Consommation responsable : comment aller plus loin ?

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Par Solal Duchêne

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© Harmonie Mutuelle

Les Français semblent convaincus de la nécessité de consommer de façon plus responsable. Mais pourquoi est-ce si difficile de modifier ses habitudes ? Et comment accompagner ces changements ?

Sommes-nous vraiment prêts pour la sobriété ? Une Agora mutualiste sur le thème de la consommation responsable et de la sobriété s’est tenue à Angers le 23 novembre 2022, pour tenter de répondre à cette interrogation.

Quatre intervenants étaient présents. Fanny Parise*, anthropologue et chercheuse à l’université de Lausanne était accompagnée par Jean Moreau, co-fondateur du mouvement Impact France. A leurs côtés, Nadia Boeglin, directrice de la transition écologique des grands comptes à l’ADEME et Gaëlle Pantin-Sohier, professeur à l’école universitaire de management d’Angers, ont fait vivre le débat et répondu aux questions du public.

Le rapport des Français à la consommation

D’après une étude**, 83% des Français souhaiteraient vivre dans une société où la consommation prendrait moins de place. Et 90% trouvent que l’on vit dans une société qui nous pousse à acheter sans cesse. Malgré ces chiffres, les changements de comportements restent limités, s’accordent à dire les intervenants du jour. « Le réflexe sobriété, on ne l’a pas, regrette Nadia Boeglin, de l’ADEME. Nous ne vivons pas dans une société des hommes et des femmes, mais bien dans une société de consommation. »

Pour Fanny Parise, anthropologue, le rôle du consommateur a changé et il faut lui laisser du temps pour s’ajuster. « Toute évolution passe par des essais ou des erreurs, comme on l’expérimente avec la pratique du vrac dans les supermarchés, tempère-t-elle. Il y a des loupés, mais les nouveaux récits collectifs valorisent le fait de ne pas y arriver du premier coup. »

Dans la salle, une main se lève. « L’éducation des consommateurs aura plus d’impact que les progrès techniques », souhaite réagir Mathias, un étudiant en marketing venu assister à l’Agora. « Ce n’est effectivement pas la technique qui va nous sauver, approuve Nadia Boeglin. Ce que nous défendons à l’ADEME, c’est une association des nouveaux comportements et des progrès technologiques ».

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Le rôle déterminant du marketing

« Le marketing aussi doit se renouveler », intervient Gaëlle Pantin-Sohier. D’après la professeure d’université, ce changement s’opère déjà dans l’enseignement. « Désormais, on intègre largement les notions de responsabilité sociétale des entreprises (RSE) et la transparence. On apprend à donner des infos claires aux clients sur la provenance des produits et l’impact de leur consommation. »

Le marketing aurait aussi un rôle à jouer sur le chemin de la sobriété heureuse, d’après la spécialiste du comportement des consommateurs. « Il doit véhiculer des discours positifs. Par exemple, consommer local et de saison, c’est bon pour notre santé mais aussi pour le goût ! Que les fraises soient meilleures en été, ce n’est pas uniquement vertueux, c’est aussi un argument de vente. »

Mettre le développement durable au centre du jeu

« On a d’abord connu la logique de compensation, avec des entreprises pollueuses qui créaient des fondations pour l’environnement afin de se dédouaner de leur mauvaises pratiques », rappelle Jean Moreau. Une pratique qui n’est plus crédible ou suffisante aujourd’hui, pour le cofondateur du mouvement Impact France, qui aide les entreprises à réduire leur empreinte carbone. « On bascule dans l'ère de l’économie circulaire, où les enjeux de développement durable doivent revenir au centre du business model des entreprises. »

L’entrepreneur croit désormais en « des vents favorables ». « Les entreprises à impact positif sont en train de gagner la bataille des talents, tandis que les pollueurs subissent un boycott important ». Jean Moreau évoque également le cadre législatif plus incitatif aux démarches vertueuses. « Interdire, cela peut aussi fonctionner, on l’a vu avec les sacs plastiques dans les supermarchés », rappelle Gaëlle Pantin-Sohier.

La surconsommation ne conduit plus au bonheur

« Et si l’on voyait l’inflation comme une manière de retrouver la valeur des choses et de s’interroger sur ce qui est vraiment nécessaire ? » questionne Jean Moreau. En un an, celle-ci a dépassé les 6% en France, d’après l’INSEE.

Acheter moins pour ne plus accumuler d’objet inutile, c’est faire un pas vers le bien-être, estime le professeur Pantin-Sohier. « On ne le sait pas sans avoir essayé, mais se débarrasser d’objets peut faire se sentir mieux. Passer à l’action fait prendre conscience que la surconsommation ne conduit plus au bonheur. »

Pourquoi alors cet écart entre les déclarations d’intention et les actions des consommateurs ? « Nous sommes tous des menteurs de bonne foi, plaide Fanny Parise. Chacun fait avec ses moyens pour réduire l’écart entre ses valeurs de vie et ses modes de consommation ».

Jean Moreau persiste quant à lui à se montrer optimiste. « On ringardise le Black friday et on rend cool le fait de sauver un panier d’invendus, car c’est le sens de l’histoire. Il y a une vraie puissance à être aligné entre ses valeurs et ses actions du quotidien. »

Le « Harmonie Mutuelle Friday » offre une seconde vie aux lunettes et audioprothèses

Jusqu’au 23 décembre 2022, les Français peuvent déposer leurs lunettes et leurs prothèses auditives usagées ou non utilisées dans l’ensemble des agences Harmonie Mutuelle et celles du réseau d’opticiens et d’audioprothésistes « Écouter Voir ». Cette opération lancée l’an dernier avait permis de récupérer 1000 lunettes, qui ont pu être réemployées ou recyclées. « Cette collecte a pour but d’encourager une consommation plus sobre et responsable, ce qui aura un impact positif sur la santé », a déclaré en conclusion de l’Agora Christelle Lecu, directrice de la région Pays de la Loire chez Harmonie Mutuelle.

* Fanny Parise a publié en 2022 Les enfants gâtés aux éditions Payot-Rivages.

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