Baguettes en attente : un petit geste solidaire

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Par Angélique Pineau-Hamaguchi

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© Getty Images/Cultura RF

Offrir une baguette de pain, de façon anonyme, à une personne dans le besoin. C’est possible dans les boulangeries qui proposent la baguette « en attente ». Explications avec celui qui est à l’origine du concept.

L’idée est simple. Mais encore fallait-il y penser. Inspirée du café « suspendu », qui existe dans certains bars et restaurants, la baguette « en attente » permet de se montrer solidaire lorsqu’on se rend chez le boulanger. On peut en effet payer deux baguettes plutôt qu’une. La seconde sera mise de côté pour un inconnu, qui n’a pas les moyens de se l’offrir. À condition, bien sûr, que sa boulangerie habituelle participe à cet élan de solidarité.
L’initiative est née en mai 2013, dans le Puy-de-Dôme, et a rapidement essaimé dans toute la France… et même au-delà de nos frontières.

 

TROIS QUESTIONS À…
Jean-Manuel Prime, initiateur de la baguette « en attente »
Comment avez-vous eu cette idée ?

J’ai simplement transposé le principe du café à celui de la baguette. J’ai entendu parler du café « suspendu » pour la première fois en avril 2013 et j’ai trouvé l’idée très intéressante. À la même époque, dans mon quartier de Clermont-Ferrand, je voyais souvent des gens faire les poubelles pour se nourrir. Ce qui m’a choqué et m’a amené à m’interroger sur ce que je pourrais faire. J’ai donc eu envie de lancer la baguette « en attente » pour aider ceux qui rencontrent des difficultés et créer un mouvement de solidarité autour de cela.

Comme le café, le pain est un des piliers de notre culture et c’est un produit de base de notre alimentation qui, en plus, est consommable tout de suite.
Cela me semblait assez facile à mettre en place et ne pas demander d’efforts surhumains à celui qui donne, ni au commerçant qui le propose. Par ailleurs, quand on fait un don à une association, il y a toujours une part qui sert au financement de son fonctionnement. Là, l’intégralité revient à celui qui en a besoin.

Au départ, j’ai démarché des boulangers du Puy-de-Dôme. Trois ont répondu présents. Puis, un autre a souhaité se lancer à Bordeaux. Et grâce aux réseaux sociaux, la mayonnaise a pris rapidement, dès l’automne 2013.

 

Encore faut-il que ces baguettes trouvent preneur, que des personnes viennent effectivement les demander…

C’est vrai que ce n’est pas évident d’oser franchir la porte d’une boulangerie pour venir chercher une baguette « en attente ». Parmi les bénéficiaires, il n’y a pas que des personnes à la rue, mais également des retraités et des étudiants avec peu de ressources, des mères de famille aux fins de mois difficiles… Et quand vous êtes connu dans votre quartier, vous pouvez avoir un peu honte. Mais bien souvent, il y a une sorte de connivence avec le commerçant et cela se fait de manière discrète. Pour que la personne se sente « comme tout le monde », comme n’importe quel client. Et puis, c’est réconfortant de se dire que quelqu’un qui ne vous connaît pas a fait ce geste.

L’autre souci, c’est qu’il faut que les personnes susceptibles d’en bénéficier soient au courant que cela existe. La médiatisation est donc importante. Le site internet Unebaguetteenattente.org met aussi à disposition des affichettes et un logo, que les boulangers peuvent télécharger gratuitement afin de les apposer sur leur vitrine. Il arrive tout de même qu’en fin journée il reste des baguettes qui n’ont pas été demandées. Certains commerçants ont noué des liens avec des associations qui, dans ce cas, viennent les chercher pour les distribuer aux personnes en difficultés dont elles s’occupent. Chacun adapte le concept à sa manière, se l’approprie.

 

Aujourd’hui, près de 150 boulangeries en France proposent la baguette « en attente ». Vous avez été surpris par l’ampleur de ce mouvement de solidarité ?

Oui, clairement. Cette idée a fédéré beaucoup de monde, en seulement quelques mois. Il y a même un boulanger en Suisse et deux au Québec qui ont souhaité participer. En plus d’être solidaires envers les plus démunis et de contribuer à créer du lien social dans un quartier, les commerçants ont tout à y gagner. L’initiative est souvent relayée dans les médias locaux et cela donne d’eux une image positive. Parfois, ce sont les clients eux-mêmes qui les interpellent et les incitent à s’y mettre.

Toutefois, les 150 boulangers français qui proposent la baguette « en attente » ne sont pas répartis de manière homogène sur le territoire. Le Sud est assez peu pourvu par rapport à l’Ouest par exemple. Mais cela peut encore changer !

 

Pour en savoir plus

  • Pour savoir si des boulangeries de votre ville participent à l’initiative, tapez sur votre moteur de recherche « Une baguette en attente » suivi du nom de votre ville.
  • Le site Coffeefunders.fr permet, quant à lui, de géolocaliser les bars et brasseries qui proposent le café « suspendu » et autres en-cas « en attente ».

Par Angélique Pineau-Hamaguchi

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