autres

Notre reportage au Généthon, premier établissement pharmaceutique à but non lucratif créé par l’AFM-Téléthon.

En 2000, la thérapie génique permet de traiter les premiers bébés-bulles. Depuis, de nouvelles victoires de la thérapie génique sont annoncées régulièrement. Et Francois de Kepper de conclure : « La recherche progresse sans cesse. Un souhait pour l’avenir ? Que le défi que s’est lancé ma mère il y a 60 ans se réalise : guérir ! ».

 

Trois questions à Christian Cottet, directeur général de l’AFM-Téléthon

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©Christophe Hargoues / AFM-Téléthon

Quels sont les faits marquants des 60 années de l’AFM ?

Il y en a beaucoup : le premier Téléthon en 1987, la publication des cartes du génome humain par Généthon en 1992. Depuis, de nombreuses équipes de scientifiques utilisent ses cartes pour identifier les gènes et développer des médicaments innovants.

En 1995, il y a justement l’identification du gène dont les mutations sont responsables de l’amyotrophie spinale infantile* (la maladie de ma fille).

Les années 2000 marqueront les premiers succès de la thérapie génique pour le traitement de maladies rares (du sang, du cerveau, du système immunitaire, de la vision, du muscle…).

Enfin, en 2016, une plateforme industrielle de production de médicaments de thérapie génique et cellulaire est créée. Avec le même objectif depuis l’origine : guérir.

C’est 60 ans de combat, avec en 1958, les premiers parents qui se rassemblent pour créer une association dans un contexte où il n’y avait aucune recherche sur ces maladies. Ils ont levé un espoir et ont eu la capacité de transformer leur souffrance personnelle en énergie mobilisatrice pour le combat collectif. L’AFM est en train de concrétiser l’espoir de ces parents en avançant vers la guérison.

*maladie du motoneurone qui se traduit par l’affaiblissement de la force musculaire.

 

Suite à l’identification du gène de la maladie de votre fille, où en sont les pistes thérapeutiques ?

L’AFM avait organisé le rassemblement des familles concernées par l’amyotrophie spinale infantile* dès la fin des années 80. Et grâce aux collectes d’échantillon biologique, un laboratoire de l’INSERM en France, financé par le Téléthon, a pu identifier le gène.

Aujourd’hui, six médicaments innovants sont testés chez les malades concernés et un septième le sera prochainement. L’un d’entre eux a même une autorisation de mise sur le marché. Et actuellement des bébés touchés par cette maladie peuvent en bénéficier.

On recueille enfin les fruits de toutes ces années de recherche et d’audace. Il y a encore cinq ans, il n’y avait rien. Et c’est vrai pour d’autres maladies rares.

 

Quelles sont les perspectives pour les prochaines années ?

En 6 décennies, nous sommes passés du désert scientifique et médical aux preuves d’efficacité de ces thérapies innovantes. Désormais, nous devons aborder la dernière ligne droite, la plus complexe : celle des traitements. Nous devons transformer les succès scientifiques en médicaments disponibles pour les malades.

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