Geoffroy Rudowski : d’auteur de bande dessinée à aide-soignant en Ehpad

Publié le

Par Benoît Saint-Sever (ANPM-France Mutualité)

Temps de lecture estimé 4 minute(s)

Illustration
© DR

Après vingt ans de carrière dans le dessin et l’illustration, Geoffroy Rudowski doit changer de profession. Il essuie une série de refus avant de trouver une place d’aide-soignant dans un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad).

De dessinateur à aide-soignant, c’est le parcours de Geoffroy Rudowski. Cet auteur de bande dessinée revient ensuite à sa passion pour raconter son histoire dans Prends bien soin de toi !*

Vous étiez dessinateur depuis une vingtaine d’années quand, à 42 ans, vous changez de métier. Pourquoi avez-vous pris cette décision ?

Illustration
©DR

Geoffroy Rudowski. Je me suis mis au dessin en 1998, quand je suis rentré chez Fluide Glacial. C’était un rêve qui se réalisait et qui m’a ouvert beaucoup de portes. J’ai ensuite travaillé avec la presse jeunesse et j’ai réalisé mes premiers albums de bande dessinée. Au début de mon activité, j’avais beaucoup de travail et je n’avais pas de problème pour vivre de mon métier. Et petit à petit, ça a moins bien fonctionné. Je faisais moins de dessins pour la presse et le marché de la BD avait profondément changé, il y avait beaucoup plus de concurrence et il fallait être rentable dès le premier album. Pour m’en sortir, j’ai fait des albums de commande, plus commerciaux, notamment dérivés de films. Mais les délais de réalisation étaient très courts et la rémunération ne suivait pas. La vraie dégringolade a eu lieu en 2014. Je me suis séparé de la mère de mes enfants, j’avais des dettes et je n’arrivais plus à payer les factures. Pour m’en sortir, on m’a conseillé de faire autre chose, de trouver un « vrai métier ». Sur le coup, j’ai été vexé, car être dessinateur m’avait demandé beaucoup de sacrifices. C’est comme cela qu’à 42 ans, je me suis retrouvé à Pôle Emploi, avec pour seul diplôme mon baccalauréat.

Comment avez-vous été embauché dans un Ehpad ?

G. R. La recherche d’emploi a été très compliquée. J’aurais accepté n’importe quel job, mais on refusait de m’embaucher parce que j’étais trop vieux ou que je n’avais pas assez d’expérience. J’avais entendu dire qu’un Ehpad cherchait du personnel, alors j’ai envoyé mon CV. Je pensais y faire du ménage et, finalement, on m’a contacté pour un poste d’aide-soignant non diplômé.

Illustration
©DR

Connaissiez-vous déjà le monde du soin ?

G. R. À 18 ans, je me suis occupé de mon père, qui était tombé gravement malade. Je l’aidais au quotidien, pour prendre le repas, etc. Le travail en Ehpad et cette période de ma vie avaient beaucoup de points communs. Mon expérience d’aide-soignant a fait écho avec ce que j’ai vécu à 18 ans.

Qu’avez-vous retenu de cette expérience ?

G. R. C’est un métier tourné vers l’humain, où l’on fait de belles rencontres, que ce soit avec les collègues ou avec les personnes qui vivent dans l’Ehpad. Mais malheureusement le fonctionnement, lui, est loin de l’être. Quand on doit s’occuper de dix ou douze personnes chaque matin et que l’on a seulement quinze minutes pour la lever, faire la toilette, l’habiller et refaire le lit, on est vite écœuré. Le contact avec les personnes en fin de vie m’a tout de même rappelé que l’important dans la vie est d’être heureux et de faire ce que l’on aime.

Pourquoi avez-vous choisi de reprendre le dessin pour raconter votre histoire ?

G. R. Quelques années avant de faire cet album, j’ai rencontré mon éditeur sur le festival de BD Quai des bulles. Je lui ai raconté que j’avais arrêté le dessin et que je travaillais dans un Ehpad. Il m’a dit qu’un jour j’en ferai une histoire et que je reviendrai le voir. Les mois ont passé, j’ai réussi le concours d’aide-soignant et j’ai commencé la formation. Mais le dessin me manquait, et j’avais une impression de gâchis. Alors j’ai décidé d’arrêter l’école et j’ai repris mes crayons pour raconter le monde du soin, sans forcément en faire un récit intime. C’est mon éditeur qui m’a encouragé à raconter mon expérience, et c’est comme cela que Prends bien soin de toi ! est né.

*Prends bien soin de toi !, de Geoffroy Rudowski, Bamboo édition, 72 pages.

Par Benoît Saint-Sever (ANPM-France Mutualité)

Commentaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.
Tous les champs sont obligatoires.

Ce site utilise un système anti- spams pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Cette question sert à vérifier si vous êtes un visiteur humain ou non afin d'éviter les soumissions de pourriel (spam) automatisées.

A découvrir