Téléthon : 30 ans d’« aventure humaine »

Publié le

Par Cécile Fratellini

Temps de lecture estimé 6 minute(s)

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© Cyrille Bernard/AFM Téléthon

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Entre deux conférences en région pour Laurence Tiennot-Herment, juste avant son émission de radio pour Nagui, ils ont accepté de nous rencontrer pour parler du Téléthon. Avec trois maîtres-mots : engagement, humilité et complicité.

Que représente le Téléthon pour vous, une aventure humaine ?

Nagui : Le Téléthon, ça représente l’énergie des parents, et c’est essentiellement humain oui. Ce sont les parents qui, blessés dans leur chair, ont pris les choses en main et n’ont pas voulu laisser la fatalité s’emparer de la vie des autres. Ils s’ouvrent en tendant des mains, en ouvrant des portes et en se disant qu’il ne faut pas que ça vous arrive à vous aussi. C’est une véritable aventure humaine. Ajoutons à cela l’aventure des chercheurs, des étudiants, des laboratoires qui travaillent, qui échangent, se parlent, se rencontrent et qui publient dans des journaux scientifiques du monde entier.

Laurence Tiennot-Herment : Le combat des familles a, en effet, été démultiplié par le combat des chercheurs, puis par le combat de tous. Aujourd’hui, au moment du Téléthon, nous comptons 200 000 bénévoles et 20 000 points d’animation40 % de la collecte est réalisée grâce aux ventes de crêpes et aux défis en tous genres. Le Téléthon est devenu le combat de toutes les familles. Elles se retrouvent dans l’idée de prendre leur destin en main et de se dire : « Plus jamais ça ». Et elles se battent ensemble.

N. : Il y a un sentiment de pouvoir gagner qui décuple les forces. Le Téléthon a même inventé la connectique avant tous les réseaux sociaux. C’est un réseau social à lui seul.

L. T.-H. : C’est aussi le moment de se rassembler et de faire la fête. Pierre Tchernia disait « C’est le 14 juillet en hiver ».

 

30 heures de direct, c’est très intense, comment préparez-vous cet événement ?

L. T.-H. : Beaucoup de personnes croient qu’on ne travaille qu’au moment du Téléthon (rires). Mais, bien sûr, il y a un gros travail tout au long de l’année. J’échange et rencontre les chercheurs, je participe régulièrement à des réunions et conseils scientifiques, je m’assure du bon déroulement des appels d’offres et de la sélection des projets. L’AFM-Téléthon gère également trois laboratoires. Et pour la préparation de l’événement en lui-même, ça commence dès le lendemain du Téléthon précédent. On débriefe à chaud, puis à froid et on construit l’édition suivante. Pendant les 30 heures, c’est un stress énorme, parce que tous les ans, 900 à 1 000 chercheurs dépendent du Téléthon. On est d’une fragilité incroyable, n’importe quel événement national ou international peut avoir un impact.

N. : Moi je ne suis qu’un animateur (rires). Certes, j’ai pu rencontrer des chercheurs, aller visiter des laboratoires, rester en contact avec certains malades, mais ce n’est tellement rien par rapport au travail mené par les équipes de l’AFM-Téléthon pendant des mois. Je m’applique à trahir le moins possible leurs pensées, leurs propos, leur volonté et leur énergie. Je suis un Monsieur loyal. Quand je vois ces chercheurs, j’ai envie de leur ériger des statues. Et l’une des plus belles victoires du Téléthon, ce serait qu’on n’ait plus besoin de lui et que tout puisse fonctionner et avancer. Car c’est plus qu’une émission de télévision pour collecter des fonds, ce sont des chercheurs, 3 laboratoires, une entreprise pharmaceutique. Cela dépasse les paillettes d’un week-end. Mais il faut de temps en temps une petite étincelle pour que le moteur démarre donc si on a ce rôle d’étincelle, Sophie Davant et moi, tant mieux.

 

Quel souvenir vous a le plus marqué au cours de toutes ces années ?

N. : Déjà quand on est animateur, on n’est pas préparé à grand-chose et encore moins préparé à faire des émissions avec de telles rencontres humaines et une telle puissance affective. Mais lorsqu’une année, vous demandez des nouvelles d’un enfant et que l’on vous dit qu’entre les deux Téléthons il est parti, c’est quelque chose que je n’oublierai jamais. De tout ce que j’ai pu vivre sur le Téléthon, c’est sûrement ce qui m’a chamboulé le plus et ce qui chamboule tout le monde d’ailleurs.

L. T.-H. : C’est vrai, et il ne se passe pas une journée sans que je fasse un courrier de condoléances. C’est terrible ! Par opposition, je vais vous parler d’un de mes meilleurs souvenirs. A chaque Téléthon, nous avons des images qui nous restent. Mais la plus belle, c’est celle d’Aleyna, en 2006 au Grand Palais. Aleyna est concernée par un déficit immunitaire. Je revois son papa dire qu’elle est guérie grâce au Téléthon. Elle a bénéficié d’un traitement de thérapie génique, issu d’une collaboration entre le Téléthon français et le Téléthon italien. Et quand le dimanche matin, je me retrouve en face d’Aleyna et ses parents, en les regardant je me suis dit qu’ils incarnaient la raison d’être du Téléthon.

N. : Vous avez avec ces deux réponses la force du Téléthon, à la fois des nouvelles tristes et d’autres nouvelles bouleversantes d’encouragement et de motivation que l’on connaît de plus en plus. Il y a un effet boule de neige car le travail des chercheurs, des laboratoires, fait qu’il y a cette lumière au bout du tunnel. Et le moteur c’est le Téléthon.

L. T.-H. : Plus on avance, plus les résultats s’amplifient. Parmi les ambassadeurs de cette année, on a Mathilde qui était en fauteuil roulant et qui marche aujourd’hui. Mais le paradoxe c’est que l’on a le petit Apollo qui est train de perdre la marche et pour lequel il n’y a pas encore de traitement. Il y a 30 ans, au premier Téléthon, il n’y avait strictement rien. Aujourd’hui, il y a des succès mais il y a encore du travail.

 

Où en sont les essais cliniques aujourd’hui ?

L. T.-H. : Le temps de la recherche et le temps des familles n’est pas le même, mais il y a des progrès. Dernièrement pour la myopathie* de Duchenne, les chercheurs sont parvenus à restaurer la force musculaire de chiens porteurs de la même maladie que les enfants grâce à la thérapie génique. Maintenant il faut pouvoir passer à l’homme, mais c’est une avancée. Et puis sur une autre myopathie* (myotubulaire), un essai de thérapie génique a démarré, le premier bébé a été traité fin septembre. Cette recherche a été menée à Généthon, le laboratoire du Téléthon.

N. : Au fur et à mesure que la recherche avance, on se rend compte qu’il y a toujours un écho sur d’autres maladies comme une maladie de la vue, un cancer. Il y a des passerelles entre maladies rares et maladies fréquentes.

*Maladie qui touche les muscles

 

Rendez-vous les 8 et 9 décembre

Le 31e Téléthon a lieu les 8 et 9 décembre sur le thème des prouesses. 10 000 communes et 54 000 associations participent. Zazie est la marraine de cette édition 2017. Les fonds collectés permettront de faire avancer la recherche pour les maladies génétiques rares dont les myopathies (maladies qui touchent les muscles).

 

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