Thomas Blanchette : « L’énergie se trouve dans les territoires et il faut être au plus près de ceux-ci »

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Candidat à la présidence d’Harmonie Mutuelle pour succéder le 6 juillet 2021 à Stéphane Junique, Thomas Blanchette nous explique son parcours, ses convictions de mutualiste, ainsi que sa vision du modèle mutualiste de demain.

Thomas Blanchette

Issu du monde de l’industrie, Thomas Blanchette, 52 ans, a suivi pendant plusieurs années un double parcours : celui de syndicaliste et de mutualiste, à travers son arrivée comme administrateur au sein de la mutuelle Mutinter en 1997 puis au sein de l’union Harmonie Mutualité. À partir de 2007, il se consacre exclusivement au mutualisme en devenant administrateur puis membre du comité exécutif d’Harmonie Mutuelle. En 2016, il devient membre du Conseil de la Caisse nationale d’assurance maladie, où il représente la Mutualité Française, puis devient président de la mutuelle Chorum (mutuelle des structures de l’Economie sociale et solidaire) en 2016. Il est nommé administrateur de Mutex en 2017 et membre du bureau du Groupe VYV en 2019. Thomas Blanchette est actuellement vice-président délégué d’Harmonie Mutuelle. 

Vous êtes candidat à la succession de Stéphane Junique à l’assemblée générale du 6 juillet. Quelles sont les motivations qui vous ont poussé à soumettre votre candidature ? 

TB : J’ai été sollicité pour prendre la succession de Stéphane Junique et je suis honoré de poursuivre le chantier de mes prédécesseurs. Ceux-ci ont construit bien des choses au fil des années. Je veux parler par là même d’Harmonie Mutualité, de l’Union Harmonie Mutuelles, d’Harmonie Mutuelle, etc. Bref, de toutes les phases de construction auxquelles ont contribué Joseph Deniaud, Bernard Richier, Guy Herry ou encore François Venturini puis Catherine Touvrey, notre directrice générale et tant d’autres auparavant qui ont lancé un processus dans les années 90 menant à nous regrouper. Sans oublier Stéphane Junique qui vient de prendre la présidence du Groupe VYV. Nous étions plutôt pionniers, un peu décriés aussi, mais nous avons montré la voie. Je souhaite m’inscrire dans la continuité de cette construction progressive et contribuer, grâce à ma vision et à mes convictions, au travail engagé. 

« Une entreprise mutualiste qui est tournée vers le monde de l’entreprise »

Quel devrait être le rôle de Christine Pouliquen-Sina qui se présente à vos côtés ? 

TB : En tant que vice-présidente déléguée, Christine portera une large délégation sur le Livre III* et aura la tâche de superviser les mandats et les travaux des entités où nous exerçons une responsabilité. Elle représentera les intérêts et la réalité d’Harmonie au sein de VYV 3 la faîtière du groupe qui porte les établissements de soins et de services. Le pilotage global d’Harmonie Mutuelle sera bien sûr porté par les deux dirigeants effectifs de la Mutuelle, le président et la directrice générale. 

Voudrez-vous faire évoluer la relation à l’adhérent, quelles seront les nouvelles priorités pour Harmonie Mutuelle ?  

TB : Parallèlement à la relation avec l’adhérent individuel, qui devra bien sûr rester forte et engagée, nous ne devons pas oublier qu’Harmonie Mutuelle a une spécificité car elle est une entreprise mutualiste qui est tournée vers le monde de l’entreprise, avec depuis quelque temps une majorité de « clients » qui sont des entreprises adhérentes, via les contrats collectifs. Auprès de ces 65 000 entreprises clientes, nous devrons mener une analyse fine de leurs besoins en santé, en prévoyance et sur d’autres protections. Et bien sûr autour des besoins de services associés, de qualité de vie au travail, de prévention et d’action sociale. Des métiers qui sont les nôtres depuis de nombreuses années. 

Comment peut évoluer la relation avec les dirigeants d’entreprise ? 

TB : Cette évolution est déjà en marche avec des collectifs comme Harmonie Entreprise. A la rentrée, il y aura également Harmonie ESS (N.D.L.R. Economie sociale et solidaire). Ces travaux ont été entrepris par mes prédécesseurs et par les équipes de Catherine Touvrey et nous allons renforcer cette relation. Je souhaite d’ailleurs que l’on développe des relations avec l’ensemble des parties prenantes des territoires, en particulier les représentants des syndicats et des employeurs, qui portent une réalité. Nous devrons imaginer comment dans tel secteur d’activité on peut construire un dialogue et co-construire des dispositifs dans les territoires. Cette approche est valable pour le monde de l’entreprise comme pour la démocratie sanitaire : avec les professionnels de santé, les associations de patients, de consommateurs. Il s’agit d’un marqueur important.

« La qualité de service sur nos métiers cœurs est la priorité »

Quid du modèle mutualiste ? En quoi est-il encore moderne et actuel pour nos entreprises ?

TB : Le modèle a toujours été moderne. Il a pu être parfois mal exploité dans l’histoire de la Mutualité mais pour autant, il est moderne. On le voit dans la crise sanitaire et économique, le modèle juridique de mutualisation du risque permet de faire de belles choses en matière de complémentaire santé mais pas seulement. Tout ce qui n’est pas interdit dans le code de la Mutualité est autorisé. Alors que certains de nos concurrents sont restés uniquement sur la complémentaire santé, nous nous sommes autorisés à innover dans d’autres domaines comme celui de l’accompagnant. Nous l’avons fait ces dix dernières années en restant leader dans la complémentaire santé.

