Mon enfant devient ado : à quoi dois-je m’attendre ?

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Par Pauline Hervé

Temps de lecture estimé 5 minute(s)

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Conflits, mal-être, conduites à risque… L’adolescence a une réputation difficile qui a de quoi effrayer bien des parents. Cette image est-elle justifiée ? Comment aborder l’adolescence en famille? Réponses.

L’adolescence et la puberté, c’est pareil.

FAUX. La puberté est un phénomène physiologique. C’est l’ensemble des changements biologiques qui nous font passer du corps d’enfant à celui d’adulte : règles, développement des seins chez les filles, mue de la voix, changement de la taille du sexe chez les garçons, développement de la pilosité chez les deux.

L’adolescence se situe certes autour de l’âge de la puberté, mais c’est un concept plus vaste. C’est la transition du monde de l’enfance à celui des adultes. « L’idée d’adolescence est récente, c’est un phénomène social et culturel. D’ailleurs, dans de nombreuses parties du monde, il n’existe pas d’adolescence, on accède à travers des rites de passage du statut d’enfant à celui d’adulte », fait remarquer Michel Fize, sociologue et auteur de nombreux travaux sur l’adolescence. Le concept n’existe d’ailleurs que depuis le XIXe siècle en Occident.

On devient adolescent de plus en plus tôt.

VRAI. En France, les premiers signes de puberté apparaissent (selon l’Inserm) vers 10-11 ans chez les filles, et 12-13 ans chez les garçons. Mais des études, américaine et danoise montrent l’augmentation des cas de puberté précoce, surtout chez les filles, à partir de 8 ans. Les causes n’en sont pas encore bien identifiées, même si l’on soupçonne l’influence des perturbateurs endocriniens présents dans notre environnement.

Est-ce que l’adolescence arrive, elle aussi, plus tôt ? Le guide de l’adolescent, rédigé par le docteur Alain Braconnier, médecin psychanalyste, en situe le début à 10 ans et la fin à… 25. Un âge pas étonnant si l’on considère, comme beaucoup d’ados* que l’on devient adulte quand on acquiert responsabilités et autonomie financière. Et avec l’allongement des études, cela arrive de plus en plus tard.

Pour Michel Fize, le sociologue, l’adolescence démarre dès 8 à 9 ans et dure jusqu’à 14 à 15 ans. « Oui, à 8 ans on devient un "petit ado", car on veut copier les plus grands. C’est une histoire de comportements, de goûts qui changent et s’affirment. L’adolescence, c’est le stade du conformisme au groupe. Après l’entrée au lycée, on se distingue du groupe, on devient "un jeune". »

* Enquête Ipsos Santé-Fondation Pfizer 2013.

L’adolescence, c’est forcément une crise.

FAUX. Les années de puberté et d’adolescence portent beaucoup de changements difficiles : bouleversement du corps, premiers émois amoureux et questionnements sur son identité et son avenir… Ce qu’on appelle « la crise » est finalement une vaste phase d’adaptation, comme le souligne Alain Braconnier. Ces changements inquiètent les parents qui voient leur « petit enfant » se transformer sous leurs yeux. Difficile pour eux de ne pas penser aux extrêmes de l’adolescence, les conduites à risque, les consommations dangereuses de drogue et d’alcool, les mises en danger volontaire, voire la dépression et le suicide…

Certes, l’adolescence génère du mal-être chez certains, mais le piège serait d’en faire une généralité. Ainsi, selon une vaste enquête de l’Inserm, plus de 50 % des ados français disent avoir confiance en leur avenir. « Dans la majorité des cas, les ados vont très bien, merci ! souligne Michel Fize. Je n’aime pas le terme de "crise" : il a une connotation trop médicale. C’est plutôt une période de tensions, notamment avec les parents », détaille le sociologue.

Il faut garder une chose en tête : le métier de parent d’enfant et de parent d’ado sont rigoureusement différents. Il faut donc repenser ses rapports avec son enfant devenu ado pour tirer le meilleur de ce qu’on appelle cette fameuse « crise ».

C’est impossible de communiquer avec « son » ado.

FAUX. Une étude Ipsos a montré que 84 % des adolescents français disent parler facilement avec leurs parents. L’adolescent peut sembler paradoxal : demandeur à la fois de liberté et de « limites », de réassurance et d’indépendance… Un comportement qui peut épuiser ou mettre en colère les parents.

Selon Le guide de l’adolescent du docteur Braconnier, il faut essayer de naviguer au mieux entre deux écueils : d’une part l’absence d’autorité, d’autre part l’autorité « toute faite », verticale et non expliquée ou discutée. L’idéal : instaurer un dialogue à la fois créatif et ferme. Posez-lui des questions sur ses centres d’intérêt (réseaux sociaux, musique), ses opinions, même si vous devez reconnaître que vous n’y connaissez rien et risquer une petite moquerie. « Vous devez comprendre que toute satisfaisante qu’elle sera pour votre ado, votre relation avec lui vous semblera souvent frustrante ou incomplète par rapport à ce qu’elle a pu être pendant son enfance. Loin de vous décourager, vous avez intérêt à tenter de poursuivre ce dialogue, quoi qu’en dise votre ado », souligne Alain Braconnier.

Mais comment s’y retrouver pour garder son autorité de parents au milieu de tous ces changements ? L’adolescent en a-t-il besoin ? Il faut savoir être ferme quand la sécurité, physique ou affective, du jeune est en jeu. Pour toutes les autres questions (vie quotidienne, partage des tâches, sorties, choix des loisirs…), apprendre à laisser l’autonomie du jeune s’exercer. Enfin, un conseil du sociologue Michel Fize : appuyez-vous sur les bons mots, soyez positifs dans votre vocabulaire : limite, cadrer, autorité sont des mots négatifs. Préférez « donner des repères » à « imposer des limites », par exemple.

Pour aller plus loin :

« Le nouveau visage de nos adolescents » : résultats d’une grande enquête menée par l’Inserm sur les adolescents français.

Le guide de l’adolescent, Dr Alain Braconnier, Éditions Odile Jacob, nouvelle édition 2017.
Antimanuel d’adolescence, Michel Fize, Éditions de l’Homme, 2009.

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