La pratique mutualiste s’est historiquement construite sur un élan de solidarité. Les premières sociétés de secours mutuels se sont constituées autour de garanties obsèques, de bains douches ou d’épiceries solidaires, pour solidairement faire face aux aléas de l’époque. Plus tard, cette solidarité s’est développée par la création d’une offre de soins ni publique (réservée aux « indigents »), ni privée (accessible aux seuls aisés).
Encore aujourd’hui, la solidarité demeure au cœur de la stratégie mutualiste. Concrètement, il s’agit de refuser les discriminations financières et la sélection des risques, depuis l’adhésion à la mutuelle (personne ne peut se voir refuser l’accès à la couverture santé) jusqu’à la tarification (les cotisations ne dépendent jamais de l’état de santé de l’assuré). La solidarité joue aussi entre bien-portants et malades, plus jeunes et plus âgés, célibataires et familles : c’est ce que l’on appelle la mutualisation des risques.
Plus largement, le marqueur de l’identité mutualiste, que constitue le principe de solidarité, a à plusieurs reprises inspiré les choix publics. À commencer par les contrats solidaires et responsables. La Mutualité a été le fer de lance de leur « durcissement » : elle proposait d’utiliser ces contrats à la fois pour améliorer la qualité des offres d’assurance santé et pour maîtriser les dépenses de soins qui n’étaient pas ou bien qui étaient mal prises en charge par la Sécurité sociale. Cette démarche de responsabilisation a été accueillie favorablement par les pouvoirs publics, qui ont cherché à l’imposer à l’ensemble du secteur de l’assurance santé par une fiscalité incitative.
En suivant par la généralisation de l’assurance santé. Le secteur mutualiste a appelé les pouvoirs publics à réaliser que l’accès à des soins de qualité était conditionné par le bénéfice d’une assurance santé. Ainsi, la généralisation d’abord dans l’entreprise a pu être considérée comme un progrès, dès lors qu’il s’agissait d’un premier palier.
Jusqu’à la définition d’un panier de soins à reste à charge nul. La Mutualité a souscrit à l’objectif de la réforme, en ce sens qu’elle pouvait permettre de renouer avec la promesse mutualiste selon laquelle cotiser à la Sécurité sociale et à sa mutuelle devait garantir l’accès de tous à des soins de qualité sur l’ensemble du territoire.
On peut se réjouir que ces trois réformes fassent écho à l’ambition mutualiste de servir l’intérêt général. Or, et c’est un paradoxe, elles constituent autant de risques d’indifférenciation, de fragilisation. La notion de « mutuelle », qui vaut désormais pour toutes les offres, pour tous les opérateurs, lucratifs et non lucratifs traduit bien ce paradoxe.
Fort heureusement, la Mutualité n’est ni soluble dans l’assurance santé, ni soluble dans l’assurance. La protection des adhérents et de leurs proches tout au long de la vie conduit à proposer des offres et des services personnalisés et adaptés à leur situation. Que complète le déploiement de la prévention, de l’accompagnement, des services et des établissements partout sur le territoire, au bénéfice de leurs adhérents et, plus largement, de tous les Français.
Thierry Beaudet, président de la Mutualité Française
La Mutualité Française fédère 650 mutuelles, soit la quasi-totalité des mutuelles en France. Ces dernières sont des sociétés de personnes à but non lucratif. Et elles ne sont pas que des complémentaires santé qui remboursent les dépenses des patients. Ce sont aussi des acteurs de prévention. Elles gèrent également des services de soins et d’accompagnement : établissements hospitaliers, structures dédiées à la petite enfance ou à l’accueil des personnes âgées ou des personnes en situation de handicap, centres dentaires, centres spécialisés en audition et optique…