« La grossesse multiple, quelquefois à risque, est différente : plus suivie, plus fatigante, plus anxiogène, affirme Isabelle Sudre, présidente de la fédération Jumeaux et plus, qui regroupe 80 associations dans toute la France. Les parents sont fragilisés. Les mamans ont souvent achevé leur grossesse alitées, chez elles ou hospitalisées. La moitié des bébés naissent prématurés. »
Les dépressions post-partum sont plus fréquentes, même si elles n’ont rien d’une fatalité. Alors, pour faciliter l’arrivée des bébés à la maison, il est important de l’avoir anticipée, avec toute l’aide dont on aura pu s’entourer : conjoint évidemment, famille, amis…
Tant que les enfants sont nourris au lait, cela reste une question d’organisation pour allaiter les deux ensemble, chacun son tour ou bien savoir qui donne les biberons, mais lorsque l’alimentation se diversifie, il faut anticiper les réserves de produits de longue conservation (petits pots, surgelés…) et de produits frais pour concocter des menus variés. On peut également préparer des plats à l’avance et les mettre au congélateur.
Le matériel de puériculture doit être présent en double au domicile. Si une seule baignoire suffit, en revanche, si vous disposez d’assez de place, avoir deux transats à l’étage et deux au rez-de-chaussée ne sera pas superflu. Comme tout ce matériel est fort coûteux, on peut faire appel aux amis, à la famille ou à des associations pour un prêt. Il en va de même pour les vêtements qui peuvent être donnés ou prêtés par d’autres parents dont les enfants sont plus grands…
Le temps consacré aux soins quotidiens de jumeaux représente huit heures, et douze heures pour des triplés ! Il est alors préférable de se caler au plus vite sur le rythme des nourrissons. Pour résister à la fatigue, une règle absolue : se reposer ou faire une sieste dès que c’est possible, quand ils dorment. « On baigne l’un tandis que l’autre est sur un transat, calme parce qu’il regarde et qu’on lui parle, commente la présidente de Jumeaux et plus. C’est beaucoup plus serein que d’avoir un bébé qui hurle dans sa chambre. »
L’efficacité doit primer. Pour éviter d’être débordé, on renonce au bain quotidien : un tous les deux jours suffit amplement. La nuit, on évite de changer leur couche s’ils n’ont fait qu’uriner. On oublie le repassage, les bodys et les pyjamas conviennent à l’habillement des premières semaines. La moitié des mères de multiples allaitent. « Il est possible de mettre les deux bébés au sein en même temps s’ils ont faim au même moment, remarque Isabelle Sudre, et pouvoir échanger avec d’autres parents de multiples est aussi précieux pour avoir des pistes d’organisation, d’où l’intérêt de nos associations. Même si la journée se passe rarement comme on l’a décidé, il est important, d’un point de vue psychologique, d’avoir réfléchi et prévu un déroulement. »
Le père a bien sûr un rôle clé à remplir auprès des nouveau-nés, en alternant pour qu’aucun des parents ne se « spécialise » dans le soin à l’un des enfants. Il assure souvent la continuité dans le quotidien du ou des aînés, pour qui l’arrivée de petits frères ou sœurs constitue un véritable bouleversement.
Pour autant, les parents ne doivent pas oublier qu’ils sont aussi un couple et, à défaut le plus souvent de pouvoir s’offrir une sortie à deux, il est bon de se ménager des moments pour se parler et se retrouver.
Le soutien de la famille et des amis est précieux, mais il existe aussi des aides extérieures et, sur la base du quotient familial, les allocations familiales prennent en charge une partie des heures de travailleuses familiales, habilitées à s’occuper des enfants, ou d’aides ménagères.
Ces aides varient d’un département à l’autre, mais un socle commun garantit 80 heures par enfant au cours de la première année.
Les associations peuvent aussi vous offrir une écoute salutaire. « Il est important de verbaliser ses doutes, ses inquiétudes, note Isabelle Sudre. Les papas s’expriment moins et craquent plus lourdement. Les parents nous appellent quand ils n’en peuvent plus. Nous ne les jugeons pas et souvent nous les faisons rire de la situation. Les bébés vont grandir et, au fur et à mesure, ils se sentiront mieux. »
Aurélie et son mari avaient déjà un fils de 2 ans et demi quand ils ont accueilli des jumeaux.
« Avec l’expérience du premier, on savait à quoi s’attendre, se souvient cette maman. Ce ne sont pas les premières semaines qui ont été les plus difficiles, mais après trois ou six mois, parce que la fatigue s’était accumulée. »
Sans famille dans la région où elle vit, Aurélie s’est tournée vers les aides proposées par la caisse d’allocations familiales. « Deux heures par semaine, une travailleuse familiale, puis une aide-ménagère venait à la maison témoigne-t-elle. C’était très précieux pour se libérer de certaines tâches. Il faut se faire accompagner le plus possible. »
L’aide a cessé en revanche quand Aurélie a choisi de retravailler aux 10 mois des jumeaux. « Reprendre une activité dans un environnement calme et retrouver mes collègues m’ont fait beaucoup de bien, assure-t-elle. Le papa et moi avons décidé de travailler à temps partiel. A partir de leur premier anniversaire, tout est devenu progressivement plus facile. Ils ont aujourd’hui 2 ans et demi. »