Vrai/faux sur la consommation collaborative

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Par Angélique Pineau-Hamaguchi

Temps de lecture estimé 3 minute(s)

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© Bérengère Staron (illustration) ; Alain Bujak (portrait d’Hugues Sibille)

Concurrence déloyale pour les uns, moyen de retrouver du pouvoir d’achat pour les autres. La consommation collaborative fait débat.

La consommation collaborative n’est jamais à but non lucratif. FAUX

Elle n’implique pas forcément d’échange d’argent. Certaines de ces pratiques, comme le don ou le troc (d’objets, de temps…), sont totalement gratuites. Et même lorsque la plateforme internet demande une participation financière, elle ne sert alors qu’à couvrir les frais de fonctionnement, sans volonté d’en tirer profit.

Les structures qui mènent ces initiatives peuvent donc être à but non lucratif, lorsqu’il s’agit d’associations notamment, et fonctionner uniquement grâce au bénévolat. Mais ce ne sont pas forcément celles dont on parle le plus.

C’est bon pour l’environnement. VRAI et FAUX

En privilégiant l’usage plutôt que la possession, la consommation collaborative est vertueuse pour la planète. Pourquoi acheter une perceuse neuve (qui ne servira que très rarement) quand on peut la louer ou l’emprunter à un voisin ? On évite ainsi de produire des objets, et donc d’utiliser de nouvelles matières premières. Autre exemple, en limitant les trajets individuels, le covoiturage réduit aussi les émissions de gaz à effet de serre.

Mais, selon certains économistes, ces pratiques encourageraient en même temps l’hyperconsommation. Si je sais que je pourrai les revendre facilement, pourquoi ne pas acheter davantage de vêtements ?

La consommation collaborative bouscule le monde du travail. VRAI

Livraison à vélo, transport à la demande… De nouveaux emplois naissent avec la consommation collaborative, rémunérés « à la tâche » et exercés par des indépendants, parfois sans statut. Et donc sans droits sociaux. Ce qui représente une « concurrence déloyale » selon les acteurs de l’économie traditionnelle, comme en témoigne le conflit entre les taxis et UberPop qui a agité le pays en 2015.

En réponse, le rapport Terrasse, remis en février, préconisait de mieux organiser et réglementer cette nouvelle économie. Il a d’ailleurs inspiré certaines des mesures de la loi « Travail » qui visent à renforcer les droits des prestataires des plateformes collaboratives, notamment en matière de formation.

Une menace pour la protection sociale. VRAI

Basé sur la solidarité (entre bien portants et malades, entre salariés et demandeurs d’emploi…), le modèle de protection sociale « à la française » est financé principalement par les cotisations sociales et l’impôt. Et il ne peut fonctionner que si ces ressources sont en nombre suffisant. Or, si ces nouvelles formes de travail sans cadre juridique continuaient à se développer sans être davantage réglementées, elles pourraient menacer la pérennité de ce modèle.

 

C’est quoi la consommation collaborative ?
Elle désigne l’ensemble des pratiques de partage et d’échange de biens ou de services entre particuliers, mis en relation via une plateforme internet. 9 Français sur 10 auraient déjà testé l’une d’entre elles*, séduits par les économies possibles.

Mais la consommation collaborative a un autre revers, moins idyllique, incarné par des poids lourds comme Airbnb ou Uber. Mal encadrée, elle serait destructrice d’emplois et échapperait à l’impôt.

 

* Selon le ministère de l’Économie et des Finances.

 

Point de vue

Du collaboratif solidaire, c’est possible

« Il y a parfois confusion entre consommation collaborative et économie sociale et solidaire. Or, elles ne sont pas similaires. La première ne dit rien de la nature de la structure qu’il y a derrière. Il peut tout à fait s’agir d’entreprises capitalistes classiques, qui ne sont pas à but non lucratif. À l’inverse, les acteurs de l’ESS (coopératives, mutuelles, associations, fondations et entreprises sociales) partagent des règles de fonctionnement et des valeurs, qui reposent sur la solidarité, la démocratie et l’utilité sociale.
D’où la nécessité, pour l’ESS, d’investir elle aussi ce champ de la consommation collaborative. Notamment pour défendre une diversité économique et donner plus de choix aux consommateurs. Un choix vers plus de solidarité. »

Hugues Sibille, président du Labo de l’ESS, un think tank dédié à l’économie sociale et solidaire

Par Angélique Pineau-Hamaguchi

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