Voyager avec un handicap, c’est possible

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Par Alexandra Luthereau

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© Getty Images

Bientôt les vacances et l’envie de changer d’air. Pour les personnes en situation de handicap, bonne nouvelle : le tourisme accessible se développe. Bouger en France ou à l’étranger demande toutefois une bonne dose de préparation. Pour les y aider, de nombreux outils existent.

Audrey Barbaud est une globe-trotteuse. Et ce n’est pas son fauteuil roulant qui l’empêche de se rendre en Thaïlande, au Canada, au Vietnam... Pour partager ses expériences et ses conseils aux personnes avec un handicap qui, comme elle, rêvent d’évasion, elle a lancé en 2014 le bien nommé blog Roulettes et sac à dos. Avec ce blog, la jeune femme de 29 ans veut surtout faire passer un message : « Voyager seule en fauteuil roulant : c’est possible ! ».

Les deux frères voyageurs Julien et Rudy, auteurs du blog Handilol, ne disent pas autre chose. Leur premier voyage ensemble après que Rudy se soit retrouvé en fauteuil s’est déroulé à Venise. Un vrai défi quand on connaît la ville aux canaux et aux multiples ponts.

Accessibilité : le premier critère à vérifier

Possible mais pas toujours facile pour autant, même pour le tourisme en France. « Les acteurs des loisirs et du tourisme ont pris conscience qu’il existe une clientèle potentielle avec le public des personnes handicapées et, de manière générale, avec les personnes aux besoins spécifiques comme les seniors ou les familles, explique Annette Masson, présidente de l’association Tourisme et Handicaps. Mais il y a encore beaucoup à faire. »

Selon les chiffres de la Délégation ministérielle à l’accessibilité, publiés en 2017, 384 166 établissements recevant du public (musées, administrations publiques, restaurants, commerces, hôtels, gares) sont accessibles. Soit 37 % du million d’établissements recensés.

De plus, si certains établissements se déclarent accessibles, la réalité peut s’avérer tout autre. Une chambre d’hôtel peut l’être mais pas sa salle de bain. Ou bien, une base de loisirs est aménagée pour accueillir tous les publics, toutefois les transports adaptés pour s’y rendre sont inexistants. Pour les touristes en situation de handicap, la plus grande préoccupation est donc de « s’assurer que le lieu où ils se rendent est véritablement accessible. Les informations ne sont pas toujours complètes », précise Annette Masson.

Recherches et prises de contact

La préparation de son séjour est donc indispensable, en sachant que pour chaque personne les besoins sont différents. Audrey de Roulettes et sac à dos adopte toujours la même stratégie : « fouiner » sur Internet. Elle consulte les sites touristiques officiels mais aussi des blogs, les commentaires sur les sites… Rudy et Julien préparent de la même façon leurs séjours en Europe. Ce qui leur demande « deux à trois mois de recherches, des dizaines d’e-mails envoyés et autant de coups de téléphone passés, explique Julien. Nous nous sommes dit que nous ne pouvions pas garder pour nous toutes les infos collectées en amont et pendant le voyage. Il faut les partager. »

Comme tous les blogueurs handitouristes, ils font part de leurs bonnes adresses, de leurs expériences sur place, tout en donnant un maximum de détails, photos et dimensions à l’appui, créant ainsi des guides touristiques en ligne. Les deux frères voyageurs proposent même des vidéos des villes visitées. Et parce que l’accessibilité du tourisme est aussi une question de moyens financiers et d’accompagnement pour les gestes du quotidien, Handilol comprend une rubrique de bons plans pas chers et des contacts de personnes compétentes dans l’accompagnement de personnes handicapées.

Labels, guides, blogs, sites…

D’autres outils existent encore. La marque d’État Tourisme et Handicaps identifie des lieux comme véritablement accessibles sur au moins deux des quatre familles de handicap (handicap moteur, visuel, auditif et mental). « Cette marque repose sur la vérification des informations et non sur du déclaratif », souligne la présidente de l’association. Aujourd’hui, 5300 établissements sont labellisés en France métropolitaine et dans les Dom Tom.

Né il y a cinq ans, le label Destination pour tous va plus loin encore. Il met à l’honneur les territoires où la mobilisation de tous les acteurs publics et privés locaux permet l’inclusion. Bordeaux, Amiens et Balaruc-les-Bains sont les premières villes labellisées. Le label handiplage garantit quant à lui l’aménagement de plages françaises pour accueillir les différents publics.

Citons encore le guide du Petit Futé « Handitourisme » qui offre conseils et bonnes adresses pour séjourner en France et à l’étranger ou encore les agences de voyages spécialisées pour l’organisation de voyages clé en main adaptés.

Agrégateur de données

Enfin, les outils numériques comme Jaccede peuvent être utiles pour faciliter les loisirs et les sorties au restaurant par exemple. Leur force : les avis et commentaires des utilisateurs et les outils de géolocalisation.

La bonne idée du chatbot (robot de dialogue) de la start-up I wheel share est d’agréger toutes les données disponibles sur l’accessibilité. L’outil, qui se veut un compagnon pour les personnes handicapées, compte 200 000 données en tout. Pour la partie tourisme et loisirs, on y retrouve « les sites labellisés Tourisme et Handicaps, Handiplage, mais aussi les destinations proposées par Handiscover ainsi que des conseils de voyage de blogueurs et Youtubeurs globe-trotters en situation de Handicap, des adresses de stations de ski accessibles ou encore des acteurs locaux comme l’Office de tourisme Entre deux mers », détaille Audrey Sovignet, qui a lancé le projet.

Reste que chaque personne en situation de handicap a des besoins spécifiques. C’est pourquoi les handitouristes conseillent d’appeler systématiquement les lieux d’hébergement en demandant des photos et des mesures et la compagnie aérienne avant toute réservation pour s’assurer de pouvoir voyager avec son fauteuil.

« Quant à la crainte numéro un des handitouristes, l’avion, Julien rassure : « Beaucoup de personnes s’empêchent de voyager en avion de peur de retrouver leur fauteuil cassé à l’arrivée. Cela peut arriver mais c’est très rare. Avec mon frère, nous avons pris l’avion une cinquantaine de fois, nous n’avons jamais eu ce genre de problème ». Alors prêt à voyager ?

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