Oldyssey : un monde où les vieux comptent

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Par Patricia Guipponi

Temps de lecture estimé 4 minute(s)

Illustration
© Samuel Lefebvre

Deux jeunes trentenaires ont arpenté une quinzaine de pays pour témoigner que vieillir n’est pas une fatalité. Bien au contraire.

On peut vieillir bien et heureux. Chaque témoignage, chaque parcours de vie, mis en boîte par Julia Mourri et Clément Boxebeld, confortent cette certitude. Leur odyssée à travers le monde, débutée il y a trois ans, donne un regard différent sur la vieillesse. Bienveillant et positif. Poussés par les liens privilégiés établis avec leurs grands-parents, les deux trentenaires ont décidé de s’embarquer dans une aventure hors du commun. Ou plutôt une Oldyssey (1), nom de leur périple profondément humain.

Les films ramenés de leur échappée cassent les idées reçues, les préjugés sur les vieux, prennent le contre-pied des discours ambiants. « Ce que l’on a vécu avec nos grands-parents est en total décalage avec ce que véhiculent encore la société, les médias », raconte Clément. « Nos mamies et papis étaient des personnages, enjoués, dynamiques, avec des projets et des passions ».

Question de longévité

La Norvège serait le pays idéal pour bien vieillir. Selon l’Insee, on vivrait plus longtemps en région Occitanie. Moins dans les Hauts-de-France. Ce qui est certain, c’est qu’il y a cinq territoires dans le monde, les zones bleues, où est concentré un nombre plus important de centenaires bien-portants : Nicoya au Costa Rica, Loma Linda aux États-Unis, Ikaria en Grèce, Okinawa au Japon et Ogliastra en Sardaigne. Pas la peine de s’y précipiter : la longévité ne s’attrape pas. C’est le résultat de tout un parcours de vie où l’environnement, l’alimentation, les liens sociaux forts, l’état d’esprit jouent un rôle majeur.

Des solutions plutôt que des problèmes

La représentation que l’on fait des aînés est souvent faussée. « On les cantonne à un rôle de sages ou des sous-adultes. On réduit le vieillissement à la perte de capacités physiques, intellectuelles ». Les rides, les décennies qui défilent, l’espérance de vie qui s’allonge sont trop souvent vues comme des problèmes.

« Économiquement, on se demande comment on va financer la dépendance alors que la perte d’autonomie n’arrive que vers les 86 ans en moyenne selon les statistiques. Ça touche moins de 10 % des personnes âgées de plus de 65 ans ». Qu’à cela ne tienne, Julia et Clément ont pris leur bâton de pèlerins, en mode reporters et sociologues de terrain, pour ramener de quoi renverser la vapeur. Et mettre en lumière des exemples de dispositifs, d’idées, de pistes qui pourraient servir à mieux appréhender le vieillissement, rapprocher les générations.

Les vieux, demain, c’est nous

Les informations récoltées, en ligne sur le site internet dédié au projet, sont multidisciplinaires et intéressantes à plus d’un titre. « Le vieillissement est l’affaire de tous. Certains ont compris qu’il fallait adapter les produits et les services à cette population. Les vieux, ce sont nos grands-parents, nos parents, certes… Demain, les vieux, c’est nous ». Caméra en bandoulière, avec Julia, son équipière, Clément s’est immergé dans plus de quinze pays.

Certains territoires sont déjà très engagés en matière d’innovation en faveur des seniors. D’autres, comme le Brésil ou la Chine, où la transition démographique s’est accélérée, sont poussés à en faire une priorité. « Les personnes âgées ont un rôle d’avenir primordial dans nos sociétés. Elles ne sont pas que le reflet du passé, d’un monde révolu ». Preuve en est en Colombie où les anciens, issus de populations autochtones, interviennent dans les écoles pour épauler les jeunes en situation de décrochage en leur transmettant leur histoire, leurs savoirs. « Les gamins retrouvent la fierté de venir d’un peuple indigène qui a été discriminé ».

Un rôle majeur dans l’évolution de la société

Au Sénégal, des mamies, regroupées sous le nom de Grandmother project, œuvrent contre le mariage forcé des fillettes. Elles parlent avec les chefs de famille pour les convaincre de renoncer à leurs desseins. Et ont un rôle majeur dans l’évolution de la société. « Elles nous ont bluffés par leur courage. Nous sommes très admiratifs de ces personnes rencontrées, de leur belle énergie », ajoute Clément, qui prépare avec Julia un livre sur leur aventure. Mi-juin, le duo a retrouvé d’autres mamies. Des Sud-Africaines, footballeuses, rencontrées en octobre 2018. À l’invitation d’Oldyssey, ces dernières ont débarqué, crampons aux pieds, à Saint-Étienne pour disputer un match avec des joueuses françaises de plus de 60 ans. De sacrées phénomènes.

(1) Jeu de mot : le Od de Odyssey – odyssée en anglais - étant remplacé par old qui signifie vieux.

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