Stéphane Clerget : Le cyberharcèlement se manifeste par des commentaires péjoratifs, insultants, humiliants via des textos, chat en ligne, posts sur les forums ou les réseaux sociaux tels que Facebook, Twitter, Instagram. Le cyberharcèlement peut venir d’une personne ou d’un groupe de personnes et peut aller jusqu’au parasitage d’un compte pour en modifier le contenu au désavantage de son propriétaire.
Par ailleurs, trois éléments majeurs le distinguent d’un harcèlement scolaire « classique ». D’abord, il peut émaner d’inconnus, souvent difficiles à identifier. Ensuite, c’est un harcèlement qui laisse des traces, dans la mesure où, sur internet, rien n’est effaçable. Enfin, il est beaucoup plus intrusif car il envahit l’espace privé : l’ado se sent alors agressé jusque dans son intimité.
S. C. : En parler avec lui, le sensibiliser pour éveiller sa vigilance. Négocier également un accès à ses réseaux sociaux pour prendre connaissance, de temps en temps, de son activité numérique en lisant les commentaires qui sont faits sur ses messages. Conditionner également l’utilisation de son smartphone à des temps limités : en interdire l’accès par exemple pendant les devoirs et imposer un couvre-feu le soir afin que l’ado ne se couche pas avec son téléphone.
Enfin, informer son enfant sur le fait qu’un cyberharcèlement est pénalement répréhensible.
S. C. : On porte plainte auprès de la police en lui fournissant des captures d’écran de tout ce qui peut témoigner du harcèlement (photos, sms, messages…). On est alors orienté vers les services qui gèrent la cyberdélinquance, afin de caractériser le délit, par exemple une atteinte à la vie privée ou une diffamation publique (les motifs racistes, sexistes ou homophobes constituant des circonstances aggravantes).
* Auteur de Les Vampires psychiques : comment les reconnaître, comment leur échapper (Fayard).
Rappelons-le : 80 % des adolescents ont une vie numérique sereine… « Je le dis souvent aux parents pour qui le numérique n’est que danger », confie Justine Atlan, directrice de l’association e-Enfance* et du numéro court national 3018. Pour autant, la cyberviolence existe et fait des ravages. Elle s’est d’ailleurs amplifiée avec les confinements successifs : e-Enfance a enregistré en 2020 une hausse de 57 % des signalements (par rapport à 2019).
Que faire alors, en amont, pour éviter les dérapages ? « Il faut expliquer à ses enfants que les réseaux sociaux, comme les messageries soi-disant “privées”, ne sont pas du tout un lieu d’intimité, note Justice Atlan. N’importe qui peut toujours capturer ou enregistrer ce que l’on poste. Aussi, plus on livre d’éléments sur sa vie personnelle (photos, vidéos), plus on s’expose à la violence et la méchanceté. »
Inutile, pour autant, d’adopter une position radicale face à l’univers numérique. « Interdire l’accès aux réseaux ou confisquer le téléphone d’un ado est contreproductif, reconnaît Justine Atlan. Le risque est que votre enfant y retourne en cachette, et vous tienne à l’écart des problèmes éventuels… » Rappelons toutefois que les réseaux sociaux n’acceptent pas les moins de 13 ans. « Un bon argument pour protéger son enfant, indique l’experte. Notre conseil : créer éventuellement un compte avec lui au préalable pour prendre le temps de s’y acclimater ensemble. »
* Créée en 2005, elle a pour mission de protéger les mineurs sur internet.