Vous avez rappelé récemment que le « statut n’est pas vertu ». Où placez-vous le curseur entre l’utilité sociale et la performance économique ?

TB : Il ne faut pas oublier que nous sommes avant tout un acteur de la protection sociale complémentaire. Notre travail c’est d’accompagner nos clients adhérents individuels et entreprises et de les couvrir à travers des garanties. Mais à côté de cela, pour redistribuer, pour accompagner et avoir une utilité sociale, il faut dégager des marges suffisantes. Sans excédent, impossible de faire évoluer ni d’apporter des services complémentaires. Par conséquent, la qualité de service sur nos métiers cœurs est la priorité, pour être légitime et entendable sur d’autres champs. 

Performance économique et gains de productivité ne sont pas de vilains mots. Cela fait partie des sujets qui sont devant nous. Je pense en particulier aux évolutions de la place des complémentaires santé dans le paysage avec le rapport du Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM) et ses effets. Par conséquent il y a l’évolution des technologies, l’automatisation de nombreux dispositifs, des partenariats qui vont accélérer ces possibilités. Nous avons devant nous des chantiers très structurants. Avec l’ambition de mutualiser avec le Groupe VYV certains de nos services en visant des gains de productivité, l’excellence, la qualité de service et la relation client. Tout cela va guider le plan stratégique 2022-2026 et la feuille de route politique proposée en septembre.

En quoi cette gouvernance sera-t-elle encore plus démocratique ? 

TB : Nous sommes dans une démocratie indirecte, et j’estime que cette démocratie s’exerce à travers nos délégués. Cette démocratie n’est pas parfaite, il y a des efforts à accomplir, notamment en termes de diversité pour le conseil d’administration et nos instances, mais nous avons fait de beaux progrès ces dix dernières années. À nous de créer les conditions de cette démocratie dans les territoires. Notre relation avec nos 2 200 délégués territoriaux doit permettre la diversité de la représentation. Il faut créer des moments de vie dans les territoires, par exemple avec les Agoras Essentiel Santé créés par Essentiel Santé Magazine et Harmonie Mutuelle. On peut entreprendre de belles choses à Paris mais l’énergie se trouve dans les territoires et il faut être au plus près de ceux-ci pour mesurer ce que l’on peut faire. Nous devons co-construire des moments de vie mutualistes pour comprendre la réalité et les difficultés des citoyens et apporter des solutions adaptées à leurs réalités et à leurs besoins.

« Un impact social, sociétal et environnemental »

Harmonie Mutuelle deviendra entreprise mutualiste à mission à l’assemblée générale du 6 juillet. En quoi ce statut d’entreprise mutualiste à mission devrait renforcer cette utilité sociale d’Harmonie Mutuelle ?

TB : Ce n’est pas tant le statut d’entreprise mutualiste à mission mais plutôt les objectifs que nous allons nous assigner et la temporalité de la mise en œuvre qui feront la démonstration de notre capacité à avoir un impact social, sociétal et environnemental. Cela va nous obliger à accélérer ce travail avec les parties prenantes (associations de patients, associations de consommateurs, syndicats de salariés et employeurs, professionnels de santé, collectivités, ARS, CPAM, etc)

C’est l’idée d’une mutuelle proche de tous les citoyens ?

TB : Exactement. J’estime qu’il faut aller encore plus loin dans ce domaine. Mes responsabilités dans l’assurance maladie m’ont amené à travailler à la fois avec les institutions et avec les parties prenantes. Les énergies et les besoins existent. Comment les fédérer ? Nous offrons des services et de l’ingénierie mais nous ne sommes pas forcément à la manœuvre. La logique veut qu’on soit dans un collectif pour écouter les bruits du monde afin de comprendre où est notre place dans ce dispositif sans nécessairement prendre le leadership. Loin des corporatismes, nous devons avoir cette capacité à répondre à toute la population sans division. 

La crise du Covid-19 n’est pas encore derrière nous. A-t-on toujours un rôle à jouer dans cette crise sociale, économique et sanitaire ?

TB : Nous devons toujours accompagner les entreprises, notamment dans la mutation du travail, et être à leurs côtés afin de leur apporter des solutions complémentaires sur la santé et la qualité de vie au travail. Il y aura certainement des moments difficiles à gérer pour les collaborateurs avec des changements qui vont peser (télétravail, isolement, etc). Nous devons être irréprochables et vigilants chez nous d’abord, auprès de nos 4 500 collaborateurs qui eux aussi seront impactés par les changements d’organisation du travail post COVID, pour ensuite être pertinents pour les autres dans notre accompagnement. 

Si vous êtes élus, comment souhaitez-vous votre présidence ? 

TB : Je citerai trois adjectifs : simple, sobre et sincère. 

* Une mutuelle régie par le livre III du code de la Mutualité pratique des actions de prévention, d’action sociale, de gestion de réalisations sanitaires et sociales (à travers des « services de soins et d’accompagnement mutualistes » ou SSAM). 

  • Jean Chezaubernard
  • Crédit photo : Sylvie Humbert

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